Fini le repos et la cogitation. Le président Macky Sall sera de retour au bercail ce lundi 25 mars, avec certainement dans ses valises, la conscience aigüe que sa réélection au 1er tour de la présidentielle avec une majorité confortable de 58, 26% lui offre l’opportunité historique d’installer enfin le pays sur les rails de la modernité démocratique et de la bonne gouvernance.
En effet, pour la première fois dans l’histoire politique du Sénégal indépendant, un président de la République va le 2 avril prochain, jour de sa prestation de serment, pouvoir dérouler sa mandature dans une temporalité maîtrisée. Emancipé de l’obsession de rempiler qui plombe toute velléité transformatrice, inhibe toute prise de risque, parce que pataugeant dans les eaux fangeuses du calcul politicien, il lui sera par conséquent loisible, conformément à ses engagements, non point de penser à son confort personnel mais de servir avec fermeté et détermination le peuple sénégalais au nom duquel il exerce ses prérogatives. Aussi, fort de son élection, devra-t-il surtout décrypter le message envoyé par les quelque 42% qui n’ont pas porté leurs suffrages sur sa personne et dégager des perspectives susceptibles d’insuffler dans le pays un grand vent d’optimisme, producteur de cet élan vital qui bouscule les obstacles, libère les énergies et repousse les barrières de la médiocrité.
Ce qui est donc attendu du président de la République à l’entame de son deuxième et dernier mandat, ce sont des mesures fortes et audacieuses capables d’endiguer l’indiscipline, de dessiner de nouvelles trajectoires susceptibles de restaurer l’espoir. Pour ce faire, un changement de paradigmes s’impose. En l’occurrence, l’instauration d’un autre rapport au pouvoir désormais perçu comme un sacerdoce, un moyen pour transformer les conditions de vie des populations et plus particulièrement celles des plus démunies. Sans nul doute, est-il venu le temps, pour le président Macky Sall, d’assumer et de matérialiser les convictions exprimées dans son ouvrage « Le Sénégal au cœur ». Il y rappelait avec une émotion contenue sa conquête du pouvoir entamée par une « longue marche », (un clin d’oeil à son éphémère et bénéfique militance maoïste ), consistant à « encercler les villes par les campagnes », et qui l’ont vu parcourir quelque 80.000 kms près de trois années durant avec le résultat probant que l’on sait. Il s’agit là d’une expérience qui marque assurément car on n’en sort pas indemne. Il révèlera d’ailleurs que cette dernière avait fini de cimenter en lui une volonté de faire tout ce qui était en son pouvoir pour trouver des réponses aux doléances répertoriées tout au long de cet éprouvant et instructif parcours : « le manque d’eau, les coupures ou l’absence totale d’électricité, l’absence de pistes et de routes praticables, la pénibilité du travail des femmes du monde rural ». Certes si nombre d’actions ont été menées durant le septennat, (constructions de pistes de production, de puits et de forages ; instauration du CMU, des bourses familiales, etc.), il demeure que le travail doit être poursuivi pour pouvoir transformer qualitativement et durablement ce pays qui est le nôtre. A l’instar de la nécessaire réhabilitation du chemin de fer dans le sillage des grands projets autoroutiers.
Aussi, au regard de la nomination imminente du prochain gouvernement, est-il permis d’espérer la levée d’une aube nouvelle s’exprimant à travers des messages forts : un cabinet resserré dont la colonne vertébrale sera la performance et la compétence, avec des ministres, des ministres-conseillers, concentrés sur leurs tâches avec une obligation de résultats. Sans oublier la rationalisation de la pléthore d’agences. Il s’agit en somme de rompre avec la gestion des frustrations en ayant totalement à cœur de sortir le Sénégal de la pauvreté dans laquelle il baigne depuis des lustres du fait d’une gouvernance clientéliste en plus d’être rétive à toute reddition des comptes.
Aujourd’hui, loin de toutes ces pesanteurs, le président a l’impérieuse exigence de se débarrasser du lourd fardeau des calculs égoïstes pour épouser la vitalité du constructeur d’avenir. Il urge par conséquent de prendre des mesures vigoureuses contre les agressions multiformes des politiques de désinvolture et d’impunité qui plombent depuis plusieurs décennies les efforts de développement, surtout en cette période où il se pose la nécessité de veiller à une gestion transparente et une redistribution équitable des dividendes attendues du pétrole et du gaz pour faire de sorte qu’ils ne soient pas la malédiction annoncée mais plutôt une formidable opportunité.
Il s’y ajoute, faut-il le rappeler, qu’en 2024, les électeurs sénégalais auront à voter pour un projet et non contre un président sortant. Aussi serait-il indiqué de faire revenir la confiance dans l’organisation des élections en s’accordant sur des mesures consensuelles et pérennes avec toutes les parties concernées.
Né après les indépendances, pur produit de l’école publique, assumant pleinement ses origines modestes, le président Macky Sall est certainement habité par le désir de sortir par la grande porte. La balle est désormais dans son camp. A lui d’oser imprimer sa marque générationnelle dans ce Sénégal en construction.