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Charles Onana, L’amÈre Saveur De La LibertÉ

Charles Onana, L’amÈre Saveur De La LibertÉ

Essayiste et journaliste franco-camerounais, Charles Onana a écrit plus d’une dizaine d’ouvrages sur le Rwanda, les Tirailleurs, la crise ivoirienne, le Darfour, René Maran, etc. A la veille de la publication de son livre Rwanda, la vérité sur l’opération Turquoise, le 23 octobre aux éditions de l’Artilleur, il s’apprête à jeter un autre pavé dans la mare dans un parcours déjà agité. Rencontre avec un auteur contesté et retour sur la carrière d’un journaliste touche-à-tout sur qui pèsent des soupçons lourds.

Dans le petit hôtel de bordure du périphérique parisien où il nous donne rendez-vous, Charles Onana arrive, commun, chaleureux et élégamment mis : un blazer noir, une chemise blanche, un pantalon beige, des lunettes à montures fines sur le nez. Strict, chic, l’allure altière. Il s’excuse du petit retard. Pendant un temps très bref, on perçoit chez lui, quand il s’installe dans ce confortable hall aux fauteuils capitonnés, comme une forme de scepticisme, notable dans le regard, à se demander qu’est-ce qu’un journaliste sénégalais peut bien lui vouloir ? Cette méfiance passe très vite dès que la conversation s’engage. Ce qu’il avance en premier sur la table, comme un préambule longuement médité – et il y tenait – c’est Cheikh Anta Diop. Référence, modèle, inspirateur, le scientifique sénégalais lui a ouvert un champ intellectuel stimulant, en dopant ses ardeurs de jeune étudiant camerounais, arrivé en France au milieu des années 80.

Cheikh Anta Diop, le maître

Quand il parle de l’égyptologue sénégalais, c’est avec un enthousiasme non feint, une vigueur dans le propos et une gratitude totale que les années n’ont, semble-t-il, pas altérés. Pourquoi Cheikh Anta Diop ? La question est presque idiote. « Pour tout », semble-t-il opiner. Avant de détailler : « pour son envergure, sa rigueur, son étoffe, son courage, le bénéfice inestimable de ses travaux ». L’admiration qu’il a pour cet homme est sans bornes. Il met en particulier au crédit du chercheur, sa trajectoire et l’insolente bravoure de sa carrière. Cheikh Anta Diop, ce jeune chercheur de 27 ans, qui soutient dans les années 50, une thèse audacieuse, prenant à rebours toutes certitudes figées, motrices dans le déni d’histoire du continent africain. Voilà de quoi susciter une vocation et séduire le jeune aspirant. Le culot du scientifique, dans un temps où la soumission intellectuelle était le certificat pour être adoubé en France, enchante le jeune étudiant de la Sorbonne qui étudie alors la science politique.

De Cheikh Anta Diop, naît sans doute chez lui, à côtés de prédispositions personnelles, un goût pour la « vérité cachée », les « zones d’ombres », pour le « hors-champ historique » mais surtout une grande rigueur dans l’approche qu’il revendique. « Est-ce qu’on conteste ma rigueur ? », questionne-t-il d’ailleurs fier de lui, admonestations en direction de ses détracteurs. Rigueur qu’il poursuit, comme obsession et point d’honneur, jusqu’à soutenir une thèse tardive en 2017 à l’université Lyon 3, sur la période du génocide Rwandais. Très vite, cette inclination intellectuelle lui fait rencontrer un deuxième père spirituel : Pierre Péan. L’enquêteur, auteur d’Affaires africaines, ouvrage qui lui vaut des menaces pour avoir ébruiter les secrets de la Françafrique, le séduit. Il ne tardera pas à devenir son « ami intime ». Il l’évoque avec émotion. Les deux hommes développent au fil des années une forte relation : Péan l’appelle son « fils spirituel » et leur regard commun mais surtout impopulaire sur le Rwanda, achève de les unir dans la solitude de l’épreuve.

Le Rwanda, le berceau et le cercueil ?

Journaliste, Charles Onana le devient ainsi au forceps et au culot. Une détermination et une endurance qui le font entrer en stage à l’AFP, lui le diplômé de Relations internationales. Comment a-t-il fait ? Il sourit. « Je me suis imposé », lâche-t-il fier. La vocation se fait ainsi double, il suit le fil. Pour les observateurs de la scène médiatique africaine, Charles Onana n’est pas tellement un nom propre, c’est un nom qui sent le soufre et le hors du commun, voire le méprisable négationniste. Son livre sur le génocide rwandais en 2003, le premier d’une longue série de travaux qu’il consacre à cette région a été un baptême fatal. Au refus des éditeurs de la place parisienne, s’ajoute l’extrême radioactivité du sujet. Il publie chez Duboiris, dont le dirigeant mentionné dans le registre d’immatriculation n’est autre que Auguste Onana, son deuxième prénom. Les éditions Duboiris sont domiciliées dans le chic quartier du Montparnasse, place des éditeurs. Mais c’est une maison confidentielle au catalogue singulier. C’est en hommage au grand sociologue américain William Du Bois qu’il fonde ce label, lui le nostalgique d’une période « féconde de l’histoire des grandes idées du panafricanisme ». C’est le début d’une curieuse production. Pour son livre sur le Rwanda, sur fonds propres, il se rend à Naïrobi au Kenya. Le projet, dit-il, est né d’un angle mort dans la construction narrative de l’attentat du 6 avril 1994. Cet angle mort, c’est que deux présidents africains, Juvénal Habyarimana (Rwanda) et Cyprien Ntaryamira (Burundi) sont décédés et les enquêtes ne semblent pas très diligentes pour faire la lumière sur les coupables. C’est bien l’une des premières fois qu’un attentat d’une telle ampleur frappe et pourtant, note-il, « les commanditaires et coupables n’ont jamais été poursuivis ». Cette incohérence le déconcerte et le pousse sur le terrain. La rencontre d’un diplomate onusien des Grands lacs et les secrets qu’il met à sa disposition creusent son appétit pour le sujet, sur lequel il semble régner un grand poids mort, celui de l’interdit. La suite on la connaît, Charles Onana publie son livre Les Secrets du génocide rwandais : enquête sur les mystères d’un président en 2003, puis un autre Silence sur un attentat en 2005, où il parvient, en avance, aux mêmes conclusions que Pierre Péan plus tard. Il accuse Kagame et son clan. Kagame le menace de procès ; il n’aura jamais lieu. L’homme fort de Kigali renonce. Charles Onana jubile in petto.

Le venin de la suspicion et l’accusation de négationnisme

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C’est le début de la mise au ban du journaliste. Pour un coup d’essai, c’est un coup fatal. Toutes les promesses entrevues dans sa carrière semblent s’éteindre loin de l’épicentre médiatique, entachées par ses développements sur le Rwanda. Sur les rares plateaux où il est invité, comme ce jour-là dans le débat de France 24, il croise le fer avec une journaliste de Libération Maria Malagardis, spécialiste du Rwanda et François Garner, porte-parole de l’association Survie. Le débat tourne vite au pugilat. Il est seul. Sur cet épisode, sa mémoire est fraîche. Cheikh Anta Diop revient à la rescousse. On lui intente un procès en légitimité quasiment, sinon en révisionnisme. Il est le seul africain du plateau. « Pourquoi les africains n’ont pas l’initiative des enquêtes sur leur propre continent ? », s’interroge-t-il. Pourquoi ne pas faire comme l’égyptologue, en sacrifiant à toutes les exigences de rigueur mais ne rien s’interdire ? Quand, pendant l’émission, il dit détenir des documents factuels, fruits d’une investigation minutieuse, les autres débatteurs semblent rire de lui et n’accordent pas crédit à son « délire ». Charles Onana a une explication : qu’il soit africain n’était pas tellement prévu dans ce genre du sujet. Il fait donc tâche. Et qu’en plus il ne reprenne pas les mêmes antiennes, fait de lui véritablement un ovni, qui ne rentre dans aucune des cases préétablies. Ce débat, comme le résumé instantané d’une séquence sur les nouvelles narrations médiatiques sur l’Afrique depuis Paris, donne à voir l’isolement du journaliste. La question pourtant, elle, reste entière. Dans le temps actuel d’accusation du privilège blanc, il est notable de voir, qu’il persiste dans d’autres formes : les journalistes blancs ont plus de facilité à enquêter sur le continent. Ils jouissent d’un préjugé favorable de rigueur. Et pour peu qu’ils soient dans la repentance et dans l’empathie, on ne voit plus tellement ce « privilège » alors que les journalistes locaux souffrent d’un déficit de crédibilité. Ce que cela peut donner à lire, c’est que dans la promotion de la diversité si chère actuellement, ce qu’on promeut c’est le semblable et non le divers. Et dans le privilège blanc, ce n’est pas la couleur le problème, mais le désaccord. Le journaliste africain doit toujours donner des gages, une totale souveraineté est toujours risquée.

Des mentors prestigieux

Pourtant tout avait bien commencé avant la disgrâce. Charles Onana est disciple d’Amadou-Mahtar M’bow, l’ancien secrétaire de l’Unesco. Il était bien introduit dans les hautes sphères intellectuelles et politiques. Il avait ses réseaux, bien harnaché à gauche avec des amis puissants. L’ancien président sénégalais Abdoulaye Wade l’appréciait allant jusqu’à s’exclamer devant un parterre d’officiels en le voyant « quand je le vois, je me revois jeune ». A côté aussi, s’épanouit une fibre littéraire et historique : ce lecteur magnanime de Senghor écrit sur La France et ses Tirailleurs (2003). Livre essentiel de son œuvre, il redonne vie à ses oubliés de l’histoire. Avant que le sujet ne devienne une évidence pour tout le monde et que les commémorations nationales ne s’enchaînent, il avait porté ce combat pour la reconnaissance de ces gloires de l’histoire africaine. Aujourd’hui que les hommages se multiplient, son livre prophétique n’est quasiment pas cité. L’auteur étant suspect, son œuvre est touchée par l’opprobre disqualifiant. La conséquence c’est que Onana, au faîte de la leçon de Péan, file en solitaire, travaille dans la crête. Si la reconnaissance tarde à le saluer par les canaux habituels, il gagne au moins en liberté et en indépendance. Il peut jeter son enquête sur tous les sujets. Ce qu’il ne tarde pas à faire. Mauvaise fortune, bon cœur ? « Même pas », tranche-t-il. Il touche à un lectorat modeste mais en demande.

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A son actif, plusieurs autres livres : sur la crise ivoirienne notamment en prévenant du manichéisme triomphant qui peint Gbagbo en monstre, Ouattara en ange. Ce livre ce sera Côte d’Ivoire : le coup d’État, Duboiris, 2011, avec en prime la préface de l’ancien président sud-africain, Thabo Mbeki. Sur la Palestine, l’édition, les banlieues en France, la vie d’un autre de ses maîtres René Maran, premier Goncourt noir ; sur le Congo, les crimes au Darfour, Joséphine Baker et Hitler…Plus d’une dizaine d’ouvrages. L’œuvre, toujours chez Duboiris, couvre un spectre large de tous les sujets récents et brûlants avec une réelle pénétration des séquences historiques. Elle cultive une qualité commune : une forme d’indépendance vis-à-vis des récits dominants, un temps de la pause et du contretemps qui éclaire différemment des sujets passionnels. A mettre à son actif, quelques vérités, d’abord hérésies avant que le temps, n’en fasse des évidences. A la comparaison, peu de journalistes africains, de quelques rédactions que ce soit, à l’échelle même de la diaspora, peuvent se targuer d’avoir eu une production aussi grande, une inspiration aussi plurielle, qui n’est sans doute pas à l’abri des imperfections. Les reproches seraient nombreux et légitimes contre Charles Onana. Une certaine facilité à se complaire dans cette liberté surévaluée. Un refus de la confrontation avec ses pairs, à charge et à décharge. Sans doute pourrait-on ajouter le peu d’égards par le traumatisme du génocide et la sensibilité du sujet. A-t-il toujours pris toutes les précautions pour aborder le sujet ? Il n’a jamais été « condamné », semble-t-il dire. Est-ce pour autant un gage ? Porter la plume dans la plaie, la devise d’Albert Londres, n’est pas toujours une vertu. 

Pourquoi donc, une telle contribution est-elle absente au débat ? Charles Onana n’a pas de réponse ou feint de ne pas en avoir. Il oppose un sourire satisfait et narquois qui en dit long. Il a été déprogrammé nombre de fois de plusieurs émissions, assure-t-il. Dès que ses co-débatteurs prenaient connaissance de sa présence, il disparaissait des radars. Il rappelle deux anecdotes. A l’assemblée nationale qui rend hommage aux Tirailleurs, on tente de « faire pression contre sa venue », confie-t-il. Au festival prestigieux de journalisme « le scoop d’Anger », bis repetita. Le refus du débat « n’est pas de son fait », répète-t-il. C’est « la peur de l’affronter », abonde-t-il. Toujours à la manœuvre selon lui, les réseaux de Kagamé et leurs puissants relais en France. Il ne sera pas plus loquace. Se sent-il banni ? Il dégonfle la question par un fair-play non moins acide : « ça ne m’intéresse pas ». Il n’est pas « victime de complot ». Il ne veut porter d’accusation gratuite. En toute chose, comme un réflexe professionnel, il souhaite instiller une dose de complexité. Toute son œuvre déconstruit le manichéisme, s’y vautrer donc dans notre entretien, serait en l’en croire malvenu. Cet excès de magnanimité cache-t-il quelque chose ? Il n’en dira pas plus. Le visage tantôt souriant, tantôt dur, ne livre aucun secret. Son ton est professoral, ses explications généreuses avec un goût immodéré pour l’anecdote.

Le médium est-il le message ?

Résultat des courses, il se retrouve parfois devant des audiences ou clubs suspects. Ce qui finit de faire dire à ses détracteurs qu’il se déporte seul dans la marge. A la question de savoir pourquoi, il honore des invitations de certains clubs comme le Cercle Aristote – très à droite – il répond serein, « qu’il honore toutes les invitations ». Quand on ose demander même Minute, hebdomadaire d’extrême droite, il ne se dégonfle pas : « il s’y rendrait ». Pour lui, la force du message prime sur le médium. Il n’adapte pas son discours à son auditoire. Donc le discours est inaliénable. On n’est pas sommé de le croire, mais il donne des gages à juger sur pièces. Jamais il ne sombre (à dessein, de façon calculée, pour déjouer sa réputation ?) dans la charge. Une pondération (de circonstance ?) habille son propos. Il dit n’avoir pas « d’ennemis ». On peut en douter.

Il se désole juste, pour changer de sujet, que les héritiers de Cheikh Anta Diop n’aient pas l’épaisseur de leur idole et travestissent son héritage en combat « médiocre ». L’afrocentrisme, pour lui, « pâle copie de l’eurocentrisme », c’est exactement ce que Cheikh Anta Diop réfutait. Voir ses partisans dans cette déviance le peine et le navre. Il semble avoir pris des distances. Sur Théophile Obenga, Jean-Charles Coovi Gomez, qui revendiquent la filiation de Cheikh Anta Diop, il est peu bavard. Il ne semble pas comprendre comment on en est arrivé là, avant de trancher en identifiant l’origine du problème : « le manque de rigueur scientifique et l’inaptitude toute simple et académique à entériner l’œuvre du maître ». Quand on lui dit que SenePlus a récemment abrité un duel à fleurets mouchetés entre Boubacar Boris Diop et Souleymane Bachir Diagne, il le découvre. Quand on lui fait savoir que Boris Diop était dans le rôle du disciple du Cheikh Anta Diop, et Bachir dans celui du vilain moqueur, il s’étonne, retient un esclaffement et se dérobe. Il a une vraie sympathie pour Bachir Diagne, même s’il convient, en conclusion, que pour briller en Europe, y recevoir des onctions, il faut souvent diluer son propos jusqu’à le rendre « très appréciable ». Il en veut pour preuve, les traitements respectifs de Léopold Senghor et de Cheikh Anta Diop, symbole qui n’a pas disparu selon lui des conditions de promotion. Il n’oppose pas tout de même les deux anciennes figures majeures de la scène intellectuelle africaine et sénégalaise. Il a admiré Cheikh Anta Diop et aimé Senghor, pour des raisons différentes : il se désole tout simplement. Arbitre élégant de la colère, il regrette que les deux ne soient pas restés dans leurs « domaines respectifs ». La tentation politique a ruiné leur relation et entravé leur héritage. Il coupe presque la poire en deux. Quand on lui fait remarquer sa ressemblance physique avec son compatriote camerounais Achille Mbembe, il sourit à peine. Que pense-t-il de son œuvre ? « Pas grand-chose » ! Un lien avec le Cameroun ? « J’y vais souvent »…On n’en saura pas plus.

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Lire, évaluer, débattre ?

Les tentatives de dissuasion ont été nombreuses quand l’idée de le rencontrer à germer. Donner une visibilité à un négationniste ? Non l’ambition ici est sereine. Le défi du journalisme moderne, c’est de créer un espace pluriel pour ne pas nourrir les marges. Défi non encore gagné. Sortir les avis dits nauséabonds de leur terrier et les épurer par l’échange et le débat, sans complaisance, ce n’est qu’un pari. Celui de cet espace. Le révisionnisme est grave et indépassable, on veille à ne pas s’en faire le complice mais la justice se rend dans les prétoires. Et les lecteurs sont jurés souverains. Au total, après ses livres et l’entretien qu’il nous accorde, c’est un « monstre » aux traits curieusement très humains, même chaleureux, que l’on rencontre. Un homme de 55 ans, à la langue riche, à l’inclination bourgeoise, qui mène un combat, avec tout ce qui est inhérent à l’intransigeance : une rigidité, une marginalisation, une dureté. Un homme seul. Mais surtout retenir une production importante, essentielle, rare par le spectre qu’elle couvre, une œuvre perfectible et faible par moment. Sur son état d’esprit, sinon à risquer une psychologie de bazar, on démissionne à savoir plus. Amertume, rancœur, frustration, aigreur chez lui ? Rien de tout cela, sans doute un peu de tout cela aussi. Juste, s’autorise-t-il, le visage subitement clair, qu’il écrit pour « la postérité ». Mystique, prophétique et sans doute un peu trop d’aplomb. Pourtant, lui qui a soutenu une thèse le sait bien : le jugement des pairs est, aussi, une condition de la reconnaissance. Faire sans, c’est prendre des risques et tomber parfois dans la facilité et la vanité de son propre sanglot. Il le sait autrement aussi, lui formé à l’école de la colère de Césaire, son autre maître, que le « cri peut crever au sommet de son escompte ». Presque dommage que le détenteur des archives personnels de l’empereur Bokassa, un autre de ses faits d’armes, n’ait pas cité David Diop dans son panthéon, car dans son célèbre Afrique mon Afrique, bréviaire de tous les écoliers sénégalais, ce passage pourtant très à propos, parle éloquemment :

« …Fils impétueux cet arbre robuste et jeune

Cet arbre là-bas

Splendidement seul au milieu des fleurs

Blanches et fanées

C`est L’Afrique ton Afrique qui repousse

Qui repousse patiemment obstinément

Et dont les fruits ont peu à peu

L’amère saveur de la liberté. »

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