L’Afrique est encore en train de se laisser infantiliser. Après un sommet du G7, en France, où certains de ses dirigeants ont été invités à venir voir comment est-ce qu’on prend une décision, c’est le Japon qui tient sa « Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique ». Sans blague ! Et, comme des chefs de cantons conviés à une assemblée sur l’administration de leur territoire, Macky Sall et ses homologues commandent leurs avions, qui ne manquent jamais de kérosène, direction le Pays du Soleil Levant, pour discuter du développement qu’ils avaient promis à leurs miséreux pays. Ce sont ces inutiles palabres, qui existent depuis bien avant la Conférence de Berlin, qui expliqueraient l’absence du chef de l’Etat qui ne tient plus le gouvernail du navire Sénégal en perdition.
Quand le décompte des Khalifes généraux rappelés à Dieu en l’espace de quelques mois, a été fait, nombre des partisans du leader de l’APR ont étalé leur courroux, tirant à boulets rouges sur le journaliste qui a osé cette statistique mortuaire. Pour ces thuriféraires du chef, la corrélation entre Macky et un événement ne peut se faire que quand celui-ci est bienheureux. Le Sénégal remporterait la coupe d’Afrique des Nations, ils lui diraient merci ; mais la pluie qui n’arrive que quand Macky Sall quitte le pays, c’est une coïncidence inutile à souligner. C’est la gouvernance de la bien-pensance charlatane qui ne peut pourtant pas empêcher le constat que depuis que Macky Sall et ses ministres ont pris leurs vacances, les catastrophes se multiplient en plus du marasme qui s’est exacerbé.
Un mois d’aout particulièrement sanglant durant lequel les victimes se comptent par dizaines. Dès le premier du mois, un camion tombe du pont Emile Badiane, comme dans un film. Depuis, les accidents s’enchainent et les routes continuent d’ingurgiter le sang des innocents accidentés installant une véritable hantise du voyage. Plus de 30 morts et plus d’une soixantaine de blessés en un seul mois. Le tableau est lugubre. Tellement sombre qu’il n’est même plus question de Sall-junior et du pétrole qu’il a bu. Partout, les cris de détresse se mêlent aux maudissements déplorant ces si nombreux décès sur les routes, les plages et même à la prison de Rebeuss. Et comme pour davantage rendre la douleur un peu plus aigüe, la pluie qui était tant épiée arrive avec ses torrents de dégâts. Quelques gouttes d’eau sur la capitale suffisent à mettre à nu toutes les politiques que le gouvernement a indiqué avoir mises en place pour lutter contre les inondations. Les populations, abandonnées à leur propre sort, flottent dans les eaux de pluies bravant les saletés pour aller à la recherche du pain quotidien. C’est dans ce contexte que la SDE a annoncé qu’elle priverait, ce weekend, beaucoup de quartiers de Dakar d’eau. Pendant que les robinets leur refusent le liquide précieux ; les eaux des pluies envahissent leurs maisons, les privant de domicile cache-misère. Au même moment, la Senelec, ployant sous le poids de la dette, peine à leur assurer un approvisionnement correct en électricité. Ce sont des milliers de femmes qui s’essoufflent non pas à cause de leurs tâches habituelles de ménage mais dans une évacuation effrénée des eaux de leur maison. Vivre et vivoter n’ont plus grande différence au Sénégal. Aucune perspective viable ne profilant à l’horizon, les jeunes, désemparés, continuent de rallonger la file des candidats à l’émigration devant les ambassades.
Pendant ce temps, le gouvernement est aux abonnés absents, comme pour ne pas avoir à expliquer où sont passés les milliards jadis mobilisés pour prévenir les inondations. Ou à expliquer comment l’échangeur de l’émergence s’est retrouvé immergé. Comment les eaux ont réussi à couper en deux la route nationale numéro 2 qui a englouti des milliards ? Mais plus que celle de ses ministres, l’absence du président Sall, en ces temps troubles, est plus qu’énigmatique. Faisant de son invitation au sommet du G7 une convocation, Macky Sall a délégué les hommages que la Nation doit à Jacques Diouf et à Amath Dansokho, deux illustres fils du pays inhumés en son absence. Tout comme il a manqué les funérailles de l’ancien président gambien Dawda Jawara. Pourtant, en France où était Macky Sall, en octobre 2018, quand les intempéries ont occasionné de nombreux dégâts dans le département de l’Aude, Emmanuel Macron s’est déplacé jusque dans les villages, à Trèbes et Villalier notamment. Avant lui, son Premier ministre, Édouard Philippe, s’était rendu au chevet des sinistrés qui ont pour la plupart été indemnisés.
Mais au Sénégal, les misères des populations préoccupent très peu les gouvernants. Pendant que Ouzin Kata la catastrophe berce l’équipage, Me Malick Sall s’est saisi du gouvernail lâché par Macky et conduit le navire Sénégal tout doucement vers la catastrophe.