Frederike Nietzche disait des Romains « qu’ils sont superficiels par profondeur ». La même définition sied bien au Sieur Omar Pene. Ce musicien chanteur, compositeur et leader-vocal du mythique groupe du Super Diamono de Dakar depuis près de cinquante.
De toutes les manières qu’on peut marquer la musique d’un pays, Omar Pene l’a fait avec la musique sénégalaise. Par la formation, les tendances, les duos, les sorties de disques, les concerts.
Il est auteur de plusieurs dizaines de morceaux dont la plupart sont cultes, ou tout au moins des tubes.
. Le spectre de ces chansons va du panafricanisme (qui magnifie les travaux de Nkrumah, de Cheikh Anta Diop, de Cabral) au quotidien sénégalo-sénégalais le plus ordinaire. Il a eu par exemple à chanter le boule à zéro d’un de ses amis, « Adama Ndiaye ». Ce morceau à la limite banale fait partie des plus grands succès de la musique sénégalaise pour plusieurs générations.
Cette large palette de sons est traversée de part à part par deux thématiques majeures. L’Amitié et l’Enfance (à commencer par la sienne propre).
Omar Pene qui aborde l’essentiel de ses sujets par litote a beaucoup chanté les enfants en mettant les parents face à leur responsabilité. Deux de ces chansons devenues des tubes et cultes sont emblématiques de toutes les autres qui vont dans ce sens. Il s’agit de ‘’Tiki-tiki’ et ‘’Baylo Diagne’’.
La première dénonce les conditions des enfants de la rue, la seconde magnifie l’action de Baylo Diagne à son endroit. Cette chanson au-delà de lui et de son mentor et bienfaiteur est un vrai hymne digne d’être traduit et chanté dans tous les endroits où l’on enseigne la pédagogie, dans tous les lieux où des adultes ont en charge l’éducation des enfants. « Champion, si je me mets à chanter tes louanges maintenant, c’est parce que tu es un vrai champion. C’est toi Baylo Diagne qui m’avait pris par la main pour m’inscrire dans une institution, ce qui a fait de moi celui que je suis devenu maintenant. Nanti de ton savoir te voilà qui rencontra un enfant errant un jour, tu lui pris la main, pour l’emmener à un lieu de savoir, et tu dis, eh toi l’enseignant – voilà à travers cet enfant je te confie, le savoir et le savoir-faire, je te confie un potentiel, je te confie une richesse, je te confie l’avenir. »
Dans Tiki-tiki, il interpelle les parents par rapport à leur responsabilité vis-à-vis de leurs enfants qui finalement ne deviendront que l’éducation qu’ils auront reçu (ou pas). Ils s’insurgent contre le grand nombre d’enfants qui pullulent dans nos rues. Ce qui ne manque pas de faire résonance à une autre de ses chansons ‘’Diakhlé/inquiétude’’. « J’étais un petit enfant qui errait dans les rues de Derklé. Ça comportait de l’inquiétude », et dans le même élan, il parle de sa bande qui sont devenus ses amis de toujours et met en garde quiconque qui voudrait les séparer. Ce qui révèle un autre caractère du bonhomme.
Dans le landerneau musical sénégalais très largement influencé par le griotisme, l’homme est l’un des très rares à n’avoir jamais monnayé ses talents en chantant une personne pour son avoir. Il a toujours chanté ses amis ses potes, ses compagnons en temps de malheur comme de bonheur (sa femme y compris, sa femme surtout Bana Ndiaye Meïssa).
Tous ces pairs qui ont eu à reprendre une de ses chansons ou l’ont chanté lui-même, l’ont cité à travers la phrase qu’il adressa aux non-voyants : « si j’avais la chance d’avoir un cœur comme le tien, je serai aux anges »
Cet homme model de par son comportement envers ses proches et son public, et anti-star revêche de par son dégout pour tout ce qui est strass et paillette aurait pu, aurait dû être beaucoup plus connu et reconnu sur le plan international, tant il a il a très largement contribué à dessiner les contours de la musique sénégalaise.
Ismaîla LO l’auteur du cultissime tube mondial ‘’Tadjabone’’ dira un jour qu’il n’a aucune honte de dire qu’il a beaucoup appris auprès de Omar Pene du temps où il était membre du Super Diamono. C’était au détour d’un plateau qu’il partagea avec lui lors d’un numéro de « boulevard en musique » une émission de l’inimitable Khalil Guèye. Cette émission (du début des années 90) qui est parmi les plus grandes réussites des émissions de toute l’histoire de la télévision au Sénégal, en tout cas la plus grande réussite des émissions musicales. Le passage de Omar Pene fut le plus grand succès de cette émission qui vit défiler tous les ténors de la musique sénégalaise de l’époque (qui le sont restés jusque-là du reste) ; Youssou Ndouir (deux fois), Thione Seck, Ismîla Lo, Baaba Maal, Kiné lam, etc..
Le 21 Juin 1993 la date ou pour la dernière fois toute la crème de la musique sénégalaise (résidant au pays) sans exception s’est retrouvée dans le même espace, il était revenu à Omar Pene et le super Diamono le clou de cette fête de la musique, la dernière du genre.
Il est très risqué de vouloir jouer après lui. Ce n’est pas pour rien qu’on le surnomme ‘’le Seigneur du life’’.
Jusque-là il est le seul à avoir fait un duo paritaire avec la STAR internationale Youssou ndour. D’ailleurs cet album « ELEK SIBIR » est fait sur la base du fond musical du Super Diamono.
En tant que chanteur Omar Pene n’a pas que des talents de lead vocal, il est aussi et sans nul doute le meilleur choriste que le Sénégal ait connu jusque-là. Pour preuve, écoutez ou réécoutez le morceau « Tidjou » (https://youtu.be/-nxFD9f6LHk ) ou il assure le chœur pour Ismaila Lo du temps du super diamono, ou « Alalou adduna » de Mada Ba.
En tant que choriste, il met tout son talent au service de l’auteur, et seulement pour le bénéfice de l’auteur. Les rares fois où il a pris part dans un morceau en tant que choriste, n’eut été sa grande humilité il pourrait revendiquer le titre de coauteur, tellement il participe au succès.
L’homme n’a pas seulement marqué la musique sénégalaise de manière visible, mais aussi de manière invisible et insoupçonnée.
Le Super Diamono a été pendant longtemps un groupe géré de manière démocratique, et qui évoluait en osmose avec son premier cercle de public. Un jour ce dernier émis le souhait de voir le groupe produire une musique avec plus de sonorités locales. Pour satisfaire à cette demande, Omar Pene alla chercher Aziz Seck, qui est le père de l’introduction des sabars (percussions sénégalaises) dans la musique sénégalaise.
Pene est un panafricaniste et un patriote dans l’âme. Il (est arrivé) arrive des moments où tout le monde chante l’équipe nationale. Il fut un moment où seul Omar Pene avait chanté l’équipe nationale. Ce fut un moment où l’équipe nationale n’avait pas de star, ne remplissait pas les stades, peinait à se qualifiait même en coupe d’Afrique des Nations. Lui le virtuose du ballon rond qui aurait pu portait les couleurs nationales ne se limitait pas simplement à parler de l’équipe nationale comme la plupart des autres chanteurs ces supporters de la troisième mi-temps. Il fait aussi un vibrant plaidoyer pour un développement véritable du football local, et dans la foulée, il rend hommage aux deux plus grandes icones du journalisme sportif sénégalais Allassane Ndiaye ‘’Allou’’ et Abdoulaye Diaw.
Cependant à mon très humble avis, Omar Pene doit renouer avec Elhadji ‘’Bob’’ Sene. En tout cas je le souhaite très vivement. Depuis le départ de celui-ci du super Diamono, Omar peine à produire des chansons cultes si ce n’est des reprises de morceaux faits avec Bob Sene à ses côtés.
Ps : Omar ak Bob li ngeen defoon ba ngeen di ay xale ba léégi, mënu leen ko suul, fi ngeen jaaroon ba ngeen di ay xale ba léégi mënu leen koo suul, seen benn soppee taxaw naan leen dellu leen àndaat.
Mustafaa SAITQUE
Poète.
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