La nouvelle était tombée quelques heures après la victoire de nos valeureux lions dont vous fûtesen tant que grand sportif leur soutien constant et inconditionnel. Tous ceux qui ont connu cette silhouette svelte, cette démarche ferme, ce regard grave, cette allure pleine de vie se sont posés cette même question : Comment ? La joie des Sénégalais qui avaient continué à fêter notre qualification en finale de la CAN dans une chaude ambiance fut de courte durée. Il avait été décidé par le décret divin du Tout Puissant, Allah notre Créateur, que vous serez le grand absent à ce grand rendez vous tant attendu, pour le quel vos prières ne nous ont guère fait défaut, depuis votre lit d’hôpital. Depuis, cette liesse populaire s’était dissipée dans une morne ambiance. C’est que les Sénégalais, hommes, femmes, enfants, vieux des villes et des hameaux les plus reculés du pays, dans leur vécu quotidien vous avaient toujours intégré en leur sein comme un fils, frère, mari, père gendre, ami modèle « L’unanimité n’existe que chez les peuples de dieux et d’esclaves », dit-on.
La vérité, nous de l’opposition, en son temps jusqu’en l’An 2000, n’avions douté de votre sincérité, de votre honnêteté intellectuelle constantes. Et que dire de votre esprit patriotique rassembleur et pacifiste, essence et socle de la Coalition BENNO BOKKYAAKAR, dont vous avez si bien contribué á sa concrétisation, vous et d’autres illustres compagnons, comme vos frères aînés le Président Moustapha Niasse, Dansokho? Qui pourrait sérieusement démentir que cette union sacrée autour de l’essentiel, derrière votre frère cadet, « le benjamin du groupe », par delà les diversités idéologiques, des parcours, mue par un seul et noble intérêt, le devenir du Sénégalest et restera unique par sa durée, et par son climat de paix , de solidarité et de loyauté ?
La vie des bonnes gens ne nécessite point qu’on en parle. Elle parle d’elle-même. S’il était permis de le faire, sans risque de nous tromper, nous dirions ceci de vous Ousmane : Populaire, vous êtes resté peuple. Vous n’avez jamais chanté, bonne naissance oblige, cet air du temps qui s’appelle l’arrogance, snober ses anciennes connaissances. Cette foule composite d’hommes, de femmes et de jeunes , adultes, vieux, de condition modeste, qui ont tenu à vous faire cette ultime haie d’honneur tout au long du parcours de cet impressionnant cortège, malgré la douleur, le désarroi qui se lisaient sur leur regard éploré et leur mine triste ne nous démentiront point ! On notait cette même ambiance partout, dans le Walo, à Ndombo Sandjiri, Alarba, que vous connaissiez trop bien, vous leur digne fils, avec votre condisciple et plus que frère de toujours AblayeThiam, notre oncle Ousmane Mbodj et votre neveu, notre cousin Madické Mbodj, Maire de Ndombo, votre ami de toujours PapeYama et son frère Yaxam Mbaye. Vous avez sorti cette contrée des ténèbres et étanché la soif de ses habitants, en y installant l’électricité et le réseau de distribution d’eau potable, les préservant de la bilharziose. Homme de foi et de conviction, vous avez toujours été constant dans vos engagements, quel que soit la situation. qui a tenu bon le gouvernail de ce gros paquebot battant « pavillon Parti Socialiste » que vous avait confié le Président Abdou Diouf en pleine tempête, un certain soir de mars 2000 ? qui était ce commandant légendaire, au milieu de l’océan casquette bien vissée, droit dans ses bottes, faisant face à des menaces, intimidations, tracasseries de toutes sortes, d’alléchantes propositions pour amener son équipage, ses fidèles et loyaux passagers à bon port ?
Alors que bon nombre de responsables avaient pris l’option du sauve- qui –peut, en sautant par dessus le bastingage, pour se terrer, faire le mort ensuite par leur silence. qui pourrait alors vous donner, à vous Ousmane des leçons de courage, d’- honneur ? L’on dit souvent que l’on tient toujours de son « Toureundo » (homonyme) au moins sept caractères. De votre illustre et vénéré homonyme « Ousmane (Osman) parmi les premiers disciples et gendre du Prophète, son troisième Khalife qui paracheva la Recension de la Révélation divine, le Coran, assassiné alor squ’il était en train de le lire nous retiendrons ces qualités : la piété, le courage, l’endurance, la bonté, la générosité, la politesse, la courtoisie, l’érudition, l’honnêteté, la loyauté, la sincérité. Que votre prénom vous fût prédestiné ou non, vous dont on a témoigné que vous avez récité enfant trois fois le Coran, peu importe !
Vous avez toujours fait vôtre cette noble pensée de l’Abbé de Tour, Rabelais pour le citer : « Fais ce que tu voudras, parce que gens libres bien nés, instruits, honnêtes, ayant par nature un instinct aiguillon qui toujours te pousse à faits vertueux, parce que retirés du vice, le quel on nomme honneur ». Ils étaient tous là, Le Chef de L’Etat, votre compagnon profondément atteint, son collègue du Mali , votre frère Ibrahima Boubacar Keita qui ne put continuer son témoignage étouffé par des sanglots , votre frère Ndiaga Dieng, représentant votre bien aimé le maire de Biscuiterie Doudou Issa Niasse, tous ébranlés comme votre plus que frère l’honorable Cheikh Seck, les personnalités religieuses, politiques, toutes confessions, confréries, chapelles confondues : les ministres, maires, députés, vos collègues conseillers des collectivités, conseillers économiques, arborant la bannière nationale , couvrant votre cercueil, tous unis dans la douleur et le recueillement. Cette union des cœurs et des esprits si chère au Président de la République Macky Sall pour un Sénégal uni, de Tous, Pour Tous dans les moments de joie comme dans les moments d’affliction nationale, comme c’est le cas aujourd’hui devrait être une constante en chacun d’entre nous. Ce serait profaner votre sépulture, si à peine sorti de votre concession où vous reposerez désormais à coté de votre brave père l’on se mettait à nouveau à insulter, à dénigrer, à mentir. La pensée qui devrait animer chacun d’entre nous devant votre tombe fraîchement comblée est la suivante : Hier, c’était Djibo Keita, Mbaye Jacques Diop, Bruno Diatta. Aujourd’- hui c’est Ousmane Tanor Dieng. Et Demain ? Ousmane, vous êtes parti à soixante douze ans, laissant dans la douleur veuve et enfants. Sommes nous meilleurs que-vous?
Non ! « Mors ultima ratio » : « La mort est la raison finale de tout ». La haine, l’envie, tout s’efface au trépas. Nous mourrons tous un jour ! Ne nous trompons point ! La valeur et les qualités d’un homme politique ne se mesurent guère au nombre de personnes présentes à ses obsèques. Mais elles s’apprécient surtoutpar rapport à ses faits et actes de son vivant. En cela, Ousmane, vous venez encore d’administrer, venant à la suite de vos illustres aînés, comme le Président L. S. Senghor, bâtisseur de notre Etat une leçon magistrale à la classe politique, la société civile, journalistes et autres coteries, que l’on peut aussi avoir la gloire, le prestige, le respect de ses pairs, en défendant et en exprimant ses opinions dans la courtoisie, la politesse, loin des vociférations, diatribes, insultes écrites et verbales. Vous constituez à la fois la vitrine et le miroir aux serviteurs de l’Etat, anciens premiers ministres, ministres, fonctionnaires reconvertis en opposants en leur rappelant cet adage millénaire comme quoi la parole est d’argent, le silence est d’or. Ce que le Président dans ses formules dont il avait l’ingéniosité parlant de vous disait : « Vous aviez de la tenue et de la retenue, parce que conscient des règles d’éthique et de la gravité des charges qui incombent aux serviteurs de l’Etat et de la République. Votre carrière administrative du début à la fin est comme une leçon de déontologie post- mortem pour tout agent public soucieux du bien commun. Vous êtes un homme de grande courtoisie. Votre sérénité et votre dignité ne sont jamais prises à défaut, dans le pouvoir comme dans l’opposition. Vous étiez aussi un homme de lettres à la plume exquise.
Comme disait Montaigne à propos de la relativité des choses humaines : « l’art de vivre doit se fonder sur une sagesse prudente, inspirée par le bon sens et la tolérance ». Vous avez toujours fait vôtres les vertus cardinales d’un homme politique digne de ce nom et qui hélas ne courent plus les rues : Tu ne mentiras point ! Tu n’offenseras point ! Ceux de vos proches qui vous ont connu depuis votre jeune âge l’ont confirmé. Tout devoir aux autres, et ne rien devoir à soi même, telle fut votre pénible et noble charge dans votre existence. Soixante douze ans, tout de même, ce n’est pas beaucoup dans la vie d’un homme débordant d’énergie comme vous. Mais vous les avez vécus pleinement en homme accompli, emportant avec vous, les secrets d’Etat et la reconnaissance de la Nation. Ousmane, la Nation entière qui vous pleure aujourd’hui, vous qui avez tout donné à votre peuple. Vous êtes parti rejoindre au Panthéon les illustres hommes qui ont marqué l’histoire politique du Sénégal. Devant DIEU, le Tout Puissant, votre père, vous pourrez bien dire : j’ai fait ce que j’ai pu. Vos enfants diront à leur tour : Gloire à notre père !
Ousmane,il ne fait aucun doute que les manuels scolaires d’histoire et d’instructions civiques des écoles, et des Écoles Nationales d’Administration vous consacreront de grandes pages pour que la bonne graine ne meure. En la personne des hommes, femmes et jeunes pétris de valeur dont regorge votre parti, l’espoir est bien permis. Et quoi d’autre ? Avec votre disparition, c’est la pudeur et la décence républicaines qui sont endeuillées. Merci encore monsieur le Président d’avoir honoré votre loyauté jusqu’au bout et au-delà envers votre compagnon, en veillant sur lui et sa famille et en l’accompagnant jusqu’à sa dernière demeure. « Dulce et decorum est pro patria mori » : « Il est doux et beau de mourir pour la patrie». Ainsi chantait le poète. Ousmane, reposez en paix et que la terre de Nguéniène vous soit légère. AMEN.
PAR ME DJIBRIL WAR, DIRECTEUR DE L’ECOLE DU PARTI APR