L’intégrité intellectuelle du Pr Cheikh Anta Diop et l’humanisme de Thomas Sankara sont une source intarissable d’inspiration pour tout africain qui veut participer au progrès des idées et du politique dans son pays. Leur vie menée avec honnêteté, leurs productions écrites (les livres de l’un, les discours de l’autre) et leur action politique sont un legs inestimable et un moyen de garder la foi pour toute personne qui choisit une vie marquée par l’engagement.
Quand Cheikh Anta Diop dit en 1978 » On ne doit être fier que de ses travaux. Rien n’est plus triste qu’un chercheur qui ne trouve rien. Si l’on se bornait à réciter le savoir acquis à l’école, sans rien y ajouter par nos propres découvertes, l’humanité en serait à l’âge primitif. Ce qui fait donc la valeur de l’intellectuel, c’est sa contribution réelle au progrès des connaissances de son temps. »
Thomas Sankara lui « répond », en 1984, à l’occasion de son discours mémorable devant l’Assemblée générale de l’ONU :
« La bourgeoisie africaine oublie que toute vraie lutte politique postule un débat théorique rigoureux et elle refuse l’effort de réflexion qui nous attend. Consommatrice passive et lamentable, elle se regorge de vocables fétichisés par l’Occident comme elle le fait de son whisky et de son champagne, dans ses salons à l’harmonie douteuse.
On recherchera en vain depuis les concepts de négritude ou d’”African Personality” marqués maintenant par les temps, des idées vraiment neuves issues des cerveaux de nos “grands” intellectuels. Le vocabulaire et les idées nous viennent d’ailleurs. Nos professeurs, nos ingénieurs et nos économistes se contentent d’y adjoindre des colorants parce que, des universités européennes dont ils sont les produits, ils n’ont ramené souvent que leurs diplômes et le velours des adjectifs ou des superlatifs. » Fin de citation.
Ainsi, à 6 ans d’intervalle, le message demeure le même : la nécessité de se renouveler et l’assumer face à l’ancien monde et aux sceptiques. Remettre en cause l’ordre établi afin d’être un facteur de progrès pour sa société. Ces deux hommes nous invitent à vivre notre querelle des anciens et des modernes, à bousculer nos certitudes, nos connaissances, nos soumissions et nos habitudes. Ils sont pour le mouvement, celui de l’esprit. Celui qui, in fine, manque cruellement à l’Afrique.
Inspirons nous de ces deux hommes, étudions les dans le détail, et non de manière superficielle, puis faisons leur honneur en sortant du slogan, de la répétition stérile, y compris de leurs mots à eux. Ils sont un socle, solide mais dépassable, sur lequel chaque africain peut bâtir, autour de lui, quelque chose de meilleur, de différent et qui fera progresser le sort de ses semblables. La seule chose à laquelle ils nous invitent est d’entamer et de maintenir le mouvement, de remettre en cause de l’ordre établi. C’est comme cela que les individus progressent. C’est comme cela que les peuples progressent.