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Sonko, Macky Et Le Dialogue

Sonko, Macky Et Le Dialogue

Tel un éléphant dans un magasin de porcelaines, Ousmane Sonko, par sa dernière sortie médiatique, est venu très certainement mettre à nu le plan de divertissement national savamment conceptualisé et peaufiné dans les officines du palais présidentiel. Les éléments  de saupoudrage du subterfuge politique étaient pourtant bien identifiés et le peuple devait naïvement embarquer dans ce nouveau projet pompeusement nommé dialogue national. Du recrutement de tronches sorties de nulle part, affublées du titre de «non alignés», à  la ridicule figuration de politiciens corvéables et malléables à souhait, en passant par la caution morale assurée par une certaine autorité religieuse et coutumière, aucun détail n’était de trop pour que le citoyen confortablement assis devant son écran soit subtilement berné par cette mascarade mise en scène à la salle des banquets. Le choix de personnalités dits neutres et crédibles pour en assurer le suivi serait l’onction suprême pour parachever la manœuvre. 

 À l’attention d’une population très souvent sensible aux épanchements émotifs quelle que soit l’ampleur de la déception,  et placés subtilement pendant  un mois de ramadan propice au pardon, les ingrédients du dialogue étaient ainsi réunis pour une adhésion populaire à l’entreprise. Les communicants du palais, avec la complicité des journalistes, naïvement ou délibérément, feront le reste pour vendre ce cadeau empoisonné et vouer aux gémonies toute personne surprise à en discréditer la qualité et la  pertinence.

Instigateur principal de cette nouvelle lubie, le président Macky Sall s’attend donc, comme d’habitude, à récolter les fruits de  sa nouvelle trouvaille après avoir honteusement fomenté sa confiscation du pouvoir. Se refaire ainsi une image de samaritain  et de guide éclairé après avoir organisé une compétition présidentielle dont les multiples irrégularités ne faisaient l’ombre d’aucun doute.

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En effet, puisque le peuple amnésique se rappelle rarement de son dernier diner, il fallait  d’abord créer les conditions nébuleuses d’une participation à l’élection présidentielle afin d’en écarter le plus de candidats possibles, surchauffer les nerfs pour installer la hantise d’une instabilité sociale et s’assurer de la collaboration des forces de sécurité lorsque la légitimation juridique du crime ne passera pas aux yeux de l’opinion publique.

Son coup réussi, mais certainement habité par la mauvaise conscience du vol commis et par son incapacité à sortir le Sénégal du gouffre ces cinq prochaines années, il nous revient dans  les habits préfabriqués d’un président épris de la concorde nationale et de la pacification de l’espace politique. «Je vous vole votre bien, le revends plus cher et avec les bénéfices récoltés, j’achète un autre et vous le retourne avec, en prime, un emballage scintillant et multicolore. Vous devrez alors oublier le préjudice causé et vous satisfaire de ma bonne foi à travers le bel emballage dont je l’ai couvert.» Ce stratagème a malheureusement fonctionné auprès d’une bonne partie de la population.

Faisant table rase d’un passé récent parsemé de reniements de la parole donnée, d’une utilisation abusive de son pouvoir pour humilier et écraser des adversaires politiques et d’une gestion clanique et prédatrice de nos ressources, on veut nous obliger à croire cette fois-ci à sa bonne foi, à la métamorphose d’un homme, devenu subitement honnête et sincère. On nous conseille en effet de  passer par pertes et profits les années d’emprisonnement injuste de Khalifa Sall, de fermer les yeux sur l’exil forcé de Karim Wade et d’oublier candidement toutes les bassesses exécutées pendant sept ans pour «réduire l’opposition à sa plus simple expression», l’entreprise de corruption et de partage du gâteau ayant failli devant certaines fortes têtes.

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C’est certainement fort de tout cela que le président du parti Pastef a décliné l’invitation à participer à ce passe-temps cynique. L’abus du pouvoir se nourrit souvent de la naïveté des populations.

La tête sur les épaules et ferme dans ses convictions, comme d’autres chefs de partis, Ousmane Sonko a vraisemblablement  raison de ne pas céder devant la pression populaire ambiante. Il est normal que sa dernière sortie provoque une levée de boucliers, car il incarne dans sa posture l’antithèse de notre attitude culturelle commune dont les politiciens classiques en sont les reflets les plus visibles : le renoncement aux principes lorsque la tentation des privilèges indus pointe le nez ; la culture de la compromission pour céder à la volonté du plus grand nombre ; l’illusion finement entretenue d’être à la recherche du bien collectif pour mieux assurer la défense de ses petits intérêts personnels et, finalement,  le sacrifice du fond des arguments et des idées au profit de la complaisance de la forme. 

Dans quel pays sérieux au monde a-t-on déjà vu un président de la république, convaincu de l’adhésion du peuple à son projet politique, se réveiller le lendemain d’une élection supposée transparente pour proposer un dialogue national ? Comme si le pays était au bord de l’implosion ! Comme si les germes d’une instabilité sociale et économique étaient semés ! Il y a probablement anguille sous roche et Famara Ibrahima Sagna, appelé en sauveur et potentiel bouc-émissaire en cas d’échec du projet, ne le dédouanera pas de sa responsabilité pleine et entière devant le destin de ce simulacre de dialogue.

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Si le président Macky Sall est suffisamment assuré d’être le choix sans équivoque de la large majorité des Sénégalais, qu’il déroule et applique ce pour quoi il a été élu sans tambour ni trompette. Sortir la population de la pauvreté et rendre le Sénégal sûr et prospère ! Dans le domaine politique, la meilleure garantie qu’il puisse donner de sa nouvelle bonne volonté est l’instauration d’un environnement où l’opposition se sent protégée dans son rôle, ainsi que la mise en place de conditions favorables à l’organisation d’élections libres, inclusives et transparentes. Nul besoin de tout ce tintamarre de dialogue national pour y arriver. 







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