Au lendemain de la proclamation des résultats de l’élection présidentielle du 24 février dernier, le Président réélu et les candidats de l’Opposition, au-delà des contestations de principe et de quelques actes posés ici et là , dans une belle posture d’autorité, se sont emmurés dans un silence assourdissant. Le peuple souverain, pour sa part, garde silencieux un calme révélateur d’une profonde maturité. Toute la question est de savoir « qui, comment, quand, où » va parler, ce qu’il va dire et comment il sera entendu. Le destin du Sénégal, pour les cinq prochaines années semble reposer sur la portée discursive d’une parole attendue et qui se doit d’être libératrice et consolidante pour la Nation.
En s’imposant le silence, le président MackySall crée une situation de communication de modulation binaire (0-1) où l’élément absorbant (0) a une valeur durative plus dense. C’est le processus de l’introspection qui décode les signaux. Le président Macky écoute le peuple. Le peuple, à son tour, est à l’écoute. Le Sénégal retient son souffle. Les Candidats de l’Opposition, pour leur part, ont émis de courts signaux, puis se sont tus. Saluons, au passage, leur tempérance et leur sens de la mesure, leur grandeur d’âme et leur sens des responsabilités. L’atmosphère est pesante. Chaque parole, chaque acte posé, pourrait avoir des retentissements inattendus.
Quand le silence parle, la parole se tait. Mais la parole du silence est bruissante de signes qui nous invitent à une lecture plurielle.
La parole du silence ou le silence de la parole est une arme de distanciation, en même temps qu’un puissant exutoire. Quand les joies et les chagrins s’expriment par le silence, c’est le Sénégal qui gagne en maturité démocratique. Le peuple a compris. Les grandes émotions n’ont pas besoin d’un coup d’éclat pour s’exprimer efficacement. En refusant, par exemple, de féliciter le vainqueur, les candidats de l’Opposition n’ont fait que s’inscrire dans une tradition africaine jamais encore démentie. On a vu des Présidents sortants féliciter des Présidents entrants. Mais, pour autant que l’on s’en souvienne, on n’a pas encore vu en Afrique des candidats recalés féliciter un candidat réélu et c’est bien dommage pour l’image de notre continent. Nous venons là encore de rater une occasion unique de faire prévaloir l’exception sénégalaise.
On comprend dès lors l’amertume des uns et le silence d’une Autorité qui cherche les mots les plus justes pour redonner le sourire à son peuple et le remettre au travail, avec le soutien et l’accompagnement de tous les acteurs politiques et des communautés religieuses enfin réconciliés, dans le cadre d’une nouvelle dynamique de co-construction d’un Sénégal inclusif et prospère.
La non communication entre les acteurs politiques est une des aberrations de notre démocratie.
Le Président Macky SALL, dans une posture d’humilité et de grandeur, pourrait, par exemple, trouver les modalités d’un dialogue direct, franc et sincère avec ses adversaires, en leur rendant visite au besoin, pour une sortie de crise honorable pour toutes les parties.
L’opposition quant à elle devra répondre, le cas échéant, à toute main tendue du Président Macky SALL pour une réconciliation nationale dans l’intérêt bien compris du peuple qui en sera l’unique vainqueur.
Les communautés religieuses devront aussi jouer leur partition et leur rôle de régulateurs sociaux pour amener les parties prenantes à faire preuve de dépassement et à s’unir autour de l’essentiel : la sauvegarde des intérêts supérieurs de la Nation et la stabilité du pays.
Rompons enfin le silence pour user de cette faculté naturelle de se parler qui, comme le disait Philippe Sollers, dans l’Éloge de l’infini, requiert une grande intelligence, qui, sans fausse modestie, est loin de faire défaut au peuple sénégalais.
Je parle donc je suis !
Vive le Sénégal, vive la Paix et le Dialogue.
El Hadj ABDOU WADE dit Mara / Malick SONKO.
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