Trente ans après les fameuses conférences nationales de la décennie 90, l’Afrique n’a, semble-t-il pas digéré le menu et les ingrédients du « moins mauvais des systèmes » politiques : la démocratie. Même si cette affirmation péremptoire est très discutable.
Comme depuis la nuit noire de la Colonisation, l’Afrique a ingurgité sans digérer les recettes prêtes-à-porter des Maîtres penseurs venus d’ailleurs. On a d’ailleurs appris et accepté que l’indépendance était un changement de couleur de peau (du « khessal » avant l’heure) des fonctionnaires de notre administration, des gouverneurs généreux égaux par des « présidents élus à vie des coups d’Etat cycliques selon les voies lactées des intérêts supérieurs des « maîtres partis-présents ». C’est la longue nuit des années 60-90 de la plus tragique des farces politiques de notre « entrée en Démocratie ». Balafres cicatricielles de l’indépendance !
Sortis de la nuit noire de la colonisation, on nous plongea dans celle d’une aube « indépendance-dépendance » : organisez votre propre dépendance sous notre dictée discrète et militariste à l’occasion. Cela dura trois décennies. On formata nos esprits perméables aux nouvelles modes dictatoriales de domination : la Démocratie sélective ou/et franchement militariste. Entre partis uniques, régimes militaires ou démocratie partisane limitée, on forgea une nouvelle culture politique acceptée : c’est la Démocratie balafrée des décennies 60-90.
Cette si longue période de faussetés (fausse indépendance, fausse démocratie, faux développement..) épuisa ses fausses comédies, ses faux espoirs. On inventa et imposa la potion salutaire et respiratoire des conférences nationales pour hydrater les grands corps malades qu’étaient les systèmes politiques sparadraps post indépendance. Ils avaient fait leur temps, et leur utilité érodée. Comme une cocotte minute, l’onde de choc des « Conférences nationales », déferla sur le continent comme des déflagrations de tonnerre d’un ciel particulièrement agité…
On mit un peu d’huile dans les moteurs politiques gravement grippés ; on créa des canaux de respiration et d’exultation socio-politiques qui permit une perfusion-anesthésique. Bref, on canalisa les vapeurs des cocottes minutes pour empêcher les déflagrations annoncées. Mais la grande « entourloupe-hypocrisie-arnaque », fut que dans le même temps qu’on ouvrait les vannes explosives, on laissa en (sur) place les héritiers « forbans » des indépendances « farces trappes ». Sacrées balafres démocratiques. Démocratures ! (Je sais ce n’est pas répertorié par « Le Petit Larousse »).
Voilà donc l’Afrique « démocratisée « par un multipartisme contrôlé avec une nouvelle religion : le multipartisme et des élections avec le respect du « calendrier républicain » (tu parles Charles !). Évidemment qu’on va organiser les élections à…presque date échue, sous contrôle des « observateurs de la Communauté internationale », les ONG (une nouvelle traite politique) qui légitiment les résultats électoraux. Mais à coté de ces respirateurs démocratiques, il y a le garrot de la dette, une économie de rente, un holdup perpétuel sur les ressources du Continent. Le système se grippe avec une nouvelle bombe amorcée : une démographie exponentielle. Plus on s’appauvrit, plus on procrée.
Alors plus de conférences nationales. On va (se) consulter. On va écouter les uns et les autres, on va écouter ce que le bon peuple a dans le coeur et dans les tripes, on triera après dans ces grappes de lamentations. De la Guinée Conakry au Cameroun, du Bénin, (premier pays conférencier en 1990) on consulte, on confère, on tente à nouveau de colmater des brèches qui s’élargissent, des brasiers qui fument sous les multiples misères qui gangrènent un continent dont on dit qu’il est insolemment riche et sera « l’avenir du monde ». Putain de paradoxe. Mégarde, balafres d’un Continent en dérive.
Et nous le Sénégal dans tout ça ? On y reviendra. En attendant, observons le jeu de théâtre d’ombres de comédiens hypnotiseurs. Un ex-président et un autre en fonction. Sous nos yeux complices. Ils déroulent une pelote d’araignée qui nous emprisonnera tous demain. Avec notre complicité pétocharde.