Le 06 Avril 2019 quelques jours après la prestation de serment du président réélu Macky Sall, un nouveau gouvernement de 32 ministres est nommé. A la surprise générale Mary Teuw Niane cède son fauteuil de ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche à Cheikh Oumar Hanne désormais ex directeur du Centre des Œuvres Universitaires de Dakar (Coud). La nouvelle tombe mal dans l’entendement général. Jamais une nomination n’aura créé autant de polémiques, en tout cas à ce que je sache.
Qu’est-ce qui incrimine Cheikh Oumar Hanne ?
Pour rappel le Directeur du Coud fut épinglé par le rapport 2017 de l’Office nationale de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac) pour des cas de corruption. Dans ce registre la directrice d’alors de ce corps de contrôle demande le limogeage de ce dernier. Nafi Ngom Keita connue pour sa ténacité quant à la rigueur de sa mission aura épinglé plusieurs ministres et directeurs généraux pour gestion douteuse.
C’est la «Recommandation n°5» formulée par l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac) dans son rapport public 2014-2015 dont Nouvel Hebdo s’est procuré une copie.
«Relever de ses fonctions, le Directeur du Coud pour entrave à l’exécution normale d’une mission de vérification et prendre toutes les mesures utiles pour qu’il ne lui soit plus confié la responsabilité de diriger un organisme public.»
Cheikh Oumar Hanne, le directeur général du Centre des œuvres universitaires de Dakar, a fait l’objet « d’enquêtes et d’investigations menées à la suite d’une dénonciation d’actes de fraude et de corruption.» Le rapport qui l’incrimine est «établi conformément aux normes professionnelles, accompagné des éléments probants recueillis» par les enquêteurs de l’Ofnac et «a été transmis à l’Autorité judiciaire compétente pour que les poursuites soient engagées» contre lui. «Les investigations se poursuivent sur d’autres aspects de la gestion du Coud et les résultats obtenus feront l’objet d’un second rapport.»
L’OFNAC avait découvert des faits de délinquance présumée au Coud. Par exemple, dans le cadre des subventions, un montant total de quatre cent cinquante-quatre millions quatre cent soixante-seize mille quatre-vingt-et-un (454 476 081) francs CFA a été́ accordé par le Coud à divers bénéficiaires en 2014 et 2015.
Plus de deux cent seize millions trois cent quarante-trois mille trois cent vingt-trois (216 343323) francs CFA des subventions ont été́ accordées en 2014 et plus de deux cent trente-huit millions cent trente-deux mille sept cent cinquante-huit (238 132 758) francs CFA pour les huit (8) premiers mois de 2015.
Les vérificateurs ont constaté que, pour l’essentiel, ces subventions concernent des montants importants versés à des agents du Coud ou remis au régisseur, sans précision de leur objet. De ce point de vue, ils font remarquer que les subventions, dans le principe, devraient être versées principalement à des personnes physiques ou morales extérieures au Coud.
Le montant des subventions sans bénéficiaires, d’après le grand livre comptable 2014, s’élève à trente-cinq millions vingt mille (35 020 000) francs CFA. Elles ont été accordées par le Directeur entre le 1er et le 15 octobre 2014. L’Agent comptable n’a pu présenter les pièces justificatives à l’appui des paiements sans bénéficiaires, au nombre de quatre (4) :
le 1er octobre 2014 : 8 800 000 FCFA ;
le 1er octobre 2014 : 15 840 000;
le 15 octobre 2014 : 6 480 000;
le 15 octobre 2014 : 3 900 000.
Les vérificateurs constatent que l’octroi de subventions sans identification formelle des bénéficiaires est injustifiable dans une gestion budgétaire transparente.
En outre, même lorsque les bénéficiaires des subventions sont mentionnés, il n’est indiqué ni l’objet pour lequel les montants sont alloués, ni les justificatifs de leur utilisation. Par ailleurs, le Directeur du Coud a accordé ces subventions en violation de la procédure prévue qui exige l’autorisation du Conseil d’Administration (CA) comme préalable.
Les questions qui me taraudent l’esprit
Cette nomination à un poste qui connait autant de chamboulements, demande une réelle douceur dans la gestion. Et cette douceur est tout ce qui manque chez ce nouveau ministre. On a à plusieurs fois assisté à des cas de bagarres entre le directeur du Coud et un autre responsable politique du département de Podor en l’occurrence Abdoulaye Daouda Diallo. L’opinion peut avoir des avis controversés par rapport au passage de Mary Teuw Niane au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche avec notamment les décès d’étudiants de l’UCAD Bassirou Faye et de l’UGB Fallou Sène, mais il est primordial de constater que le supérieur connait une stabilité réelle depuis l’avènement de ce dernier. Gérer une entité de l’université ne veut en rien dire gérer l’enseignement supérieur. Et dire que les corps de contrôle sont faits pour lutter contre la corruption. Alors, dites-moi pourquoi promouvoir une autorité dont tout incrimine ? D’ailleurs si la volonté est réelle de combattre la corruption dans l’administration pourquoi ne devrait-on pas commencer par les autorités dirigeantes ?
Non Monsieur le président cette nomination passe vraiment très mal.