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Au Mois De Mai 2019 : Voile Et Paix Interreligieuse

Au Mois De Mai 2019 : Voile Et Paix  Interreligieuse

Le Sénégal est un pays renommé pour sa cohabitation interreligieuse harmonieuse, remarquablement paisible. Depuis des siècles, musulmans et chrétiens cohabitent dans une belle entente et partagent ensemble, les heureux et les malheureux évènements de la vie, en fraternité et en solidarité. Le Sénégal est le modèle de beaucoup de pays, non seulement en Afrique, mais aussi en Europe et sur d’autres continents. Cependant, les récurrentes polémiques autour du voile dévoilent un malaise dans la société, une avancée de l’intolérance dans ce pays tant loué pour sa tolérance, une instrumentalisation de la religion pour faire aboutir des buts non avoués. En effet, on a l’impression que cette affaire du voile de Ste. Jeanne d’Arc ne soit un élément de plus, voire de trop, dans un processus sournois et inquiétant d’une ambiance croissante de sentiments d’animosité voire de haine contre les chrétiens au Sénégal. Que cette page puisse servir pour donner quelques exemples des écueils qui existent bel et bien dans la cohabitation interreligieuse tant chantée, afin d’attirer l’attention de l’estimé lecteur sur le constat que ce ne sont pas les habitants musulmans qui sont «menacés» par des mesures «répressives» des écoles catholiques, mais que ce sont par contre les chrétiens qui se sentent passablement à l’étroit dans ce pays qui est le leur.

Ils sont citoyens sénégalais à part entière et non une quelconque «minorité». Eh oui, on brandit volontiers les beaux exemples des cimetières mixtes de Fadiouth et de Ziguinchor, c’est fort édifiant. Cependant, que dit-on des villages où les chrétiens ne peuvent pas enterrer leurs morts, où ils sont obligés de parcourir des kilomètres avec le corps du défunt pour l’enterrer ? Et comment expliquer que dans un pays où les chrétiens, même s’ils sont en «minorité», n’aient pas le droit de pratiquer leur culte partout, malgré l’affirmation de la liberté du culte dans la Constitution ? Je ne parle pas des «villes ou villages saints» musulmans comme Médina Gounass, Pire, Médina Baye, etc. mais d’une capitale départementale, abritant l’Administration départementale d’un Etat laïc, où les chrétiens doivent se rencontrer en privé ou aller dans les villages alentours pour prier. Tivaouane. Et personne ne trouve rien à y redire.

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Comment expliquer que des dizaines, voire des centaines de milliers de petits garçons, soient condamnés à la mendicité, envoyés dans les rues des grandes villes pour collecter des fonds pour des trafiquants d’humains, sous la couverture d’«hommes saints», de «marabouts», qui n’apprennent guère le Saint Coran aux enfants, mais qui les tyrannisent pour qu’ils amènent le maximum de gain ? Et ces écoles dites franco-arabes où toutes les filles sont obligées de porter le voile, sans exception, aussi les chrétiennes ? Et tous ces chrétiens qui ont été quasiment obligés ou poussés à l’apostasie pour avoir un travail, une promotion, un mari, une femme ? Ce sont juste quelques exemples, il y en a des milliers.

Oui, le dialogue interreligieux existe, en paroles et en actions, dans le vouloir commun et dans la vie commune des Sénégalais. Des fêtes et rencontres interreligieuses nous font baigner dans une ambiance de bonheur de pouvoir vivre dans ce pays merveilleux, imprégné de respect et d’amitié entre les adhérents des différentes religions. C’est une vérité, c’est le vécu de beaucoup de Sénégalais. On vit ensemble, on partage bonheur et malheur, on fête ensemble les fêtes religieuses des uns et des autres, on s’entraide, on entretient de solides relations d’amitié et de fraternité. C’est beau, effectivement. Mais il y a aussi le côté caché, le côté obscur qui, malheureusement, est en train de gagner du terrain.

Si après l’interdiction du port du voile dans une école catholique prestigieuse de Dakar se lève un ouragan de réactions haineuses (c’est bien cela), ce n’est pas un hasard. Le terrain a été préparé. En effet, même si l’interdiction peut être taxée de maladroite voire d’anticonstitutionnelle, comme le ministre de l’Education nationale l’a insinué prématurément dans son communiqué par lequel il a enjoint la direction de ladite école de lever son interdiction, elle ne mérite pas une avalanche d’indignations, d’injures, d’insultes et de menaces. C’est de la supercherie. Alors, posons-nous la question si cette histoire du voile n’était pas seulement un élément déclencheur, provoqué à souhait, comme dans les cas précédents, pour envenimer la belle entente et les relations amicales entre tant de musulmans et chrétiens.

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Attention, les pays limitrophes sont tous déchirés par des conflits interreligieux et interethniques. A qui profiterait le pourrissement des relations entre les adhérents des différentes religions au Sénégal ? L’histoire du voile provient d’une pure provocation. En effet, le Sénégal dispose d’un paysage scolaire bien équipé. Même si l’on ne souhaite pas envoyer ses enfants à l’école publique pour diverses raisons, il y a une large gamme d’écoles privées musulmanes, chrétiennes et laïques. Surtout laïques : il y a toute une floraison d’excellentes écoles privées depuis quelques années. Alors personne, vraiment personne, n’est obligé d’envoyer son enfant à l’école catholique. Or, il existe des personnes qui œuvrent justement à la destruction de la cohabitation interreligieuse au Sénégal. Et ces personnes et organisations agissent par provocation : Inscrire sa fille dans une école catholique, lui suggérer le port du voile, lui faire croire qu’elle ne doit pas participer aux cours de gymnastique, s’asseoir à côté des garçons ou faire le rang avec eux. S’isoler et ne communiquer pendant les récréations, qu’avec d’autres filles musulmanes de leur communauté. S’auto-exclure complètement, pour montrer aux autres qu’elles ne souhaitent pas communiquer ou vivre avec eux. Cela bien malgré le fait que leurs parents, à l’inscription, aient signé leur adhésion au projet éducatif de l’école, basant sur la fraternité, la solidarité et le vivre ensemble. Ensuite, attendre la réaction de la direction de l’école. Imaginons une école où de plus en plus de jeunes filles musulmanes voilées empêchent le bon fonctionnement, car elles s’auto-excluent systématiquement, imaginons une direction dépassée et de plus en plus agacée par ces élèves qui ne veulent pas intégrer le projet éducatif de l’école.

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Il y en a qui vont réagir, en désespoir de cause, avec des actions fortes, donc l’interdiction du voile. Et le tour est joué. L’indignation des parents d’élèves, sit-in, manifestations, avalanche d’articles et de post haineux dans la presse et les médias sociaux.

C’est si simple de semer la discorde et la haine. Mais qui sème le vent…

Que Dieu garde le Sénégal dans la paix ! Amen.

Ecrit par une citoyenne inquiète et confiante malgré tout que la paix sociale sera conservée et que le Sénégal continuera à être un modèle de cohabitation paisible.

M.S.N.

L’auteur a préféré

garder l’anonymat (Ndlr)

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