Le président sortant, Macky Sall, a été investi le samedi 1 décembre par la coalition Benno Bokk Yaakaar comme candidat à l’élection présidentielle du 24 février 2019. Félicitations !
A cette occasion, des chefs d’États de la sous-région, des personnalités de l’internationale libérale, entre autres amis et alliés, ont rehaussé de leur présence cette manifestation initiale entrant dans le cadre de la course vers la présidence de la République. L’événement s’est tenu à Diamniadio dans la salle du Dakar Aréna nouvellement inaugurée et… fermée depuis.
A l’intérieur de la salle, la fête fût certainement belle. En dépit de la nuée de pickpockets qui a sévit, même et jusque dans des poches ministérielles. Les goujats ! Téléphones portables et sommes d’argent importantes, selon la presse, ont changé de propriétaires…illicitement. Voilà ce que cela rapporte que d’inviter, sans distinction, des foules de « militants » à grands renforts de Ndiaga Ndiaye…
Mais là n’est pas le sujet de ce papier :
Je devais me rendre à Thiès ce jour-là… Ce qui m’a valu de tomber sur l’indescriptible envers du décor : plus de 20 kilomètres de bouchons…payants. Qui plus est. Incroyable ! En effet, pour « faciliter » les paiements de cette torture, la société concessionnaire de l’autoroute a même instauré un système de tickets pour accélérer la perception de son dû… Sans fluidifier la circulation pour autant. Les malins… Payer sans rouler n’est pourtant pas la vocation d’une autoroute à péage ! Et il va falloir se poser sérieusement quelques questions qui fâchent :
Si, pour bloquer la circulation au point de faire rater leur vol à plusieurs passagers se rendant au nouvel aéroport Blaise Diagne, il suffit juste d’un gros événement au Dakar Aréna de Diamniadio, il y a de gros soucis à se faire. A un point tel que, des personnes voulant se rendre à Kaolack pour prendre part à un enterrement prévu à 17h ont dû rebrousser chemin après avoir passé 4h25 entre Dakar et Diamniadio… Quels autres milliers de dommages collatéraux ont pu ainsi être causés à l’occasion ? Pendant ce temps, et de temps à autre, pour libérer le passage à une personnalité et son escorte, on nous comprimait sur un côté, avec le sourire cependant, des gendarmes en mission.
Imaginons alors, un seul instant, qu’un grand combat de lutte se tienne à l’Arène nationale à Pikine (nouvellement inaugurée et… fermée), la première sortie du péage serait bloquée. Et qu’un autre événement d’envergure se tienne à Diamniadio, que ce soit à Dakar Aréna ou au Centre Abdou Diouf. L’Aéroport Blaise Diagne serait-il inaccessible pendant des heures ? Dakar et sa banlieue seraient-elles paralysées ? Gouverner, c’est prévoir…
Au demeurant est-il raisonnable, dans ces conditions, de transférer autant de ministères en plus du nouveau Parc Industriel à Diamniadio ? Si près de Dakar ? Une ville nouvelle ayant pour vocation de tourner le Sénégal vers l’avenir en réduisant la macrocéphalie de Dakar ne pouvait-elle pas trouver un autre site ? Toutes les mesures d’accompagnement pour encadrer l’envol de l’AIBD et le succès du Parc Industriel envisagent-ils les contraintes liées au fait que l’autoroute à péage est presque obsolète au vu de la pression qui s’y exerce ?
Alors oui, nous espérons que lorsque le prolongement de la VDN deviendra une réalité, la tension actuelle sur l’autoroute à péage diminuera. Mais il faudrait en même temps penser à réhabiliter l’ancienne route nationale passant par Rufisque. Penser à élargir la route Dakar Thiès. Après tout, peut-être que tous ces projets existent mais ont souffert de l’ordre des priorités en faveur du TER…Ah Si on nous avait demandé notre avis !
L’autre plaie révélée par nos heures de stationnement sur l’autoroute, c’est le comportement des militants et militantes de Benno Bokk Yaakaar sur la voie publique. A l’image, d’ailleurs de celui de plusieurs de nos compatriotes : Fatiguées d’attendre dans les cars bondés les transportant vers Dakar Aréna, des femmes drapées dans des boubous flambants neufs à l’effigie de leur champion, n’ont pas hésité à descendre des voitures, en plein milieu de la route, pour enjamber le muret séparant les deux voies de l’autoroute et ainsi, rallier Dakar Aréna en marchant à contre-courant des véhicules …
Je ne sais pas si vous voyez le topo ? En plus de cela, les vendeuses d’eau en sachet, semblent avoir été les seules à avoir fait de bonnes affaires. Sauf que les usagers les jettent après usage sur la chaussée en sus des autres détritus de restauration rapide. On pourrait les comprendre ces « militants » . Ils devaient être sur pied de guerre depuis l’aube…Des jeunes enfants, pas en âge de voter, mais qui ont pris part à cette excursion dominicale, se détendaient les jambes en courant entre les véhicules ou bien assis sur le muret. Au milieu de l’autoroute. Insouciants.
Trois heures de temps à observer ces clichés du Sénégal réel et sachant, d’expérience, le comment et le pourquoi de ce genre de « mobilisations », je me demande s’il ne faudrait pas inscrire à l’agenda du « dialogue national », dont personne ne parle plus d’ailleurs, la suppression de ces tragi-comédies dispendieuses… Faire foule de tout bois est inutile et mensonger : Depuis le dernier grand meeting socialiste en l’an 2000 au dernier grand rassemblement libéral version Wade 2012, nous savons tous que les foules ad hoc ne veulent rien dire… M’enfin, on se rassure comme on peut !
Pendant ce temps, et à l’intérieur de la salle, la cérémonie battait son plein. Les discours convenus se suivent et se ressemblent. On chante les infrastructures qui poussent comme des champignons… vénéneux pour nous usagers bloqués depuis des heures. Sans aucun choix de repli ni d’exfiltration. Ce qui pose des questions de sécurité publique et de protection civile majeures. Peut-on en débattre sereinement, et surtout donner la parole aussi à des hommes de l’art afin qu’ils nous éclairent sur les voies et les moyens de mettre l’avenir de ce pays en orbite ? Hors des clivages politiciens fragiles et factices ?
Car nous suivions la cérémonie en direct de nos téléphones portables ! Pour comprendre pourquoi nous devions subir un tel calvaire et aussi passer le temps. Ce faisant, nous avons constaté une bizarrerie : des pans entiers des gradins aux fauteuils rouges étaient vides alors même que des milliers de militants traînaient à l’extérieur… un problème manifeste d’organisation. A tout le moins. Cela a pour effet que des vidéos circulent sur les réseaux sociaux pour railler la salle archi…vide. Pour cette fois, j’atteste qu’il y avait foule…à l’extérieur ! Autre bizarrerie, le discours du candidat-président était en français… Pour un pays à moins de 30% francophone. A moins que la cible fût ailleurs…
Tout cela pour dire que les infrastructures doivent répondre à une vision globalisante ! Elles doivent servir une ambition collective partagée. Elles doivent suivre un ordre de priorités à déterminer selon des séquences à modéliser. Avant validation. Manifestement, beaucoup d’édifices sortent de terre. Cela suffit-il pour l’émergence ? Je pose cette question de manière abrupte, car il me semble que nos gouvernants sortent du sujet. Leur dire cela à la veille de la campagne présidentielle va les agacer. Certains vont encore me faire la fête dans des commentaires rageurs auxquels on a fini par s’habituer. Cela ne changera rien à la réalité telle que des milliers de sénégalais l’ont vécue hier sur l’autoroute à péage.
Imaginez qu’un institut de sondage qui se serait amusé à mesurer les indices de satisfaction et les intentions de vote entre Dakar et Diamniadio hier entre 11h et 18h donne les résultats aujourd’hui. Imaginez seulement…O stratèges de campagne !
Allons rekk .