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Notre Ter Sur Notre Terre

Notre Ter Sur Notre Terre

J’ai frémi de contentement ce 14 Janvier 2019 en entendant ce sifflement satisfactoire du TER, version moderne des trains jadis nommés fièrement Arigoni et Express, entrant en gare à Dakar. Comprenez-moi, je suis fils et petit-fils de cheminots et j’ai passé la totalité de mon enfance, puis mon adolescence autour de cette chère gare de Dakar, à proximité des rails et de tant de héros du chemin de fer. Je parle au nom de toutes ces générations de familles de cheminots, dont l’anéantissement de ce trésor national, qui était la fierté et le pouls traditionnel de toutes les villes et contrées à vocation ferroviaire, a plongé dans une mélancolie insondable depuis.

J’ai souvent vu ma mère comme toutes les autres femmes des quartiers du Plateau à Ouakam, de celles de la Médina, de Colobane, de Hann à Pikine, guetter le sifflement du train pour se presser aussitôt entendu vers sa marmite sur le feu, ajuster les phases terminales du déjeuner en cuisson. Le chemin de fer c’était aussi le Dépôt – ces hauts hangars, lieu de préparation et de réparation des trains où travaillaient quotidiennement 24/24h des dizaines d’ouvriers, au rythme d’une sirène qui servait de repère à toute la ville de Dakar depuis les années 30. A Saint-Louis, une autre ville ferroviaire jadis capitale, les femmes attendaient l’arrivée du train de 13 heures en provenance de Dakar pour servir le déjeuner. C’est en cela que le chemin de fer est partie de notre patrimoine traditionnel, il reflète notre identité et balise notre cheminement. Tout cela laisse entrevoir également un aspect de la ponctualité de jadis au travail, bonnes habitudes que l’on a perdu avec la disparition du chemin de fer. C’est dire combien la vision du président Macky et son audace de s’engager dans un délai record à la réhabilitation de ce chemin de fer sont pertinents. De surcroît la restauration et la modernisation des gares de Rufisque et de Dakar, tout en préservant leur caractère pittoresque que touristes et résidents futurs de ces villes auront à apprécier infiniment, est d’ores et déjà un acquis culturel fondateur de cités à la fois modernes et typiques.

Imaginez seulement à Dakar, que le corridor qui va de la gare au palais de la République, devienne une promenade des princes, bordée de plantes et balisée de cinq bâtiments magnifiques (la gare, l’hôtel de ville, la chambre de commerce, le ministère des Affaires étrangères, le palais de la République), une fois que l’on aura donné à notre place de l’Indépendance et hôtel de ville la restauration et les soins qui leur siéent. Dakar serait comblée et le Plateau réhabilité dans sa dignité. Juste ça et de la discipline surveillée comme du lait sur le feu à l’intérieur de ce corridor, pour assurer la salubrité, la sécurité et la sérénité du promeneur et la destination Sénégal se vendrait aisément.

Pour l’instant nous du Plateau, pouvons nous réjouir de revoir cette horloge qui tout-petits quand nous étions sur le chemin de l’école nous indiquait l’heure, se remettre à marcher après tant d’années d’arrêt. Nous en sommes ravis.

L’on avait un problème avec la disparition inconséquente du chemin de fer, le président Macky l’a résolu de la plus belle manière. Et en l’inaugurant le hasard a voulu que deux importantes questions politiques de notre société y trouvent leurs réponses, de la façon la plus éloquente – la spontanéité.

La première est la coïncidence entre l’arrivée de l’ex-première dame Viviane Wade à Dakar et l’inauguration de ces magnifiques ouvrages à peine a-t-elle mis les pieds dans le pays. Figurez-vous cette arrivée supposée redoutée par le pouvoir, tant attendue par les supporters, maintes fois renvoyées, vint à se passer à quelques heures près du démarrage d’une séance inaugurale déterminante dans la refondation politico-économique menée avec succès et au bonheur des populations par le président actuel, dans son temps de l’action. Et de facto cette arrivée est totalement éclipsée. Tous les regards étaient tournés vers le futur. A vrai dire, la population et les média ne s’y sont pas trompés. Il faut savoir lire la mécanique des événements importants d’une société, parce que derrière leur enchainement qui parait insignifiant, se cache souvent un engrenage irréversible qui ne peut être ignoré d’un analyste. Les populations ont définitivement tourné la page Wade, elles refusent d’ancrer ce pays dans le passé ; les tristes barouds d’honneur entretenus çà et là n’amèneront à leurs protagonistes que désillusions ruineuses.

L’autre réponse est celle de la question de la soi-disant discrimination des marchés en faveur de sociétés étrangères au détriment des entreprises locales, souvent invoquées comme prétexte pour dénigrer des exploits évidents dans la maîtrise d’ouvrage. La cinglante réponse vient du représentant des entreprises locales qui ont collaboré dans ce chantier, monsieur Oumar Sow PDG de la CSE. Qui en Afrique de l’Ouest ne connait pas la CSE, fleuron des entreprises de génie civil de notre pays qui a réalisé de nombreux grands projets dans la sous-région ; donc une des plus qualifiées en la matière ? Ce monsieur dit dans un discours concis mais combien éloquent :  » Je suis entrepreneur je ne sais pas parler en public, donc je serai bref : …j’ai été très honoré et privilégié de participer à un tel chantier où je me félicite d’avoir appris beaucoup auprès des entreprises étrangères que j’ai eu à côtoyer et me réjouis de pouvoir désormais soumissionner grâce à cette collaboration à tous projets similaires dans la sous-région« .

Qui mieux que lui pouvait donner un témoignage aussi éloquent et sincère, qui met à nu la démagogie et le populisme dont une bonne partie de l’opposition et la société civile font usage à dessein.

Qui ne peut pas voir aujourd’hui, au rythme où l’autoroute à péage est empruntée par les automobilistes causant trop souvent des embouteillages, ce qu’aurait malheureusement été le trafic entre la banlieue et la capitale, voire la sortie de Dakar, si cette voie n’avait pas été créée en son temps. Qu’est-ce qu’on n’avait pas dit au moment du chantier et même aujourd’hui, rien n’a été oublié du lexique de dénigrement. Et pourtant !

C’est la même chose que l’on vit avec ce TER, d’une pertinence indiscutable. Il faut accepter et se rendre à l’évidence, que l’on ne peut pas satisfaire à la fois tout le monde. Bon vent au chemin de fer et encore merci au président de la République, merci à tous ceux qui ont contribué à réaliser ces ouvrages historiques.

iniang@seneplus.com







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