C’est une première dans l’histoire du Sénégal contemporain ! L’élection présidentielle du 24 février 2019 se tiendra sans la gauche ! Les voix de la gauche sont neutralisées et totalement absentes des débats publics.
Cette situation inédite est la conséquence de manœuvres politiciennes et de l’instrumentalisation de la justice par le président candidat à sa réélection, Macky Sall. Les directions des partis de gauche (PIT-Sénégal, LD, etc.) accompagnent le régime dans sa dérive autoritaire, rompant ainsi avec une longue tradition de résistances aux politiques néocoloniales et néolibérales et de lutte pour les conquêtes démocratiques. Elles sont dans le gouvernement de Macky Sall et comptent y rester. Que le pouvoir incarne à la caricature la Françafrique ne retient pas leur attention. Elles font le pari que la manipulation du fichier électoral, la distribution sélective des cartes d’électeur aux Sénégalais permettront de sauver la mise à un président rejeté par les forces vives de la nation. Le président candidat a été élu en 2012 en ralliant à sa cause les partis de gauche sur la promesse d’instaurer « une gestion sobre et vertueuse » dans les affaires de l’État, d’appliquer les conclusions des assises nationales qui ont rassemblé, au-delà des partis, les secteurs les plus représentatifs de la société sur la base d’un diagnostic complet de la situation du pays depuis son indépendance en 1960. À l’épreuve du pouvoir, ces promesses se sont révélées fallacieuses. En avril 2018, il portait le coup de grâce à la démocratie sénégalaise en faisant voter, sans débats, par des députés godillots une loi dite de « parrainage citoyen », dans le but d’éliminer plusieurs de ses adversaires, candidats aux prochaines présidentielles, d’affaiblir les partis politiques et de faire le lit de la ploutocratie.
Les apparatchiks de la gauche sénégalaise alliés à Macky Sall présentent sa politique économique et sociale comme répondant à une volonté de lutter contre les inégalités et d’instaurer un régime d’équité et de justice sociale. La réalité est bien loin de tout cela. La propagande officielle complaisamment relayée par les institutions financières internationales présente une situation macroéconomique reluisante. Cette prétendue croissance, fruit d’artifices comptables et de mensonges d’État, ne se traduit pas par une amélioration des finances publiques. Pour preuve, l’État étrangle le peu d’entreprises nationales en étant incapable d’honorer ses dettes, du fait de fortes tensions de trésorerie. La pauvreté augmente comme en témoignent ces nombreux jeunes bravant la mort, dans les déserts et océans. Le programme de couverture maladie universelle, lancé à grand renfort de publicité en 2012, n’a pas atteint les objectifs fixés. Le régime a engagé le pays dans une politique d’endettement inconsidéré pour financer des projets de prestige sans aucun impact sur la structure de l’économie sénégalaise et l’emploi.
S’il est vrai que le pouvoir a vassalisé les appareils des partis de gauche, il n’a pas réussi à annihiler chez les militants et les démocrates la ferme volonté de travailler pour l’avènement d’une société démocratique et de justice. Ils sont nombreux les camarades qui, comme nous, ont choisi la lutte pour évincer Macky Sall du pouvoir et saisir le rendez-vous de l’histoire, ce 24 février 2019.
Félix Atchadé, Sette Diop et Mohamed L. Ly, membres du Parti de l’indépendance et du travail (PIT) du Sénégal