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Visa De La Discorde

L’Etat du Sénégal entend rétablir le visa d’entrée pour les étrangers (hors de l’espace Cedeao) suite à sa suppression en 2015. L’annonce est du ministre de l’Intérieur, Aly Ngouille Ndiaye, la semaine dernière sur les ondes de la Rfm. Dans un contexte mondial et sous-régional marqué par l’insécurité grandissante, du fait, notamment, des menaces liées au terrorisme, c’est tout à fait normal que le Gouvernement active tous les leviers possibles pour préserver l’intégrité territoriale et la sécurité des biens et des personnes. A cet effet, au-delà de la politique de l’Etat de renforcer continuellement les effectifs des forces de défense et de sécurité, l’imposition d’un visa d’entrée aux autres citoyens non résidant dans l’espace Cedeao est une nécessité afin de garantir un climat de paix, facteur important pour la bonne marche des activités économiques. C’est également un moyen qui contribue à garantir un climat des affaires sécurisé aux investisseurs qui se montrent de plus en plus frileux par rapport à la situation sécuritaire des pays destinataires. 

Jusque-là épargné des conflits et des attaques terroristes qui touchent les pays voisins (Mali, Burkina Faso), le Sénégal reste cette oasis logée en plein cœur d’un désert en proie aux crises politico-militaires. Touchons du bois ! Une raison de plus pour contrôler les mouvements des entrées et sorties sur le territoire sénégalais. Depuis quelques années, les aéroports sont devenus un terreau fertile pour les terroristes et des trafiquants de stupéfiants. L’on se rappelle de l’arrestation de présumés djihadistes à Dakar, en avril 2017, ou la traque des colis piégés. 

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En prenant cette décision, l’Etat affiche-t-il une volonté de mettre à genou le tourisme comme le prétendent soutenir les professionnels du tourisme ? La sortie de ces derniers pour dénoncer cette mesure du ministre de l’Intérieur est compréhensible si l’on sait que le gouvernement avait supprimé le visa d’entrée en mai 2015 après l’avoir institué le 1er juillet 2013. Ce jeu de yoyo de l’Etat sur cette question place les acteurs du tourisme dans une inquiétude ambivalente. En mettant fin à cette mesure en 2015, l’Etat cherchait à relancer le tourisme. Une initiative qui a été bien accueillie et applaudie. Cerise sur le gâteau, d’autres mesures incitatives ont été prises au plan de la fiscalité, entre autres. Le rétablissement du visa obligatoire sonne ainsi comme un coup de poignard dans le dos des professionnels du tourisme qui, à toutes les occasions, insistaient sur ce levier pour vendre la destination Sénégal à l’étranger. La dernière en date lors du salon du tourisme, le 27 septembre 2019, à Paris en présence du ministre du Tourisme. L’entrée sans visa était perçue comme un avantage comparatif et compétitif pour le Sénégal vis-à-vis des pays voisins qui deviennent de plus en plus attractifs. 

Aly Ngouille et son collègue du tourisme, Alioune Sarr, ont-ils, ensemble, discuté de la restauration du visa d’entrée ? Mystère et boule de gomme ! Quoi qu’il en soit, les professionnels du tourisme et autres acteurs du secteur doivent savoir que ce n’est pas en supprimant le visa d’entrée que l’on va relancer l’industrie touristique sénégalaise. La preuve, depuis 2015, l’année où le visa d’entrée a été supprimé, le tourisme du Sénégal évolue en dents de scie. Il a fallu attendre l’ouverture de l’Aibd, la création d’une nouvelle compagnie, Air Sénégal et d’autres projets touristiques sur la petite côte pour voir un regain d’activités dans le tourisme. Autant le tourisme est important au regard de sa contribution à la croissance du secteur tertiaire, autant le renforcement de la préservation de la sécurité publique est devenu impératif, voire une demande sociale vue l’aggravation de manières exponentielle des cas d’attaque dans les pays limitrophes. Faudrait-il sacrifier la sécurité publique à l’autel des intérêts du tourisme ? L’imposition d’un visa d’entrée ne doit pas être considérée comme une barrière à la promotion de la machine touristique. D’autant qu’il existe des destinations plus chères en Afrique (Maroc, Kenya, Afrique du Sud…) et qui restent plus que jamais envahies par les touristes. Un touriste qui est sûr de trouver sur place une offre touristique répondant à ses attentes accordera moins d’importance aux questions de visa et à son coût (près de 50 dollars pour le Sénégal). D’où la nécessité pour notre pays d’accélérer les trois branches phares déclinées dans le Pse : le projet de zones touristiques intégrées, le plan sectoriel de développement du micro tourisme et le hub aérien régional. Le digital doit être, aussi, exploité afin d’alléger les lourdes procédures d’obtention de ce sésame.

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