L’actualité politique est dominée par ce que les médias, les hommes politiques et les analystes politiques de tous bords ont appelé le troisième mandat supposé du Président Macky Sall. En effet, il ne s’agit pas d’une question de troisième mandat car celui-ci est accordé par le peuple et non par décret présidentiel. Mais plutôt d’un problème relatif au droit d’être candidat ou non à la candidature à la Présidentielle prochaine de 2024 que seul le Conseil constitutionnel a le droit de valider ou d’invalider.
Aussi, faut-il souligner avec force, le problème avec Me Abdoulaye Wade, l’ancien Président de la République en 2012, c’est encore moins un problème de troisième mandat que le droit d’être candidat ou non à la candidature à la Présidentielle précitée. Ainsi, le fait de faire venir au Sénégal d’éminents juristes pour se prononcer sur sa candidature visait à légitimer celle-ci aux yeux du peuple sénégalais. Sur ce, le Conseil constitutionnel est la seule institution habilitée à valider ou à invalider une candidature. Malgré les agitations de la population, il a donné le ticket vert à Me Abdoulaye Wade pour se présenter à la Présidentielle de 2012.
En somme, le peuple ne peut pas se substituer au Conseil constitutionnel en temps normal de paix. Le juge politique s’est prononcé en sa faveur. Donc, du point de vue du droit, rien ne pouvait empêcher qu’il soit candidat. En tant que républicain, une fois que le juge politique décide, on doit respecter sa décision même si on n’est pas d’accord. C’est après la validation des candidatures à la Présidentielle ou à toute autre élection que le peuple est sollicité à choisir. C’est une prérogative à lui dans une démocratie que personne ne peut lui disputer.
Contrairement au droit d’être candidat ou pas à la candidature à une Présidentielle, le mandat est donné par le peuple. Dans le cas de Me Abdoulaye Wade, le Conseil Constitutionnel lui a accordé le droit d’être candidat à la candidature à la présidentielle de 2012 mais le peuple a refusé de lui accorder le troisième mandat qu’il avait demandé. Relativement au Président Macky Sall, il vient d’être réélu pour cinq ans. Seulement, huit mois après, voilà que le débat sur un éventuel troisième mandat est posé au point de dominer l’actualité politique dans les médias. On lui demande de se prononcer pour trancher le débat qui en réalité n’existe pas. Le Président Macky Sall est un Sénégalais élu à la plus haute station de la république pour une durée de cinq ans. Il n’est pas la Constitution. Et il n’est pas non plus le Conseil constitutionnel. A peine élu pourquoi devra t’il se prononcer s’il sera candidat à la prochaine Présidentielle de 2024 ? Ce n’est pas à lui de valider sa propre candidature à la Présidentielle de 2024. C’est au Conseil constitutionnel de le faire. Aussi, ce ne pas à lui de se donner un troisième mandat. C’est au peuple.
Sinon l’ancien Président Me Abdoulaye Wade aurait eu un troisième mandat. Car il allait se donner ce mandat qui lui tenait trop à cœur. Si le Président Me Abdoulaye Wade s’est présenté en 2012, c’est parce que l’article 27 de la Constitution de 2001 était mal rédigé (article 27 : La durée du mandat du Président de la République est de cinq ans. Le mandat est renouvelable une seule fois. Cette disposition ne peut être révisée que par une loi référendaire.) Et pourtant Me Abdoulaye Wade avait dit qu’il avait verrouillé la Constitution. En vérité, il ne l’avait pas verrouillé. Est-ce qu’il revenait à lui de la verrouiller ? Bien sûr que non. C’est le peuple qui a voté la Constitution. C’est le peuple qu’il l’a verrouillée s’il y a eu verrouillage. Malheureusement, ce n’était pas le cas. Ainsi, quand une Constitution est votée, ce qui reste à faire, c’est l’appliquer.
Tirant les enseignements des évènements politiques de 2012, une nouvelle Constitution appelée à mettre fin à la polémique sur le nombre de mandat a été adoptée en 2016. En considération de l’actualité dominée par un éventuel troisième mandat que voudrait le Président Macky Sall, force est de constater que le problème reste encore entier. En effet, au début de cette controverse qui occupe les plateaux de télé et radio, il y a certains juristes et non les moindres pour ne pas les nommer. Où étaient ces juristes ? Où étaient ces hommes politiques ? Pour quoi n’avaient-ils pas dit à temps utile que l’article 27 de la Constitution de 2016 est mal rédigé (article 27 : La durée du mandat du Président de la République est de cinq ans. Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs). Selon ces juristes, il fallait pour éviter la polémique et verrouiller la Constitution introduire des dispositions transitoires claires qui ne prêtent à aucune équivoque. Sur la question du supposé troisième mandat, honnêtement, le Président Macky Sall n’a à aucun moment posé un acte allant dans le sens de pouvoir lui attribuer des intentions de vouloir poser sa candidature à la présidentielle de 2024. Car il s’agit d’abord de droit à la candidature ou non à la Présidentielle précitée avant la question du mandat proprement dit que seul le peuple a le pouvoir de donner. La ligne de communication définie par les communicants du palais, de ne pas parler de troisième mandat, est une décision que l’on peut comprendre et respecter mais elle ajoute malheureusement et insidieusement un peu plus à la suspicion sur les intentions réelles du Président Macky Sall à se présenter ou pas à la Présidentielle de 2024. Ce que je crois, la meilleure attitude à prendre devant cette question déplacée et inopportune de troisième mandat que l’on prête à tort ou à sa raison au Président Macky Sall que seul peut lui accorder le peuple sénégalais, c’est d’y faire face en trouvant les bonnes réponses au lieu de fuir le débat. Pour avoir un troisième mandat, il faut que le Président Macky Sall soit candidat. Et pour être candidat, il faut que le Conseil Constitutionnel valide sa candidature. Et pour avoir un troisième mandat, il faut que le peuple vote pour lui. Que d’aria ! Il vient d’être réélu. Bon sang ! Elevons le débat.
Par Baba Gallé Diallo
Email : babadediana@gmail.com