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Ballon D’or 2019 : Sadio…not «the Best» Ou La Longue Tradition De Frustration Des Champions Africains Et De La Diaspora

Ballon D’or 2019 : Sadio…not «the Best» Ou La Longue Tradition De Frustration Des Champions Africains Et De La Diaspora

Les récompenses remises chaque année par la Fifa, qui distinguent le meilleur joueur de l’année version Fifa et en même temps le «onze» de l’année, n’ont jamais été aussi controversées que cette saison 2018-2019 où Lionel Messi a été sacré à côté de Van Dijk et de Ronaldo.

S’il y a eu de fortes récriminations, ce n’est pas tant par la qualité des nominés que par l’absence de deux joueurs africains qui ont éclaboussé l’Europe de leur talent : Sadio Mané et Mohamed Salah, tous deux de Liverpool.

En plus non content de refuser à Sadio une place sur le podium, alors que celui dont l’équipe a subi la pire «remontada» de son histoire face à Liverpool…. de Sadio et de Salah, trône sur le toit des récompenses, les «experts» de la Fifa ont eu la délicatesse de les écarter du «onze type», jetant leur dévolu sur des candidats tels que Eden Hazard et Marcelo dont les statistiques en 2018-2019 sont sans commune mesure avec les performances des deux représentants de l’Afrique.

Aujourd’hui que l’on s’achemine vers le sacre pour le «Ballon d’or», force est de se demander si encore Sadio et dans une moindre mesure Salah vont revivre ce que leurs aînés dans différents sports ont vécu à cause de critères subjectifs qui imposent aux Africains et aux champions de la diaspora d’être plusieurs fois meilleurs pour se faire reconnaître à leur juste valeur et se faire récompenser en conséquence.

Ainsi, aussi loin que l’on remonte dans l’histoire sportive, on ne peut ne pas évoquer un certain «Battling Siki» qui, en 1922, mettait K.o à la 6ème reprise le champion du monde, chouchou de la France sportive, héros populaire, Georges Carpentier.

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L’arbitre, surpris par ce «crime» de lèse-majesté, disqualifia dans un premier temps l’effronté «p’tit nègre sorti de la brousse africaine», avant de revenir sur sa décision devant les protestations véhémentes de la foule, consacrant ainsi Louis Mbarick Fall alias «Battling Siki» premier Africain champion du monde de boxe.

Mais toujours pour garder l’honneur de la France sauve, la Fédération française de boxe suspendra la licence de «Sikki» qui perdra sa couronne en Ireland dans un combat à «l’arbitrage maison» devant un boxeur… irlandais.

Le destin tragique de «Siki» s’achèvera à New York où il sera abattu en pleine rue au cours d’une promenade.

Des années plus tard, en 1936 lors des Jeux d’été de Berlin, c’est un digne représentant de la diaspora africaine, le Noir Américain Jesse Owens qui réduisait à néant la théorie «de supériorité des races» en glanant quatre médailles d’or au sprint et à la longueur devant le maître des céans dépité, qui refusa de le saluer.

Plus tard, Jesse Owens, pris entre deux «termes d’un même choix», dira : «Ce n’est pas Hitler qui m’a snobé, c’est mon Président qui m’a snobé», faisant allusion au refus de Roosevelt de le recevoir à la Maison Blanche, malgré un accueil triomphal.

Presque trente ans plus tard en 1966, comme si le destin jouait avec les décimaux, c’est un jeune garçon de Louisville (Kentucky) qui ramenait la boxe mondiale à ses pieds par son style, sa beauté plastique, son engagement pour la défense de ses frères noirs et de sa religion de cœur, l’islam, mettant «l’establishment» dans tous ses états.

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Alors incapable de le vaincre sur le ring, «l’Amérique blanche» lui retira sa couronne pour refus de s’engager dans l’Armée pour le Vietnam.

Lui-même, Mohamed Ali, pour ne pas le nommer, en dira : «Les Vietnamiens ne m’ont jamais traité de ‘’sale nègre’’ pour que je leur fasse la guerre.»

Mais devant le vide créé par la mise au banc du champion, l’Amérique blanche, pour le faire oublier, fit des pieds et des mains pour le remplacer par une étoile montante des lourds, trois fois champions olympique, le Cubain Teofilo Stevenson, à qui fut promis cinq millions de dollars pour être le nègre de service en venant boxer aux Usa. Mais celui-ci déclina l’offre, d’après la légende, dans un bel élan de solidarité avec son Peuple, en disant «que valent un million de dollars devant huit millions de cubains qui m’aiment».

Ainsi après moult péripéties qui ont suivi sa réhabilitation en 1974, notamment ce combat épique contre Frazer, c’est en Afrique, au Zaïre, sur la terre de ses origines, que Mohamed Ali écrira une des plus belles pages de l’histoire de la boxe moderne en reprenant sa couronne devant le super favori Foreman aux cris de «Ali Bomaye»  («Ali tue-le») des supporters Zaïrois, tous acquis à sa cause..

Mais aujourd’hui c’est au tour de Sadio Mané, dans un sport différent parce que collectif où les distinctions individuelles sont plus difficiles à déterminer, de briguer le «Ballon d’or».

L’enfant de Bambali, qui continue d’illuminer Anfield, fera face au «génie de Rosario» et au «magnifique gladiateur de Madère» et tant d’autres qui ont foulé les pelouses pendant toute la saison considérée et soulevé l’enthousiasme des foules.

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Sadio va-t-il connaître les mêmes frustrations que ses devanciers ou bien, comme avec «Siki», les cris de la foule et l’avis de beaucoup de spécialistes du ballon rond pèseront-ils sur la balance pour une évaluation plus objective de ses performances face à ses concurrents ? Ou faudrait-il alors que l’on reparte à Bambali pour le rebaptiser «Sadioninio» pour oser espérer le voir sur la haute marche du podium comme Weah ou même sur l’une des deux autres marches ?

En ce moment, les votes sont clos et le verdict gît dans le secret de l’urne jusqu’au 2 décembre, jour où le choix sera dévoilé.

En cette occasion solennelle, il y aura forcément une grosse clameur, comme jamais dans l’histoire du «Ballon d’àr», soit pour saluer la consécration de l’énorme saison de l’enfant de Bambali, soit pour fustiger le choix subjectif des experts…à moins qu’il ne soit parmi les trois heureux élus, dont l’histoire retiendra les noms, pour que les supporters africains fassent contre mauvaise fortune bon cœur et continuent à croire au football que le roi Pelé désignait comme le sport le plus équitable, car «la balle est ronde, le terrain plat et on ne joue pas des mains».

Alors, «alea jacta est»… Wait and see.

Colonel (er) Mamadou ADJE

Ancien dirigeant

Sportif dans l’âme et fan de foot

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