Recordman du monde du semi-marathon, le Kenyan Abraham Kiptum n’était pas hier sur la ligne de départ du marathon de Londres remporté par son compatriote Eliud Kipchoge, vainqueur de l’épreuve pour la quatrième fois après 2015, 2016 et 2018 avec un temps de 2 h02’37 ». Et pour cause, Kiptum a tout simplement été suspendu jusqu’en 2022 par l’Unité d’intégrité de l’athlétisme (Aiu) pour infraction aux règles antidopage.
Encore un coup dur pour l’athlétisme kényan, affaibli par de nombreuses accusations de dopage. Ces dernières décennies, le Kenya, avec l’Éthiopie bien sûr, a conforté son hégémonie sur les courses de fond et de demifond ; que ce soit pour le 3.000 m steeple, le 5.000 m, le 10.000 m ou encore le marathon. Ce pays de la vallée du Rift nous a habitués, nous autres Africains, à occuper les devants de la scène sportive mondiale à la faveur des performances supersoniques de ses athlètes.
Le Kenya a ainsi vu émerger une légion de phénomènes dont les noms sont inscrits au panthéon de l’athlétisme mondial. Samuel Kamau Wansiru, Naftali Temu, Moses Kiptanui, Kipchogu Keino, John Ngugi, Richard Telimo, Paul Tergat, Isabella Ochichi, Wilson Kipketer, David Rushida, Eliud Kipchogue, Asbel Kiprop, Jemima Sumgong, Mary Keitany, Brigid Kosgei Vivian Cheruiyot ou encore Rita Jeptoo, pour ne citer que ceuxlà, font partie des légendes qui ont marqué les esprits. Malheureusement, l’avalanche des contrôles positifs a jeté un discrédit sur les performances établies par ces champions, jusqu’alors adulés et loués pour leur détermination. L’admiration qui leur était vouée dans tous les coins du globe a fait place à la suspicion. Le sport et le dopage, c’est une réalité historique. Et c’est presque un secret de Polichinelle qu’il est devenu un véritable fléau dans des disciplines comme l’athlétisme. Depuis plusieurs décennies, des sportifs de haut niveau, en quête de gloire et de renommée, cherchent, dans une démarche perverse, à améliorer leurs performances. Ce qui explique les mille et un subterfuges utilisés par les uns et les autres pour briller et réaliser des chronos d’exception. Un flirt très imprudent aux conséquences dangereuses. Le dopage, il faut le souligner, n’est pas seulement une tricherie. Il constitue un risque pour la santé des personnes qui s’y adonnent. Ses conséquences sont nombreuses. Les accrocs sont exposés aux cancers, à des dérèglements hormonaux, des troubles psychologiques et du comportement, des déchirures musculaires, des troubles du foie ou même cardiovasculaires pouvant entraîner la mort. La liste des effets secondaires du dopage est longue, ce qui en fait un problème de santé publique. Flirt dangereux aussi parce qu’il a terrassé beaucoup de légendes.
L’affaire Balco, du nom d’un laboratoire pharmaceutique américain établi à San Francisco, qui a éclaté en 2003, a déclenché l’un des plus importants séismes de l’histoire du sport américain. Elle a emporté la grande Marion Jones devenue en 2000, à Sydney, la première femme athlète à décrocher cinq médailles dans les mêmes Jeux Olympiques. La sprinteuse américaine, reconnue coupable de dopage, a été obligée de restituer ses titres. Avec la publication de plusieurs autres nom de stars de l’athlétisme américain, des mythes se sont effondrés. Beaucoup d’autres scandales ont permis de corser la lutte contre cette tricherie qui viole les valeurs immanentes et immuables intrinsèques au sport. Le dopage est devenu, aujourd’hui, un véritable cancer pour le sport. Il est omniprésent et n’épargne aucune discipline. Au Sénégal, la lutte est depuis des années dans le viseur. L’on s’étonne toujours de la rapidité avec laquelle certains lutteurs parviennent, en un temps record, à accroître leur masse corporelle, musculaire. Ce qui laisse planer le doute sur un recours à des produits dopants illicites.
Tant de muscles et pas de contrôle, serait-on tenté de dire. Le Code du Sport est pourtant clair. « L’utilisation de substances ou de procédés de nature à modifier artificiellement les capacités d’un sportif ou à masquer l’emploi de substances ou procédés ayant cette propriété », nous dit-il en son article L.232-9 de la loi n°2006 405 du 5 avril 2006 pour définir le dopage. Plus question de s’accommoder de la triche. L’usage de substances dopantes doit être totalement interdit afin de conserver un sport « propre ». Pour promouvoir une pratique saine et équitable dans la lutte, il urge de mener une croisade contre ce fléau en mettant en place tous les éléments de base d’un programme antidopage efficace. Celle-ci devrait être une priorité du ministère des Sports qui doit donner le signal de départ de la traque aux tricheurs pour que le sport puisse garder ses belles valeurs et ses grands idéaux.