Au-delà des enjeux religieux, culturels et sociaux, la fête de la Tabaski, par la
pratique sacrificielle du mouton, a de considérables enjeux économiques.
Mais en soi, qu’est-ce que la tabaski, cette « grande fête » des musulmans
appelée l’Aïd-el-Kébir ?
C’est la commémoration du sacrifice originel que Abraham (AS) devait faire de son
fils Ismaël. Le Tout Puissant a voulu éprouver, à la fois, sa réalité de la crainte et sa
radicalité de l’obéissance. Dieu le Miséricordieux suspendit le geste de Abraham
(AS) au moment suprême en lui faisant apporter, par l’ange Gabriel, un « mouton
céleste » de substitution.
Depuis dans le monde entier et de plus en plus, la Tabaski ou fête du mouton donne
lieu à une grande effervescence et constitue particulièrement au Sénégal, pays
constitué de 95% de musulmans, sans doute le moment où s’exprime collectivement
et de manière la plus intense, le sentiment d’appartenir à une même culture et une
même société.
Durant cette fête, dans notre pays, la consommation de viande de mouton atteint des
pics exceptionnels, on assiste au développement d’une véritable « économie de la
Tabaski » avec un marché segmenté approvisionné par différents types d’élevage
qui se sont développés compte tenu de la forte demande estimée à 810 000 têtes de
moutons.
De ce point de vue, la tabaski a un impact économique considérable car elle permet,
par ailleurs, à la plupart des travailleurs (commerçants, couturiers, coiffeurs,
artisans…) mais aussi à des catégories sans emploi (les femmes, les jeunes…) de
gagner de l’argent et de le dépenser aussitôt pour assurer la bonne réussite de la
fête.
Mais le mouton reste le vrai souci économique et familial de la Tabaski ; c’est devenu
le casse-tête des pères de famille
En réalité, « la Tabaski fatigue beaucoup les Sénégalais dont l’immense majorité doit
se débrouiller pour trouver toute la dépense nécessaire à la fête. L’achat du mouton
représente la part la plus importante du budget faisant recourir à de multiples
stratégies notamment l’endettement personnel, les découverts; le groupement
d’achat ; les tontines ; l’élevage à domicile d’un ou deux moutons: le second,
revendu à la Tabaski, amortissant les frais d’entretien et constituant un capital pour
renouveler l’opération lors de la prochaine fête; l’endettement désespéré
du « buki » qui consiste à se procurer une liquidité financière en achetant par
mensualité un appareil électroménager, par exemple, pour le revendre
immédiatement moins cher au comptant ».
Il s’y ajoute, d’autres postes de dépenses incompressibles qui pour les moins nantis,
obligent « l’homme, le mari à se priver d’un nouveau boubou pour que ses épouses
et enfants ne risquent pas sarcasmes et railleries », qui pour les plus aisés les
amènent à repeindre quelques pièces et renouveler les rideaux des portes et
fenêtres.
C’est dire donc que le poids de la fête engendre des coûts énormes qui n’épargnent
aucun acteur économique au vu de l’importance des dépenses de prestige.
L’État pour sa part et l’administration publique en général est victime des lendemains
de fêtes qui pour la plupart ne sont pas déclarés fériés mais de manière tacite
constituent des jours chômés et payés du fait que la plupart des fonctionnaires, se
déplaçant à l’intérieur du pays, ne seront pas à leur bureau. Cela pose le problème
crucial de notre rapport avec le travail.
Au-delà la Tabaski, il est à constater que les fêtes impactent significativement et
négativement sur notre productivité et par ricochet sur notre croissance économique
encore à redynamiser pour un objectif à deux chiffres.
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