Au Sénégal les régimes passent depuis 1960 mais les méthodes de captation des deniers publics restent. Chaque président sénégalais arrive avec sa cohorte d’affairistes qui n’ont qu’un seul objectif, faire des affaires grâce aux relations avec celui présidant aux destinées de millions de Sénégalais ou user pour ce faire de trafic d’influence. Cela peut même se comprendre tant que le fait reste dans une sphère privée mais lorsque cela entraine la perception de commissions issues de deniers publics, la chose devient inadmissible et criminelle.
Des personnalités vivantes ou disparues dont beaucoup de Sénégalais envient la réussite ou le mode de vie de leur famille proche ou lointaine et amicale ont ainsi depuis 1960 usé de cette méthode pour se faire une place au soleil. Il en a ainsi été du compte K2 sous le régime socialiste des présidents Senghor et Diouf. Certains Sénégalais, profitant de leur relation politique avec le président ou avec les dirigeants de l’époque, ont bénéficié de “prêts” avec de l’argent public (USB-BNDS et BICIS). USB et BNDS, pour les jeunes générations qui n’ont pas connu ces banques, étaient les fleurons bancaires sénégalais qui finançaient l’économie et notamment l’agriculture dont la gestion gabégique et notamment le non remboursement des “prêts” a hypothéqué l’existence. La création de la Société Nationale de Recouvrement (SNR) ne changera rien à la donne car selon que l’on est proche ou pas du prince on ne risquait rien, tandis que de malheureux sénégalais ont été ruinés par cette structure.
Sous le régime des première et deuxième alternances de 2000 et 2012, le même schéma d’enrichissement facile et de prédation des deniers publics a perduré mais cette fois-ci avec les libéraux qui ont usé et abusé, comme leurs prédécesseurs, des commissions et marchés publics. La seule différence est que, aujourd’hui, la libéralisation et l’existence massive des médias et des réseaux sociaux permettent de dénoncer, alerter et au besoin mobiliser les populations contre ces criminels en cols-blancs.
La sortie du Ministre conseiller en charge de la Communication du président Macky Sall tentant d’expliquer à l’opinion que l’avion de commandement du Sénégal immobilisé pour les besoins de révision était très âgé de 19 ou 20 ans est assurément à notre avis un grossier ballon de sonde lancé. La réponse se doit donc d’être ferme et massive. Non monsieur le ministre conseiller Seydou Gueye, l’urgence des Sénégalais n’est pas dans la recherche de confort ou de jouissance du président de la République et de ses proches, nous leur en donnons déjà assez depuis 2012 comme ce fut le cas pour ses prédécesseurs.
Nous pouvons affirmer haut et fort, au nom de la majorité des Sénégalais, que les priorités sont dans la résorption des problèmes liés à l’approvisionnement quotidien en eau, l’accès à un minimum de structures sanitaires, notamment pour les femmes qui font des dizaines de kilomètres par charrette pour accoucher ou simplement une visite prénatale. La priorité des Sénégalais est dans la résolution des conflits permanents dans l’éducation nationale et l’enseignement supérieur qui entraînent grèves et baisse du niveau des jeunes élèves et étudiants depuis au moins 20 ans. La priorité des Sénégalais est pour que l’agriculture, le tourisme, le commerce, tous moteurs de l’économie sénégalaise, redémarrent et assurent une croissance durable et profitable à la majorité des populations.
Non, monsieur Seydou Guèye, notre priorité ne sera pas d’offrir un nouvel avion au président de la République car la “Pointe de Sangomar”, avion d’une autre génération, a servi 03 présidents (Léopold Sédar Senghor, Abdou Diouf et Abdoulaye Wade) de 1978 à 2010 avant de cesser d’être 6VONE (Avion de commandement du président de la République du Sénégal). Pointe Sarène n’a que 18 ans et 3 mois, cet appareil ne nécessite à notre avis donc aucun remplacement sauf à vouloir enrichir de nouveau de nouvelles personnes (commissions et rétro commissions). En effet, une recherche sommaire nous permet d’affirmer que si les équipements d’un avion sont régulièrement mis à jour, ce n’est donc pas son âge, de moins de 20 ans dans notre cas, qui justifie un remplacement. Par ailleurs selon les spécialistes, l’âge d’un avion ne se calcule pas en années, mais en nombre de cycles réalisés, un cycle correspondant à un décollage et un atterrissage.
L’avion présidentiel sénégalais est un appareil d’une génération récente opéré à partir de 2001 par l’Armée et servant au président de la République française. Cet Airbus A319-100 qui n’est pas exploité comme un avion commercial est conçu, selon nos informations, pour avoir une résistance d’au moins 100 000 cycles, ce qui est loin d’être son cas.
Donc non, monsieur le Président ! Ne cédez pas à la tentation de la jouissance du confort d’un nouvel appareil car Pointe Sarène, avec un très bon entretien, en a encore pour des années de service. Et s’il est avéré que l’armée sénégalaise qui en a la gestion depuis 2011 fait mal son travail, il faut sanctionner les responsables.
Vieux Aïdara
Citoyen