Malgré la «non-inscription» de son candidat Karim Wade sur les listes électorales, en raison de l’article L 31 du Code électoral, et subséquemment l’invalidation plus que probable de cette candidature par le Conseil Constitutionnel, et autre menace d’arrestation qui pèse sur le retour de ce même candidat au Sénégal, à moins qu’il ne solde son amende de 138 milliards à lui infligée par la Crei, le Pds persiste et signe dans le choix de son porte-flambeau à la présidentielle. Tout en refusant de manière mécanique un quelconque plan alternatif à cette même candidature au sein du parti libéral, comme en témoigne la «marginalisation» de Me Madické Niang dans le groupe parlementaire libéral aussi bien que dans le parti. Raison suffisante pour se demander, compte tenu des contraintes qui pèsent sur la candidature de Karim Wade, si le Pds ne file pas tout droit vers le suicide politique ? Ou à contrario, si Me Wade, en fin stratège politique, ne réserve pas une botte secrète au président Macky Sall ? Le moins que l’on puisse dire en tout cas, c’est que les cartes sont brouillées, avec la posture actuelle du Pds.
A moins de cinq mois de la présidentielle, le Pds qui constitue la deuxième force politique du Sénégal n’a pas varié d’un iota dans la désignation de son candidat à la présidentielle, en l’occurrence Karim Wade, dont la participation au scrutin du 24 février prochain fait pourtant l’objet de moult restrictions de la part du pouvoir en place. Choisi comme candidat du Pds à la présidentielle de 2019, en mars 2015, à deux jours du verdict de son procès à la Crei (Cour de répression de l’enrichissement illicite), le fils d’Abdoulaye Wade continue de condenser les espoirs du Pds, ou selon de son père, de revenir par ricochet à la tête du pays pour diriger les destinées du Sénégal. Comme ce fut le cas de 2000 à 2012, via la première alternance politique au Sénégal.
Seul hic, la candidature de Karim Wade à la présidentielle semble aujourd’hui plombée par sa «noninscription » sur les listes électorales, en raison de l’article L 31 du Code électoral corrélé à la peine de 06 ans de prison infligée à Karim Wade par la Crei. Et vraisemblablement, l’arbitrage attendu du Conseil constitutionnel qui doit établir la liste des candidats à la présidentielle, ne semble pas parti pour donner raison à Karim Wade et au Pds, contre toutes les autres juridictions (Chambre d’accusation Tribunal d’instance, Cour suprême) qui ont préféré s’en laver les mains. Pis, une sorte d’épée de Damoclès reste suspendue sur la tête de Karim Wade, en cas de retour au Sénégal.
Comme le révélait dans Sud Quotidien (du 02-10-2018) Ousseynou Samba, enseignantchercheur à la Faculté de droit de l’Ucad, spécialiste du droit pénal, selon qui les autorités pourraient bien mettre en exécution leur menace de procéder à l’arrestation de Karim Wade, dès sa descente d’avion à Dakar, pour le contraindre à payer les 138 milliards de francs CFA d’amende que la Crei lui avait infligée, suite à sa condamnation pour enrichissement illicite. Malgré toutes ces contraintes, le Pds n’en démord pas et s’arcboute sur son candidat Karim Wade. En refusant systématiquement tout plan alternatif à cette candidature. Me Madické Niang, dernier ministre libéral des Affaires étrangères, fidèle d’entre les fidèles de Me Wade, patron sortant du groupe parlementaire de l’opposition, passera ainsi à la trappe en osant « aventurer» une candidature autre au sein du Pds.
Celle de Karim Wade continuait d’avoir la cote chez les libéraux. Pour preuve, la rébellion de Me Madické Niang, pourtant sur la base du pur réalisme politique, n’a été suivie par aucun des pontes du parti. Tous les responsables libéraux de nom (Oumar Sarr, Babacar Gaye, Toussaint Manga et autres) se sont investis à renouveler leur fidélité au «Pape du Sopi», seule constante d’un parti dont les sillons ne sont cependant pas clairement dégagés pour la présidentielle à venir. Seulement, fort de sa conviction, le Pds persiste et signe dans l’éligibilité de son candidat, tout en accentuant sa campagne de collecte des signatures de parrains.
La presse relaie ainsi qu’avant-hier seulement, par correspondance en date du 14 octobre, Me Wade a vigoureusement demandé aux libéraux de continuer la mobilisation pour les opérations de parrainage, qui vont se poursuivre, au niveau de son parti, jusqu’au mois de novembre. L’objectif étant de collecter le maximum de parrainages afin de contribuer à la validation de la candidature et à la victoire de l’ancien ministre d’État, ministre du Ciel et de la terre. Dans la foulée, le Pape du Sopi annonçait le lancement prochain d’une tournée nationale de suivi de la campagne de collecte de signatures pour Karim Wade.
Jeu De cartes pipées
L’inscription sur le fichier électoral, base de l’éligibilité de tout candidat à la présidentielle, non accordée à Karim Wade par le Code électoral, la validation de sa participation à la présidentielle presque embouteillée au niveau du Conseil constitutionnel, le Pds ne file-t-il pas tout droit vers le suicide politique ? Le moins que l’on puisse dire en tout cas, c’est que la stratégie du « Tout Karim Wade ou rien » risque d’être fortement préjudiciable à la participation du Pds au scrutin de février prochain. Qui plus est, cette disposition du Pds au harakiri politique, via l’obstination de Me Wade à candidater contre vents et marées son fils, pourrait négativement influer sur l’avenir de la deuxième force politique du Sénégal. Présent à toutes les élections présidentielles depuis sa création en 1976, le Pds risque en effet de voler en mille morceaux s’il s’aventure à ne pas briguer le suffrage des Sénégalais en février prochain.
Me Abdoulaye Wade peut-il se hasarder à une telle éventualité, au nom d’une fixation viscérale sur son fils au détriment du Pds ? Ou bien, en fin tacticien politique, le Pape du Sopi ne serait- il pas en train de nous mijoter une botte secrète qui pourrait avoir des conséquences létales sur le régime de Macky Sall ? Au rythme où vont les choses, force est de reconnaître en tout cas que le jeu de Me Wade n’est guère explicite. Etant entendu que le Pds sait pertinemment qu’il ne peut pas mettre à exécution sa menace de paralyser le scrutin, en cas d’invalidation de la candidature de Karim Wade, à quoi jouerait donc le parti d’Abdoulaye Wade ? En cette veille d’élection présidentielle, les pistes s’avèrent en vérité brouillées au niveau du parti libéral, malgré les multiples professions de foi en la candidature de Karim Wade.