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Des Principes Et Des Variables En Communication

Des Principes Et Des Variables En Communication

Mon frère et ami Mamadou Diouma Diallo a accordé un entretien à un site d’informations. Dans cet entretien, il aborde la communication gouvernementale relative à l’information de BBC sur le pétrole et le gaz au Sénégal.

M. Diallo, considère que « c’est une communication bancale et peu réfléchie qui nous est servie. » Il a décrié entre autres :

– l’organisation par le pouvoir de deux conférences de presse en moins de 48h ;

– La prise de parole du chef de l’état jugée précoce ainsi que le lieu de déroulement de cette prise de parole ;

– Le choix porté sur le porte-parole du gouvernement ainsi que le format retenu pour porter… la parole gouvernementale dans une situation qui interpelle l’Etat.

Dans le cadre d’un échange à visée intellectuelle et citoyenne, je me réjouis qu’un universitaire participe au débat sur l’actualité avec une approche dont le fondement se veut technico-objectif. Cependant, la communication n’est pas forcément une science exacte. Et bien souvent, des variables comme le contexte ainsi que des données factuelles priment souvent sur les principes. Or, M. Diallo a tenté globalement d’énoncer des principes qui sans cette compréhension du contexte, peuvent difficilement tenir la route. 

S’agissant des deux supposées conférences de presse qui seraient de trop, il est facile de rappeler que ces deux conférences de presses sont totalement différentes. Car si l’Etat se doit de répondre à des interpellations d’une extrême gravité, il n’en demeure pas moins qu’il ne lui revient pas de s’expliquer dans le fond sur des accusations portées contre un citoyen dans le cadre d’activité privées liées à des fonctions qu’il a exercées en dehors de tout mandat à caractère public. 

Il est donc normal, sur le principe, que les affaires de l’Etat soient prises en charge au niveau gouvernemental notamment et qu’Aliou Sall, personne privée puisse, à son niveau, définir et mettre en œuvre sa stratégie de défense. C’est le contraire qui serait amoral, anormal et inapproprié. Car cela voudrait signifier une confusion de genre et d’instances. Par contre, si M. Diallo pense qu’Aliou Sall devait être sur le même présidium que le porte-parole du gouvernement afin de faire une conférence conjointe, c’est son droit. Mais ce serait là une déviance institutionnelle et éthique. 

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Monsieur Aliou Sall a décidé de faire face à l’opinion et d’apporter des réponses aux interpellations qui le concernent. Il a décidé de porter plainte afin que le droit soit dit. C’est tout à son honneur. 

Relativement à la prise de parole du président de la République, l’expert Diallo note qu’elle est précoce. Argumentant, il suppose que le président limite, de la sorte, toute autre sortie de ses partisans. Là aussi, il est aisé de relever que le niveau de prise en charge initiale  d’une communication de crise dépend de plusieurs facteurs  dont le sujet abordé, le niveau de gravité des accusations, leur impact potentiel sur l’image du pays, leur portée ainsi que leur vitesse de dissémination. Or, lorsqu’un média international à grande audience charge l’Etat au plus haut niveau et accuse le régime d’être corrompu sur des questions liées aux ressources pétrolières, avérées ou fausses, ces informations peuvent porter un lourd préjudice à la nation, à l’image du Sénégal, à la dynamique des investissements ainsi qu’à la crédibilité de notre système de gouvernance économique et politique. 

Toutes choses qui peuvent nuire à notre pays dans bien des segments cruciaux de son développement dans le court et moyen terme. Face à ce risque, il peut bien paraître opportun d’afficher un niveau de transparence, d’engagement et d’implication au plus haut sommet. 

Par ailleurs, le recours à l’analyse comparée dans la pratique des sciences de l’information et de la communication montre que, dans ce qu’il est convenu d’appeler l’affaire Benalla en France, plusieurs experts considèrent que la communication tardive du président Macron a accentué les doutes et contribué à structurer la perception négative de l’opinion sur ce dossier. 

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Au Sénégal, la réaction de Wade plusieurs jours après les événements du 23 juin n’a pas rendu forcément service au pouvoir en place sur l’affaire de la vice-presidence et la suppression du quart bloquant.  

Ainsi, si l’argument de Monsieur Diallo peut se comprendre, il est important de la nuancer car n’étant pas forcément gage de performance.

A propos de l’événement qui a servi de cadre au chef de l’Etat pour s’exprimer sur les accusations de la BBC, la Korité, il est à noter que c’est une pratique consacrée pour un président sénégalais d’aborder à cette occasion les éléments les plus saillants de l’actualité lorsqu’ils impactent de surcroît sur l’image et la crédibilité de notre nation. Même les imams dans leurs sermons n’hésitent pas souvent à aborder les questions d’actualité dès l’instant qu’ils jugent que leur portée dans la vie de la nation est grande. Une fête est aussi l’occasion de raffermir le sentiment d’appartenance à la nation et contribuer ainsi à minorer tout ce qui peut mettre en cause sa cohésion. 

Mieux, le chef de l’Etat a tenu à préciser que soucieux de transparence, les interpellations qui appellent une réponse de la part de l’Etat seront prises en charge par le gouvernement. Qu’en outre, les interpellations d’ordre privé ou personnelles seront dissociées de la communication publique. Donnant ainsi gage de bonne gouvernance et de bonne pratique républicaines. 

En ce qui concerne le format de la conférence du ministre porte-parole, si je peux concéder une chose à M. Diallo, c’est qu’on aurait pu annoncer une déclaration à la presse. Car une conférence suppose plutôt l’idée d’interactions. Ce qui n’a pas été le cas. Cependant M. Diallo sait bien qu’une déclaration faite devant la presse permet toujours un traitement plus efficace notamment pour les TV et radio. 

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En définitive, la meilleure réponse qui puissent être apportée à monsieur Diallo, qui est au passage un ami et un intellectuel pour qui j’ai beaucoup d’estime, est à chercher dans cet aveu d’humilité qu’il a paradoxalement fait dans l’interview en question : « C’est toujours difficile de dire comment il aurait fallu faire surtout quand on parle de crise qui, par définition, ne donne pas toutes les cartes en mains pour une maîtrise complète de la situation. »

Or, malgré sa bonne foi et sa compétence avérées, il est évident qu’il a manqué à mon ami cette « intelligence contextuelle » qui aurait pu lui permettre de comprendre que ce qui se joue ici, ce n’est pas seulement une question politique. Que ce qui se joue ici, c’est la crédibilité de notre système de gouvernance économique ainsi que l’avenir de notre pays dont la marche résolue vers l’émergence peut être accélérée ou retardée par la perception  positive ou négative qu’en auraient  nos citoyens et nos partenaires. 

Et lorsque les intérêts ou l’image de l’Etat sont en jeu, le président, qui a incontestablement «  le Sénégal au cœur », n’a pour préoccupation qu’une chose : les sauvegarder et les préserver. D’où son engagement et son implication républicains dans les aspects publics de cette affaire soulevée par la BBC. 

Dès lors, il est essentiel que nous comprenions et que nous acceptions que ce qui se joue ici, c’est moins une question politicienne ; il s’agit plutôt de la préservation de notre bonne réputation et de notre image de marque. Des sujets qui doivent rester non-clivants afin que chacun d’entre-nous puisse mettre le Sénégal avant tout et ainsi préserver nos chances d’émergence et de développement face à des logiques économiques et financières dont on a pas toujours une claire compréhension des soubassements internes, externes et stratégiques. 

Mamadou Thiam est expert en communication et management







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