Le Sénégal s’est lancé dans son plan d’infrastructures majeur depuis la première alternance car le pays en avait vraiment besoin et cette carence en infrastructures freine toujours la croissance économique du Sénégal. Le président Wade, après son ascension à la magistrature, a commencé des travaux d’infrastructure sur l’étendue du territoire. Cela a eu un impact positif sur la croissance économique du Sénégal. Le président Sall a suivi sur les pas de son prédécesseur car le pays était toujours en manque d’infrastructures de qualité pour le décollage économique. Comme son prédécesseur il a fait de grandes réalisations sur ce plan et cela a aussi eu un impact positif sur notre croissance économique. Nous analyserons pourquoi le Sénégal peine toujours à décoller malgré les réalisations du président Sall.
Le Sénégal tarde toujours à décoller
Il n’est pas trop tard pour rectifier le tir et tendre vers l’émergence. Si l’Etat respecte les engagements pris, nous pouvons aspirer à devenir une nation souveraine car la dette et la souveraineté pour les pays en voie développement ne se conjuguent pas toujours au même temps. Bien que l’Etat ait dépensé 65,5 milliards en bourses de sécurité familiale, 10,2 milliards pour le programme des domaines agricoles communautaires et 104, 2 milliards pour les programmes en faveur de l’emploi des jeunes et des femmes, nous voyons que la précarité est toujours présente. Le taux de chômage est toujours élevé et les revenus ne semblent pas augmenter proportionnellement au cout de la vie. Pour que cela soit possible, il faut développer les régions de manière harmonieuse et les doter d’écoles de formation spécifiques aux ressources qui y sont présentes. L’industrialisation des régions est obligatoire pour le développement du Sénégal et la lutte contre la précarité.
Malgré l’augmentation du budget des forces de défense et de sécurité de 93% en 5 ans, nous assistons toujours à une insécurité galopante au Sénégal. Pour diminuer l’insécurité, surtout locale, il faut impérativement que les jeunes aient accès à des emplois décents pour subvenir à leurs besoins et vivre dignement. Cela n’est faisable qu’en développant le secteur primaire.
Bien que 145 milliards aient été dépensés pour l’assainissement du territoire, nous nous demandons toujours quelles zones ont été assainies car il semble que l’insalubrité soit partout et cela surtout durant l’hivernage. Cela aurait dû être résolu d’une manière urgente car le cadre de vie fait partie de la fondation de l’émergence.
Bien qu’il y ait eu une augmentation de 32,4% du budget de la santé et de la prévention, le budget de la santé est toujours inférieur à l’intérêt que nous payons pour le service de la dette (169 milliards pour le budget de la santé contre 221 milliards pour les intérêts payés). La mise en place de la CMU pour un montant de 32,3 milliards est une chose urgente dont le Sénégal a besoin mais parallèlement il n’y a pas de programmes en place pour arrêter cette subvention. L’Etat ne doit pas dépenser de l’argent dont il ne dispose pas, les hôpitaux n’arrivent pas à fonctionner normalement à cause de la dette qui leur est due. Le secteur privé en souffre car les hôpitaux ne seront pas en mesure de payer leurs fournisseurs. Si l’Etat facilite la création d’emplois, les citoyens seront en mesure d’avoir une prise en charge. En quelque sorte, tout tourne autour de l’emploi et pour que cela arrive, il faut sérieusement développer le secteur agricole.
Le budget pour combattre l’ignorance est passé de 157,5 milliards en 2011 à 555,6 milliards en 2017. Cela représente un investissement prioritaire mais il est inadmissible que le Sénégal ait toujours des abris provisoires pendant que des dépenses somptuaires prennent place. Certes aucun secteur ne doit être épargné pour un développement endogène mais l’arène nationale aurait pu attendre jusqu’à ce qu’il n’y ait plus d’abris provisoires au Sénégal. Cela aurait démontré le désir de vouloir développer ce secteur et non de vouloir faire plaisir à un certain électorat.
Quand la loi de finances demande si l’Etat possède un système fiscal suffisamment performant pour garantir le remboursement futur des capitaux empruntés, la réponse est que le système fiscal sénégalais, objectivement le plus performant de l’UEMOA, a fini de faire ses preuves. Il faut sérieusement reformer le système fiscal du Sénégal d’une manière sérieuse et arrêter de nous comparer à des pays qui n’ont pas la même chance que nous. Nous n’avons jamais connu de guerre civile, nous sommes stratégiquement bien placés, nous sommes l’un des pays les plus stables de notre région et nous n’avons jamais connu de coup d’Etat. Nous ne devons jamais nous comparer à des pays qui ont connu des guerres civiles, des coups d’Etat et une instabilité permanente. Nous devrions être la première économie de la région à cause de tous les avantages dont nous possédons.
Quand la loi de finances demande si l’Etat utilise les ressources empruntées dans des dépenses utiles et nécessaires, qui auront le maximum d’impact sur la richesse future de la Nation, la réponse est que la politique du président Sall a été plébiscitée depuis longtemps par les investisseurs (émission d’eurobonds). Nous devons être plus sérieux que cela et savoir que les ressources empruntées sont mal allouées et cela est compréhensible car le président aspire à un second mandat et l’électorat le pousse à faire des dépenses somptuaires car votant pour un bilan à court terme. Il est temps que le président prenne son courage à deux mains, ignore les folies de l’électorat, se concentre sur le Sénégal pour nous mettre sur la voie de l’émergence.
Le Sénégal peut se développer mais il faudra que les dirigeants le veuillent d’abord, ensuite qu’ils arrêtent la politique politicienne et enfin mettre le Sénégal sur la voie de l’émergence en développant le secteur primaire. Il faut impérativement que le système fiscal soit plus efficient en supprimant les exonérations fiscales pour les entreprises ne créant pas suffisamment d’emplois au Sénégal. Le secteur informel doit être formalisé pour recouvrer environ 300 milliards par année. Il faut aussi songer à privatiser les entreprises d’Etat qui ne sont pas rentables et cela pourra alléger leur fardeau sur notre budget. Il ne faut pas favoriser les établissements financiers de l’Etat en difficulté car cela pèse aussi sur notre budget surtout avec l’installation de beaucoup de banques étrangères. Le capital humain est le capital le plus important pour le développement de notre nation donc il n’est pas acceptable que le budget de la santé soit inférieur aux intérêts que nous payons pour le service de la dette. Il faut éradiquer les abris provisoires et investir dans l’éducation et la santé. Cela semblera être une hérésie mais il faut que notre monnaie soit dévaluée à moins que nous nous décidions avec les autres pays de la région à avoir notre propre monnaie qui reflètera l’état actuel de notre économie. Le Franc CFA est surévalué.
Nous devons éradiquer la corruption et le chef de l’Etat doit sortir tous les dossiers dont il détient pour que les auteurs soient jugés. Il est temps que les politiciens arrêtent de détourner les deniers publics et se mettent au service de la nation. Et enfin il faut réduire l’effectif de la fonction publique pour pouvoir accroitre l’investissement public. Avec le développement du secteur primaire et l’industrialisation, il sera possible de réduire l’effectif de la fonction publique sans augmenter le taux de chômage. Le seul danger est que le PSE est un programme qui dotera le Sénégal d’infrastructures de nouvelle génération et aidera la population au jour le jour avec les programmes sociaux en place mais le PSE ne permettra jamais au Sénégal de devenir une nation émergente à l’horizon 2035. Est-ce-que le président Macky Sall aura le courage de déchirer le PSE durant son second mandat s’il est réélu et le remplacer par un programme qui développera le Sénégal ? Ou devrons-nous attendre l’élection d’un autre président pour enfin pouvoir mettre le Sénégal sur la voie de l’émergence ?
Mohamed Dia est consultant bancaire