Le président français Emmanuel Macron est en itinérance mémorielle qui l’a conduit une semaine durant, hors de Paris, la capitale de la République française. Au cours de ce périple, il a rendu hommage aux trente milles (30 000) tirailleurs sénégalais tombés sous les balles de l’ennemi pendant la première guerre mondiale en 14-18.
Parlant de la France, il faut distinguer la France institutionnelle de la France du peuple français. Quand la France institutionnelle se souvient du sang versé par les africains pendant la première guerre mondiale 14-18 pour que la France du peuple français retrouve sa dignité bafouée et sa liberté confisquée par les nazis, on constate non sans le regretter, le black-out total sur le sujet en Afrique d’où sont extraits ces tirailleurs sénégalais.
Parmi les chefs d’Etats africains présents à la cérémonie, il y avait le président malien Ibrahima Boubacar Keita. L’extrait de son discours diffusé sur France 24 est beaucoup plus marqué par la politique que par la réminiscence du sacrifice suprême consenti par les tirailleurs sénégalais pour que vive la France.
Pour le président Ibrahima Boubacar Keita, les tirailleurs sénégalais ont combattu dans les terres de France pas pour la France mais pour eux-mêmes. Ils ont combattu beaucoup plus souvent, la nuit que le jour. La question qui se dégage de cette situation est : A quel titre le Président malien intervenait dans cette cérémonie ?
Ces tirailleurs sénégalais ont versé leur sang sur la terre de France pour nourrir les artères de la liberté, restaurer la démocratie annihilée et féconder l’amitié franco-africaine que la France institutionnelle appelle sous des dénominations différentes, tantôt Françafrique tantôt francophonie.
Vingt-cinq ans plus tard, en 1945, d’autres tirailleurs sénégalais furent enrôlés pour venir en aide toujours à la mère patrie, la France du Marechal Pétain envahie et occupée par les forces nazies.
Après tant de sacrifice consenti par les tirailleurs sénégalais, c’est dommage et regrettable qu’un intellectuel français qui répond du nom d’Eric Zemmour joue la carte du nazisme au son de la francité exclusive au nom de la liberté d’opinion et d’expression.
En effet, Eric Zemmour est celui-là qui a dit à Hapsatou Sy chroniqueuse française d’origine sénégalaise à l’émission les terriens du Dimanche de changer de nom. Lui demandant quel nom aurait-elle dû porter en lieu et place, Eric Zemmour, sans vergogne, il répond, Corine. Parce qu’elle est en France. Et en France, on n’aurait le droit de porter le nom de Hapsatou, de Bineta, d’Adja, de Fatou, de Mamadou, de Mouhamed, de Moustapha, d’Ahmed etc.
Et pourtant ces tirailleurs sénégalais qui s’appelaient entre autres nominatifs, Moussa, Amadou, Malamine, Habib, Babacar d’origine sénégalaise comme Hapsatou ont abandonné leur famille, leurs enfants, leur terre, pour combattre les nazis dans les terres de la France de De Gaulle, et de George Clemenceau, humiliée, martyrisée et privée de sa liberté existentielle, géographiquement et culturellement lointaine de l’Afrique mère berceau de l’humanité.
Cette France faite du sang des races de toutes les origines : africains, américains et européens devrait sincèrement être reconnaissante et appréciée à juste titre, le l’immense sacrifice consenti par tous ces hommes, sacrifice sans lequel, immanquablement, elle ne sera pas ce qu’elle est devenue.
Eric Zemmour est étiqueté comme un intellectuel français polémiste. Il écrit des livres qui se vendent bien dans les bibliothèques. Mais, ce n’est pas ce qu’on attend d’un intellectuel qui connait l’histoire de la France et qui comprend le monde qui l’entoure. Revendiquer une francité basée sur le racisme, c’est faire fi de l’histoire de la France et être incapable de voir plus loin que son nez.
Un intellectuel est un maçon qui construit des libertés et des solidarités non seulement pour lui-même mais pour tous y compris la liberté de choisir un nom pour son fils ou pour sa fille. Bref ! Un intellectuel digne de ce nom ne peut pas attribuer à ses parents la liberté de l’appeler comme ils l’ont appelé Eric Zemmour et refuser cette liberté aux parents d’Hapsatou Sy de l’appeler comme elle s’appelle.
Un intellectuel ne doit pas avoir peur de la différence car lui-même est la différence qui transcende toutes les différences. S’il n’est pas un conteur, son travail consiste à essayer de comprendre le monde et de le faire comprendre aux autres.
On ne choisit pas sa race et son ethnie. C’est l’histoire et la géographie qui en décident. Eric Zemmour aurait pu être Peul ou Bambara, ou Rohingya, ou Mongol si l’histoire et la géographie en avaient décidé. Etre français, ce n’est pas du mérite c’est une question de géographie et d’histoire à l’emprise de l’être humain. La culture française n’existe pas sans les autres cultures.
Sous le registre de la lucidité intellectuelle même Donal Trump, président des Etats-Unis d’Amérique est mieux loti qu’Erick Zemmour, le célèbre polémiste français des plateaux de télévision. Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, le président Donal Trump accepte les minorités de tous les bords et les considère sans exception des américains non à part mais des américains à part entière. Qu’ils soient noirs, hispaniques, améraniens etc. Quel que soit le nom qu’il porte : Hapsatou, Hassanatou, Binetou Rassoul Abdallah, Alioune, Ababacar. Etc. Il n’a jamais demandé à personne de changer de nom.
Lorsqu’Eric Zemmour, un intellectuel français et non un homme politique devient plus raciste que sa compatriote Marie le Pen qui à sa décharge, n’a jamais demandé aux françaises et aux français d’origine étrangère de changer de nominatif pour être des français.
Cet homme est aveugle de son racisme en se considérant ironiquement comme une victime.