Les chefs d’Etat ivoirien, libérien, mauritanien et gambien ont pris part, le 1er décembre, à l’investiture du candidat de Benno Bokk Yakaar, Macky Sall. Une ingérence coupable dans les affaires sénégalo-sénégalaises, qui risque d’impacter la transparence du scrutin présidentiel de février 2019 de la diaspora, dans leur pays.
Le candidat Macky Sall et ses alliés ont de bonnes raisons de jubiler, après avoir réussi le coup du siècle, de mobiliser – pour une investiture à la candidature – des chefs d’Etat de pays frères. Les présidents Alassane Ouattara de Côte-d’Ivoire, Mohamed Ould Abdel Aziz de la Mauritanie, George Weah, du Libéria et Adama Barrow de la Gambie, ont honoré de leur présence, le 1 er décembre 2018, la grande messe de la coalition Benno Bokk Yakaar (BBY) qui a choisi le président sortant, Macky Sall, comme son candidat pour le scrutin du 24 février 2019.
La présence de chefs d’Etat à l’investiture d’un candidat à la présidentielle, est un fait inédit dans les annales de l’histoire politique du Sénégal, voire de l’Afrique.
Mais au-delà du désordre qu’elle crée sur le grand boulevard de la présidentielle et le trouble générée dans la tête des électeurs encore hésitants, cette présence est une ingérence dans les affaires sénégalo-sénégalaises. Les présidents Ouattara et Abdel Aziz ont donné des consignes de vote enveloppées dans un discours qui épouse les contours du politiquement correct, mais dont le message a le mérite d’être clair.
Quand le premier des Ivoiriens se met à dire : « moi, j’ai un deuxième mandat : Abdel Aziz aussi… », c’est une façon d’inciter les Sénégalais à élire, une seconde fois, Macky Sall. Sans compter tout le bien qu’ils ont dit de leur collègue au sein du syndicat des chefs d’Etat.
L’acte posé est gravissime, d’autant qu’en prenant la parole ici à Dakar, ces chefs d’Etat influencent le vote des Sénégalais de la diaspora se trouvant dans les pays dont ils ont la gestion (Côte-d’Ivoire, Mauritanie, Libéria et Gambie). De tels souteneurs, peuvent-ils créer les conditions qui garantissent la transparence du scrutin chez eux ?
Ils n’ont pas mesuré la portée de leur acte et cela renseigne, peut-être, sur leur rapport au pouvoir. En agissant de la sorte, ces chefs d’Etat enlèvent au peuple sénégalais sa souveraineté et sa capacité à faire des choix judicieux. Non, messieurs les présidents, si le peuple décide, en 2019, que c’est Macky, c’est Macky ! Mais s’il porte son choix sur un autre, diantre, qu’on lui laisse ce droit…même celui de se tromper.
Le Sénégal ne saurait accepter des injonctions venues d’ailleurs. Excellences, nous vous invitons à méditer cet enseignement plein de sens de Bouddha : « Ne blesse pas les autres par des moyens que tu trouverais toi-même blessants » (560 -480 avant JC).