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Lettre Ouverte Au Premier PrÉsident De La Cour SuprÊme

Lettre Ouverte Au Premier PrÉsident De La Cour SuprÊme

A chaque échéance présidentielle, le débat sur les questions afférentes à la justice réapparaît, et dans ces moments-là on assiste à une prédominance d’analyses plus ou moins objectives et sincères. La justice étant rendue au nom du peuple sénégalais, par conséquent tous les citoyens sont en droit de savoir ce que font leurs juges et pourquoi, puis de donner leur avis sur la qualité du travail accompli. Et c’est dans ce cadre-là, monsieur le premier Président de la Cour Suprême, que nous nous adressons humblement à vous. Excusez-nous si vous trouvez dans les propos suivants impertinents qui s’échappent d’un justiciable insignifiant l’once d’un mot qui pourrait s’apparenter à une attaque en règle contre la justice, notre justice.

Lors de la rentrée solennelle des cours et tribunaux de cette année, vous avez prononcé dans votre mercuriale cette phrase lapidaire : « Les magistrats sauront résister à toute pression et intimidation d’où qu’elles viennent » qui me renvoie au Principe I du Guide pour les magistrats de la Belgique qui dit : « Les magistrats exercent leurs fonctions juridictionnelles en toute indépendance, à l’abri des influences extérieures. Cette indépendance les conduit à appliquer le droit, au vu des éléments du dossier particulier, sans céder à la crainte de déplaire ni au désir de plaire à toute forme de pouvoir (que ce soit le pouvoir exécutif, législatif, politique, hiérarchique, des intérêts économiques, les médias ou l’opinion publique). Le magistrat se doit également de veiller, dans ses fonctions juridictionnelles, à rester indépendant, y compris à l’égard de ses collègues et de groupes de pression en tous genres ».

En effet, les magistrats surtout les juges ne doivent subir des pressions ni des politiques, ni des lobbies, ni de l’opinion publique, ni des médias. Ils doivent ainsi être équidistants et impartiaux. Pour autant, chaque magistrat est avant tout un membre de la société, donc un citoyen ayant des convictions politiques personnelles. Mais son devoir est de tout faire pour que ses convictions personnelles ne déteignent pas sur la bonne exécution de son action judiciaire. Mais permettez-nous, M. le Président, avant de donner notre opinion sur la pression itérative exercée sur les juges, de vous dire en tant que citoyen épris de justice et vouant un culte l’autorité judiciaire, nous avons toujours suivi depuis les années 80 avec intérêt cette audience solennelle de rentrée des Cours et Tribunaux, car les discours de donne facture qui y sont prononcés sont d’une importance et d’une beauté inégalables. Nous suivions religieusement avec nos transistors les discours d’usage qui sont prononcés lors cette auguste rencontre qui regroupe le gratin judiciaire et politique et notabilités coutumières et religieuses. Mais pour dire vrai, moi comme beaucoup d’autres Sénégalais, avons vu cet intérêt s’effilocher tant la justice telle que pratiquée depuis assez longtemps dans notre pays ne cadre pas avec nos impératifs et exigences démocratiques. Comme elle est loin cette image d’Epinal d’une Justice juste et équitable.

Dire que « les magistrats sauront résister contre toute pression et intimidation d’où qu’elles viennent » révèlent en réalité que des pressions et intimidations s’exercent sur les juges à cause du contexte électoral bouillonnant. Mais ces pressions ne datent pas d’aujourd’hui. Elles sont consubstantielles au pouvoir politique qui nomme Garde des Sceaux et magistrats et qui doit faire face à une opposition. En démocratie, le champ politique est divisé en deux entités : la majorité exécutive et l’opposition. Et les arbitres neutres légitimés à réguler le jeu politique sont les juges. Ils doivent en être les maitres prêts à sanctionner tout acte d’antijeu qui remettrait en cause ses principes fondamentaux. Malheureusement nous avons constaté depuis longtemps, que les règles du jeu ne sont favorables que pour le camp de celui qui gère la carrière et la nomination des magistrats. Alors la fameuse phrase de Solon, un des fondateurs de la démocratie athénienne, trouve au Sénégal toute son actualité et toute son acuité : « Les lois sont comme des toiles d’araignées, elles arrêtent les faibles et les petits, les puissants et les riches les brisent et passent au travers. »

Monsieur le Président, moi et plusieurs de mes compatriotes souffrons de voir ce Sénégal où, depuis le procès arbitraire de Mamadou Dia de 1963, la Justice roule à deux vitesses parce que subissant sans cesse des pressions de l’exécutif même si des magistrats valeureux et vertueux ont marqué ou continuent de marquer d’un sceau indélébile l’histoire de la magistrature sénégalaise grâce à leur indépendance et leur équidistance vis-à-vis des hommes politiques. Je m’en vais vous citer trois exemples de magistrats qui servent encore de parangon à une justice neutre et équitable. Isaac Forster, Premier président de la Cour suprême du Sénégal, lors de la rentrée des Cours et Tribunaux de 1960-1961, avait alerté le Président Senghor sur toute tentative de pression sur la justice en ces termes : « Nous refuserons de cautionner toute loi qui soit anticonstitutionnelle ».

En 1967, le procureur de la République Thiès Basile Senghor, neveu du président Senghor, avait refusé de présenter le meurtre du ministre de la Jeunesse et des Sports Demba Diop comme un acte prémédité tel que le lui enjoignait l’establishment socialiste. « Le Procureur de Thiès soutenait à l’endroit de ses supérieurs que l’acte dont était responsable Abdou Ndaffa Faye ne s’analysait pas en crime mais en coup ayant entrainé la mort sans intention de la donner. La résistance à la pression de hiérarchie lui valut d’être relevé de ses fonctions », j’ai cité Me Wagane Faye.

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Lors de la rentrée des cours et tribunaux de 1991-1992, le président de la Cour suprême d’alors, l’intrépide magistrat Assane Bassirou Diouf, avait martelé qu’« il n’y a avait en réalité de pouvoir judiciaire et que le seul pouvoir, c’était l’exécutif qui a reçu l’onction populaire ». La même année quand on lui a demandé ce qu’il ferait en cas de défaite d’Abdou Diouf à l’élection présidentielle, le très charismatique Président de la Cour suprême répondit sans circonlocutions : « Je proclamerai les résultats favorables à son concurrent. » Le magistrat Assane Bassirou montrait par là sa résistance à toute velléité de pression en cas de défaite du Président Diouf à la présidentielle de 2013. Mais la Cour suprême fut supprimée après cette rentrée des Cours et Tribunaux et son désormais ex-président exilé du pays comme ambassadeur.

Ces valeureux magistrats susnommés ont su faire leur cette pensée de Jean Jaurès qui dit que « le courage, c’est de ne pas livrer sa volonté au hasard des pressions, des impressions et des forces ; le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire».

M. le Président, force est de constater malheureusement, dans notre République, l’existence d’une justice pour chaque chef d’Etat et une autre pour ses opposants. On donne systématiquement raison à sa Majesté, on l’encense, on l’auréole de tous les qualificatifs mélioratifs. Quant aux opposants, ils perdent pour la plupart dans nos cours et tribunaux, ils ont tous les torts parce qu’ils n’ont pas de magistrats. Ils n’ont presque jamais raison devant un juge, même lorsqu’ils ont raison, parce qu’ils n’ont aucun moyen de coercition. Pour beaucoup de Sénégalais, la justice est très clémente pour ceux qui bénéficient de la protection de l’exécutif mais ultra-expéditive pour ceux qui rament à contre-courant de la politique gouvernementale. Ainsi la justice se présente chez nous comme une autorité d’application soumise aux autorités de conception que sont les pouvoirs exécutif et législatif. Pourtant Dominique Rousseau, professeur à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, précise que « l’exécutif et le législatif sont des pouvoirs de l’État, la justice est un pouvoir de la société. Cette justice n’est pas une autorité d’application chargée de faire passer la politique de l’État via ses jugements ». Son rôle primordial est alors de protéger les citoyens contre les abus des gouvernements, et non de relayer leur politique.

Mais depuis l’arrestation programmée dans l’agenda présidentiel de Karim Wade et de Khalifa Sall, nous n’avons vu pareil acharnement juridique contre les hommes politiques de l’opposition ou contre des citoyens qui ne partagent les mêmes schémas de pensée avec le pouvoir régnant. Nous nous sommes rendu compte que la boussole de la justice ne s’oriente que du côté de l’opposition. Les escrocs, les corrupteurs, les corrompus, les détourneurs de deniers publics, les prévaricateurs, les concussionnaires, les blanchisseurs d’argent sale, les auteurs de faux et usages de faux, les enrichis illicitement, les démons ne se trouvent ou se retrouvent que dans la « pègre » oppositionnelle. On retrouve les vertueux, ceux qui préfèrent la patrie au parti, les mains immaculées, les anges dans la « maison de verre » du pouvoir. Pourtant du côté de ces soi-disant vertueux, on y retrouve moult directeurs généraux, PCA, ministres épinglés par des rapports de corps de contrôle. Mais jamais, ils n’ont été convoqués par le procureur de la République, ne serait-ce que pour les entendre sur le contenu de ces rapports qui les éclaboussent. Au contraire, la camarilla présidentielle n’hésite pas à foudroyer tout élément d’un corps de contrôle ou tout magistrat qui aurait le toupet d’interroger un collaborateur du chef de l’Etat.

N’a-t-on pas vu un ministre de la République traiter les vaillants magistrats de la Cour des comptes d’ectoplasmes avant de qualifier leur majestueuse institution de Cour de règlement de comptes ?

N’a-t-on pas vu un responsable politique de l’APR dans le département de Mbour et Directeur des transports routiers au ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, être inculpé par le juge d’instruction du 1er cabinet sis au tribunal de grande instance de Louga pour complicité de concussion, complicité de corruption et recel et placé sous mandat de dépôt le 31 mars 2016 et être libéré provisoirement sur intervention de bras politiques haut placés le 07 avril 2016 avant d’être nommé président du Conseil d’administration du Fonds d’entretien routier autonome du Sénégal (Fera) par décret présidentiel n°2016-985 le 13 juillet 2016 ?

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N’a-t-on pas vu dans l’affaire des élèves-maîtres, 40 godillots adopter un projet de résolution de soutien au ministre de l’Education nationale Serigne Mbaye Thiam ignorant du coup l’arrêt de la Cour suprême qui avait annulé l’arrêté du ministère de l’Education nationale excluant les 690 élèves-maitres de la formation dans les Centres régionaux de formation du personnel enseignant (CRFPE) ?

N’a-t-on pas entendu, en novembre 2010, le Président Abdoulaye Wade dire, à l’occasion du 53e congrès de l’Union internationale des magistrats (UIM) à Dakar que « les juges ne veulent pas s’affranchir de la tutelle de l’exécutif. On peut tout faire pour que le magistrat soit indépendant mais, psychologiquement, les magistrats ne veulent pas être indépendants, c’est comme des esclaves. On les libère, ils font 200 mètres et ils reviennent pour dire: je ne sais où aller». Ces propos qui nous ont tant formalisé semblent avoir laissé de marbre les magistrats du Sénégal. Aucun membre de la famille judiciaire n’a élevé la voix pour s’offusquer de cette avanie gravissime ! Certains de vos collègues heurtés ont préféré moufter dans le confort douillet de leur bureau. Toutefois, nous aurions aimé que les figures de proue du pouvoir judiciaire élevassent la voix pour marquer leur indignation devant ce manque de considération vis-à-vis de la justice.

Quand le Président François Hollande parlant de la justice française avait déclaré dans un livre que « cette institution est une institution de lâcheté… Parce que tous ces procureurs, tous ces hauts magistrats se planquent et jouent les vertueux… », Bertrand Louvel et Jean-Claude Marin, les deux plus hauts magistrats de l’ordre judiciaire en France (le premier président et le second procureur général près de la Cour de cassation) se sont immédiatement invités à l’Elysée. Et l’Union syndicale des magistrats a demandé que « les propos sur la lâcheté de l’institution judiciaire soient infirmés ou retirés ». Sous le feu des critiques, le Président français dans une lettre datée du 14 octobre 2016 et envoyée au Conseil supérieur de la magistrature, avoue « regretter profondément ses déclarations qui sont sans rapport avec la réalité de sa pensée ».  

Combien de magistrats probes et propres dont les décisions ne plaisent pas ont été dessaisis de certains dossiers ou affectés arbitrairement par le Garde des Sceaux, chef suprême des Procureurs, sans aucune réaction de la famille judiciaire ? L’affectation récente du Procureur de la République Mbour, Alioune Sarr, à la Cour d’Appel de Saint-Louis comme avocat général sonne comme une sanction punitive. Pour avoir résisté aux pressions des hommes politiques proches du pouvoir, pour avoir fait librement et impartialement son travail, pour avoir fait arrêter des militants du parti au pouvoir et des parents d’hommes et de femmes politiques « apéristes » pour vol de documents administratifs, le rigoureux et très professionnel procureur de Mbour quitte la Petite Côte dix mois seulement après sa prise de fonction. Aucune voix autorisée de la hiérarchie judiciaire n’a réagi contre cette décision abusive du ministre de la Justice.

Aujourd’hui, vous dites que vous ferez face à toute pression et intimidation. Pourtant ces manques de considération, tous ces pieds de nez faits à la justice sont une forme de pression à laquelle la famille judiciaire n’a jamais résisté. Comme dans tous les pays du monde, il apparait que les magistrats ne sont pas en effet à l’abri de toute pression dans leur fonctionnement quotidien, qu’elle émane de leur hiérarchie ou du pouvoir exécutif. Mais il leur incombe de résister à toute influence ou confluence, de ne jamais privilégier la consigne sur la conscience.  

Quand nous regardons l’élimination anti-démocratique de certains candidats à cette prochaine présidentielle sénégalaise, nous revivons l’atmosphère délétère qui a précédé la tempête post-électorale de 2010 et qui a débouché sur une boucherie mortifère en Côte d’Ivoire. L’alors président de la Cour suprême, Tia Koné, avait rendu l’arrêt N° E0001-2000 de la Chambre constitutionnelle de la Cour suprême disant que « le candidat Alassane Ouattara ne réunissait pas toutes les exigences légales pour être candidat à l’élection présidentielle 2000, et qu’en conséquence il importait de ne pas faire figurer ses nom et prénom sur la liste définitive des candidats à l’élection présidentielle du 22 octobre 2000 ». Un tel arrêt se fondait sur la base de l’article 35 de la Constitution ivoirienne du 23 juillet 2000 qui stipulait : « tout candidat à la présidentielle doit être ivoirien d’origine, né de père et de mère eux-mêmes ivoiriens d’origine…, il doit avoir résidé en Côte d’Ivoire de façon continue pendant cinq années précédant la date des élections et avoir totalisé dix ans de présence effective » est resté 13 ans pour reconnaitre que cette « disposition était inique et absurde ».

Profitant de l’installation du sous-préfet de Gbagbégouiné, le samedi 9 février 2013, dans le département de Biankouma située à environ 700 km au nord-ouest d’Abidjan, Tia Koné mélangeant excuses et regrets a déclaré sans vergogne ceci : « Il n’était point question dans cette pathétique entente de rejeter ipso facto de nos rangs un fils du pays, un ancien Directeur général adjoint du FMI, pouvant de toute évidence, être cet artisan du regain de notre dignité et de notre grandeur nationale en perdition. (…) J’affirme qu’il n’a jamais été dit dans l’arrêt du 6 octobre 2000 que M. Alassane Ouattara n’est pas Ivoirien. Cet arrêt à notre grand regret, a causé un tort au concerné, à sa famille et à bien des Ivoiriens. Je m’excuse devant la nation entière. Aujourd’hui, la preuve est faite que le Président de la République est un Ivoirien qui a un profond amour pour sa patrie et qui engage en ce moment même notre pays sur de nombreux chantiers de développement en vue de faire de la Côte d’Ivoire, une nation de Paix et de prospérité ». Mais cette déclaration lâche intervient tardivement après que des dizaines d’Ivoiriens pro-Ouattara, contestant la légitimité du Président Gbagbo nouvellement élu, eurent trouvé la mort dans des conditions atroces. Dans la même foulée, le président du Conseil constitutionnel ivoirien, Paul Yao Ndré a déclaré le 3 décembre 2010 Laurent Gbagbo vainqueur de la présidentielle de 2010 avant de se rétracter cinq mois plus tard. Mais au prix de plus de 3 000 morts.

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Si j’ai fait ce petit rappel dramatique M. le Président, c’est pour vous dire que certaines décisions de justice dictées par les pressions de l’exécutif fortement contestées par les populations finissent par se muer avec le temps en vérités irréfragables mais accompagnées souvent d’une kyrielle d’événements tragiques qui peuvent plonger le Sénégal dans une longue période dantesque. Aujourd’hui le parrainage, l’article 57 modifié visant uniquement Karim Wade ont été attaqués par les membres de l’opposition. Mais tous les Sénégalais savaient a priori que jamais le Conseil constitutionnel ne remettrait en cause ces tripatouillages du code électoral par les députés de sa Majesté. L’on ne compte pas le nombre de recours rejetés par les « Sages ». Il en est de même pour les pourvois introduits par l’opposition au niveau de la Cour suprême. Aujourd’hui, il est malheureux de constater que, par la seule volonté du chef de l’Etat, 22 candidats ont été écartés de la présidentielle à cause d’une loi taillée sur mesure pour éliminer des adversaires politiques redoutables. Pourtant en matière électorale, la règle démocratique, c’est l’inclusion et l’exception c’est l’exclusion. Aujourd’hui, il est indubitable que bon nombre de Sénégalais se sont mithridatisés contre plusieurs décisions de justice derrière lesquelles ils subodorent toujours la main pressante et contraignante de l’exécutif.  Sur la base de cela, nous ne dirons pas comme l’actuel ministre de la Justice qui déclarait en janvier 2012 que « le Conseil constitutionnel sénégalais est comme la Tour de Pise qui se penche toujours du côté du pouvoir » mais les membres de cette institution juridico-politique nous donnent l’impression que jamais l’opposition ne peut avoir raison devant les régimes en place. Je ne dirai pas non plus comme l’ex-Garde des Sceaux français Robert Badinter, parlant de la justice de son pays, que la nôtre « est proche du dépôt de bilan » parce que je suis béatement optimiste de voir un jour notre justice être citée en exemple dans plusieurs démocraties. Mais la justice se doit toujours de transcender les contingences partisanes. Elle est intemporelle et impersonnelle. Il ne serait pas surprenant que le parrainage, adopté aujourd’hui comme une loi salvatrice rationnalisante, soit déclarée, dès changement du régime, scélérate et inconstitutionnelle avec toutes les autres modifications afférentes.

Pour conclure cette lettre dont nous nous excusons de la prolixité sachant que vos charges républicaines ne vous donnent pas assez de temps pour lire la contribution ennuyante d’un citoyen lambda, nous allons évoquer le Procureur général français Denis Jacomet qui, appréhendé par les militaires allemands le 6 mars 1915, déclarait aux forces ennemies : « Ma conscience ne me reproche rien ; si je dois être exécuté, je saurais mourir la tête haute, en véritable magistrat français ». Un véritable brevet de courage et de civisme face aux pressions qui doit inspirer tout homme de justice.

Tout en vous remerciant de toute l’attention que vous voudrez bien accorder à cette si lettre, nous vous prions de croire, Monsieur le premier Président de la Cour suprême, en notre plus haute considération.

sgueye@seneplus.com







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