Malgré les dénégations par voie épistolaire fortement martelées sur fond de convictions confrériques et la dernière tentative de conciliabules à Doha, la déclaration de candidature de maître Madické Niang pose les prémisses d’un divorce conflictuel avec le PDS et avec son secrétaire national, l’ancien président de la République, maître Abdoulaye Wade.
Pourtant, après la sortie virulente de maître Abdoulaye Wade en réponse au débat posé non pas en interne mais dans les médias par maître Madické Niang, beaucoup de nos compatriotes ont pensé que ce dernier n’aurait jamais le courage d’en découdre avec son ami et frère de longue date et avait fini de déposer les armes afin de préserver des liens d’amitié et de fraternité confrérique. Ils estimaient que le pouvoir ou sa conquête ne prendrait jamais le dessus sur la confiance et l’estime entre de vieux compagnons qui ont su préserver leur relation en dépit de l’usure du temps et des aléas liés à l’existence humaine.
Que nenni ! C’est vraiment mal connaître la nature de nos politiciens professionnels. En vérité, le simple fait d’amener le débat d’une éventuelle candidature de substitution au candidat Karim Meissa Wade, investi régulièrement par les instances du PDS sur la place publique, constitue au demeurant, un moyen de pression en vue de faire bouger les lignes et de créer une fissure au sein du parti de maître Abdoulaye Wade voire de se poser en victime aux yeux de l’opinion de ses pratiques despotiques. Ces échanges épistolaires lui ont entre ouvert la voie de la séparation. Sans cet exercice de communication politique, jamais maître Madické Niang n’allait franchir le pas d’une confrontation directe avec maître Abdoulaye Wade.
Sur ce coup, maître Abdoulaye Wade n’a pas vu venir son fidèle compagnon de parti, mais aussi il a sous-estimé les talents de politicien professionnel de maître Madické Niang, un homme de l’ombre et de réseaux au sein de la confrérie mouride. Pourquoi, par ailleurs, maître Madické Niang de surcroît avocat de Karim Meissa Wade n’a pas su poser avec courage et détermination le débat de sa candidature à l’élection présidentielle du 24 Février 2019 un peu plus tôt à partir du moment où il était convaincu que le candidat du PDS Karim Meissa Wade n’avait aucune chance de participer à ces joutes électorales en raison même des nombreux obstacles imposés de fait par le président Macky Sall ? La candidature de maître Madické Niang aurait eu plus d’impact s’il avait montré son opposition à la candidature de Karim Meissa Wade de manière ferme.
En homme de l’ombre, il a gardé son mal en patience tout en jouant sur le temps et sur l’improbable candidature de Karim Meissa Wade pour sortir du bois et de contester le choix du PDS afin de mieux fragiliser l’intransigeance des instances du parti de poursuivre dans la voie d’un affrontement inévitable avec le régime du président Macky Sall.
Cette façon cavalière et machiavélique de porter sa candidature sur les marges du PDS est un coup fatal de maître Madické Niang qui risque de déstructurer les instances du parti, voire de jeter le doute sur ses militants au moment même où des suspicions sur son accointance avec le président Macky Sall sont soulevées de part et d’autre. Soit !
Cependant, il revient de droit et en toute responsabilité au candidat maître Madické Niang de clarifier sa position au sein du PDS. Ou compte-t-il s’appuyer en concurrence avec le candidat déclaré du PDS sur ses forces vives pour partir à la conquête du pouvoir ? Une telle posture est – elle tenable sur le plan de l’éthique à partir du moment où maître Madické Niang a choisi délibérément de ne pas respecter la ligne directrice des instances du PDS ? N’est – il pas judicieux pour maître Madické Niang d’assumer son choix et de ne compter que sur ses forces pour briguer la magistrature suprême ?
Maître Madické Niang a-t-il reçu l’aval de Touba ou a t – il été instruit voire travaillé par des membres influents de la garde rapprochée du khalife général proches du président Macky Sall afin de contrecarrer les velléités du PDS à vouloir maintenir coûte que coûte la candidature de Karim Meissa Wade et d’éviter in fine des tensions sociales ? Avec un refrain à la clé visant comme toujours à préserver la paix sociale tout en activant leurs réseaux en vue de pacifier l’espace politique et de permettre à certains dont maître Madické Niang, une oreille de confiance à se positionner afin de récolter par des voies détournées les voix du PDS dans la Cité de Touba ou d’ouvrir un boulevard à la coalition Benno Bokk Yakaar dans le fief du mouridisme. C’est selon. Même s’ils se gardent de le dire ouvertement comme à Tivaouane afin d’éviter une levée de boucliers ou une dénonciation de connivence coupable avec les fossoyeurs de la République, certains milieux de l’entourage direct du Khalife militent pour la réélection du président Macky Sall.
Pourquoi soudainement maître Madicke Niang décide de se présenter à l’élection présidentielle alors qu’il n’a jamais manifesté le désir de conduire les destinées de la nation ? Ou pense t – il sérieusement que les jeux sont ouverts au regard de la situation de crise qui prévaut dans le pays et la méfiance accrue de la population à l’égard de la mouvance présidentielle Benno Bokk Yakaar et que tout compte fait il peut sortir de l’ombre et remporter l’élection du 24 Février 2019 ? Ou estime t – il que le pouvoir se ramasse au pays de la Teranga et que le dernier venu peut ravir la vedette contre toutes attentes aux autres candidats déjà bien présents dans le champ politique ? Ou pense t – il comme le commun des sénégalais que si Macky Sall est parvenu à devenir président de la République, lui qui ne se projetait jamais au-delà de chef de service à Petrosen, n’importe quel autre homme politique peut y arriver même s’il traîne des casseroles ou s’il est visé par une enquête de la CREI, rangée depuis dans les tiroirs du président de la République, Macky Sall ? L’audace donne des ailes. Et maître Madické Niang veut suivre les traces du président Macky Sall en se disant pourquoi pas moi ? Ou est-il un simple candidat de diversion ?
Toutefois, il ne suffit pas de se poser comme candidat de substitution du PDS pour se donner une posture de présidentiable. Il faut s’armer de courage et accepter de recevoir des coups et de tenir un langage de vérité à nos compatriotes. Il faut oser sortir du politiquement correct pour dire ouvertement et en toute franchise vos positions sur toutes les questions de société qui secouent le pays de la Teranga : notre rapport à une gestion éthique de nos deniers publics, la problématique du favoritisme au Sénégal sur toutes ses formes et son impact sur le devenir du pays, les questions liées à une justice indépendance et à équidistance des différentes chapelles politiques ou confrériques voire quel contenu donner à la République, la question liée à la préférence nationale et la gestion de nos ressources énergétiques, une nouvelle offre éducation calquée sur nos valeurs sociétales afin de mieux façonner l’homme senegalensis, un être capable de porter voire de défendre nos référents culturels dans un monde désenchanté où les repères se perdent assez facilement.
Une candidature crédible aujourd’hui ne peut faire l’impasse sur ces différentes interrogations. Le Sénégal est face à son destin et ne peut plus se permettre de poursuivre inlassablement la voie des politiciens professionnels qui ne pensent qu’à la satisfaction de leur volonté de puissance. Nous espérons que votre candidature n’est pas celle de trop et qui vise à brouiller les pistes de l’opposition sénégalaise afin de permettre au président Macky Sall de rempiler. Une telle attitude serait contraire à l’honneur et au devoir de responsabilité. Maître avez-vous réellement les moyens de faire mieux que le candidat du PDS monsieur Karim Meissa Wade ? Dites – nous maître Madické Niang, pourquoi maintenant vous vous lancez dans une aventure incertaine en raison même de votre position de chamberlan ou Beuk nekk de maître Abdoulaye Wade et ce malgré vos différentes fonctions ministérielles au PDS au lieu de poursuivre le combat politique contre le président Macky Sall avec vos frères de parti en vue de le contraindre à lâcher du lest ? Les citoyens sénégalais ont le devoir de connaître vos réelles motivations. On ne quitte pas les rangs de son parti à quelques mois d’une élection capitale pour espérer convaincre ses militants de vous accompagner sur une autre bannière politique ou de porter une candidature indépendante
La loyauté d’un confident ne devrait jamais se défaire, peu importe les enjeux de l’heure. Au Sénégal, le jeu politique n’a que faire de ces considérations à partir du moment où on peut rompre sans coup férir ses nombreux engagements de fidélité. La politique est sur le point de montrer à nos compatriotes que l’amitié ne résiste pas à la tentation du pouvoir. Au demeurant, il faut savoir faire le choix entre la satisfaction de nos intérêts personnels et la poursuite d’un idéal d’épanouissement de l’ensemble du corps social sénégalais.
Toutefois, si vous tenez réellement à solliciter le suffrage de nos concitoyens, il faut alors oser rompre maître Madické Niang avec le PDS afin de mettre tout le monde à l’aise. Vous ne pouviez pas avoir un pied dans le PDS et un autre dans un mouvement qui lui fait face en vue de réduire dans une certaine mesure ses prétentions. Assumez maître Madické Niang en définitive vos choix politiques devant l’histoire et tournez la page du PDS.
A partir du moment où vous avez pris souverainement la décision de briguer le suffrage des citoyens sénégalais, il vous revient de droit de vous préparer en connaissance en proposant un programme alternatif crédible qui rompt avec les pratiques de gestion clanique du président Macky Sall et qui prend en compte de manière intrinsèque les intérêts supérieurs de la société sénégalaise. Comptiez-vous maître Madické Niang redonner à la République ses valeurs et vertus malmenées par le régime du président Macky Sall ou optiez-vous en faveur d’un statu quo d’une République sous influence de lobbies maraboutiques et de puissances étrangères ?
Certes, c’est votre droit et libre à vous de solliciter le suffrage de nos compatriotes. Cependant, vous devez batailler fermement en proposant à nos concitoyens un projet de société crédible pouvant rallier les électeurs sénégalais sur l’essentiel de ce qui fonde notre volonté de vivre en commun dans la dignité de l’ensemble du corps social et le respect des lois et règlements de la République en vue de mettre fin aux dérives du régime hétéroclite Benno Bokk Yakaar et non de divertir nos compatriotes sur une candidature qui ne repose en définitive que sur du vent.
Vous portez ainsi comme d’autres candidats de moindre envergure ou de saupoudrage médiatique, une énorme responsabilité sur une possible dispersion de voix de l’opposition sénégalaise. Maître Madické Niang, le jeu ou un désir immodéré de puissance en valent-ils la peine au point d’hypothéquer l’avenir de la nation ? Et le peuple dans toute mise en scène grotesque orchestrée par les vrais profiteurs du système d’accaparement systématique de nos deniers publics ?