La liberté syndicale, le droit de grève et le droit de négociation sont des droits acquis de haute lutte par la communauté des travailleurs. Ces droits précités n’auraient pas existés, sans la liberté d’association, leur mère nourricière.
Il ne s’agit pas ici d’évaluer le degré d’application de la liberté syndicale, le droit de grève et la liberté d’association mais plutôt de montrer d’une part, mon étonnement relatif au silence assourdissant du gouvernement par rapport à la revendication de la coalition des syndicats du secteur de la santé dénommée « And Gueuseum » et d’autre part, d’appeler à des négociations préventives en vue d’abréger les souffrances des populations qui seraient éprouvées par la grève.
Si le syndicat a le droit de grève et le droit de négociation en tant que force sociale représentant les travailleurs, le gouvernement a le devoir d’écoute et le devoir d’engager des négociations pour trouver une solution au problème posé. Justement, c’est le devoir exclusif du gouvernement d’autant plus qu’il s’agit ici de grève de travailleurs du secteur public notamment de la santé dont l’Etat est employeur.
La coalition des syndicats de santé « And Gueuseum » est à son quinzième plan d’action. C’est énorme du point de vue arithmétique, en d’autres termes sur le plan comptable. Il s’agit chronologiquement de compter : 1,2, 3, 4, 5, 6, 7,8 jusqu’à 15. Franchement, on est surpris et étonné par le nombre de plan d’actions déroulé sans qu’il y ait à l’initiative du gouvernement, un début de négociations entre les différentes entités concernées.
Dans leur quatorzième plan d’action, la coalition des syndicats de la santé « And Gueuseum » avait annoncé la couleur à l’opinion publique de boycotter la campagne de vaccination si des négociations n’étaient pas entamées. Personne n’a bougé jusqu’à l’expiration, comme si une certaine léthargie s’était saisie de notre esprit et l’a enveloppé d’un voile qui l’aurait empêché de comprendre les enjeux et de pouvoir agir.
La vaccination en tant que moyen de prévention de maladies infantiles mortelles n’est plus à démontrer. Ella a permis de sauver des vies, de réduire la mortalité et la morbidité infantile liée à certaines maladies telles que : la diphtérie, la coqueluche, la rougeole, la poliomyélite, le tétanos. Etc Cependant, il faut distinguer la vaccination de routine des campagnes de vaccination de masse des enfants organisées périodiquement par le ministère de la Santé et de l’Action sociale (MSAS) avec l’appui de ses partenaires techniques.
Dans tous les deux cas de figure de la vaccination, le prestataire joue un rôle importantisme. Le gouvernement ne peut pas ignorer cela. Et en plus du boycott de la vaccination, il y a la rétention des données qui sont l’oxygène du système de sante sans lesquelles il meurt.
Les conséquences sur le plan sanitaire ainsi que sur celui de l’émotion sont incalculables. Déjà diminués, les patients qui ne savent pas où ils vont donner de la tête du fait de la grève sont blessés et désemparés. Cela dit, y a-t-il de raisons valables d’attendre que « And Gueuseum » aille plus loin, c’est-à-dire paralyser totalement le système de santé pour que le gouvernement daigne vouloir négocier ?
Au fait, plus le temps passe, plus les positions se radicalisent en allant crescendo au détriment de la santé des populations. Ainsi, dans le cadre du dialogue préventif, on peut dire que le gouvernement a déjà perdu beaucoup de temps pour négocier. Car les négociations sont inévitables. Pour autant, pourquoi ne pas le faire maintenant ? Pourquoi accepter volontairement de perdre du temps quand on sait pertinemment que ce rapport de force se terminera autour d’une table de négociation ?
Si le gouvernement ne change pas d’attitude, ce qui est sûr « And Gueuseum » continuera à exercer son droit à la grève dans les limites fixées par la loi, jusqu’à la table de négociation, pour sauvegarder sa crédibilité auprès de ses membres et sa survie.
Laconiquement, ce que la coalition des syndicats de santé revendique, c’est simple. C’est une augmentation du régime indemnitaire des paramédicaux au même titre que les médecins avec qui ils partagent le système de santé, les enseignants et les travailleurs non magistrats du secteur de la justice. Ils ne demandent pas un alignement de leur indemnité à celle des médecins. Donc, sans risque de se tromper, on peut dire que leur revendication est légitime d’autant plus qu’en dehors du fait qu’ils ont droit à une augmentation, ils sont, de droit et de fait les moins nantis du système de santé en termes de revenus par rapport aux médecins.
Toutes les mesures visant à creuser davantage les inégalités sociales contre lesquelles le Président Macky Sall, théoriquement s’était érigé et s’érige encore, n’ont pas le droit de cité. Cependant, il semble que, les médecins ont un droit (un droit non lié à leur statut et grade), que les paramédicaux, n’ont pas. Cette situation de fait regrettable, participe à exacerber les différences, à créer des frustrations et à dresser les membres d’une même famille (celle de la santé), les uns contre les autres.
Et pourtant, les paramédicaux, eux aussi, ont le droit non seulement de revendiquer une augmentation de leur régime indemnitaire mais ils ont le droit légitime à une augmention de leur régime indemnitaire comme les enseignants, les médecins et les travailleurs non magistrats du secteur de la justice. Car, le droit à un bien être qu’on est capable d’atteindre est légitime ainsi que le droit d’avoir plus de biens que l’on a.
Historiquement et socialement, le Sénégal est un pays de dialogue. On a surmonté beaucoup d’épreuves communes et individuelles grâce à notre génie social et politique mais aussi, grâce à notre sens élevé du dialogue pour la paix sociale.
Aujourd’hui (au moment j’écris ce papier) ce qui semble incompréhensible et suscite des interrogations légitimes, c’est l’inaction et le silence que le gouvernement a opposé à l’appel répété 15 fois de « And Gueuseum » pour des négociations sur le régime indemnitaire des paramédicaux. Le problème, c’est pourquoi le gouvernement refuse-t-il apparemment d’engager les négociations ? Le problème, c’est pourquoi, ne prend-il pas la main qui lui est tendue alors qu’il sait, sans illusion possible que ce rapport de force va finir tôt ou tard autour d’une table de négociation ?
Négocier maintenant, non pas demain, hic et nunc, pour épargner aux populations de souffrances évitables. La plus belle femme du monde ne peut donner que ce qu’elle a.
Le président Macky Sall ne peut pas prendre la main tendue de « And Gueuseum » en lieu et place du gouvernement, sinon, il participerait sans le vouloir à créer les conditions qui transformeraient sa fonction en un mur de lamentations, non seulement pour les organisations syndicales, mais aussi pour les populations.