La dette de l’État envers les entreprises sénégalaises de distribution pétrolière a atteint des niveaux très inquiétants affectant considérablement la poursuite des activités.
Depuis 2016, les sociétés sénégalaises peinent à recouvrer les sommes dues par l’État, chiffrées à plus de 100 milliards de FCFA au titre des pertes commerciales suite au blocage des prix à la pompe et de la péréquation transport.
Et Pourtant dans le but d’améliorer le processus de paiement, les attributions de la Direction des Hydrocarbures/CNH ont été transférées au Fonds de Soutien au Secteur de l’Énergie (FSSE) suite à une rencontre avec le Premier Ministre de l’époque, cumulativement Ministre de l’Énergie. Formellement et à la suite de ce transfert, une convention a été signée en 2017 entre le FSSE et les distributeurs regroupés autour des organisations patronales.
Cette convention stipulait un règlement régulier des sommes dues par l’État avec un délai de traitement des demandes de remboursement fixé à 2 mois. Un arrêté interministériel N° 13784 du 03/08/2017 signé conjointement par le Ministre de l’Économie, des Finances et du Plan et le Ministre de l’Énergie et du Développement des Énergies Renouvelables venait entériner ladite convention et définissait les règles de remboursement de la péréquation.
Malheureusement, les délais de remboursement contractuels n’ont jamais été respectés par le FSSE, structure dépendant du Ministère des Finances, malgré les nombreuses promesses de règlement. Pour la première fois dans notre pays, notre activité a constaté cette situation de non-paiement de l’État au titre de la péréquation transport, deux années civiles successives, en l’occurrence 2018 et 2019, aggravant ainsi le stock de la dette avec l’encours des années antérieures.
Pour rappel, la péréquation de transport permet de niveler les prix à la pompe sur l’étendue du territoire et à charge pour l’État de rembourser aux distributeurs la différence entre le transport péréqué et le prix réel payé aux Transporteurs. Cette péréquation affecte considérablement la trésorerie des entreprises sénégalaises de distribution pétrolière qui pour l’essentiel, se déploient à l’intérieur du pays, assurant la distribution dans les zones les plus éloignées, permettant même de par leur implantation, d’enrayer le siphonage de nos volumes par les pays voisins.
Normalement, la Caisse de Péréquation de transport des produits doit pouvoir s’autofinancer allègrement compte tenu du volume important vendu dans la zone en péréquation positive, à savoir plus de 70%.
Cet état de fait installe aujourd’hui beaucoup de nos sociétés dans une précarité qui menace réellement la poursuite des activités. Il est à rappeler que pour l’essentiel, nos sociétés sont des petites et moyennes entreprises qui ont du mal à juguler l’encours de l’État et sont obligées de recourir aux concours bancaires pour absorber le gap causé par la dette et ceci, nonobstant les frais financiers affectant considérablement la rentabilité de nos jeunes sociétés. S’y ajoutent les tensions de trésorerie affectant lourdement nos entreprises importatrices de produits pétroliers finis au Sénégal du fait du blocage des prix à la pompe depuis Janvier 2017.
Les avancées constatées dans le dialogue social avec la signature de la Convention Collective du Pétrole le 02/08/2019, une première dans notre pays, saluée par son Excellence Monsieur le Président de la République lors d’un Conseil des Ministres, risquent de piétiner si le règlement de la dette n’est pas effectif. Pourtant, les représentants de l’État aux négociations de ladite Convention en avaient fait la promesse.
Aussi, est-il navrant de constater qu’en même temps l’État, par le biais de sa fiscalité exige à nos sociétés le paiement des taxes dues, déclarées et non liquidées, allant jusqu’à émettre des Avis Tiers Détenteur à leur endroit, bloquant ainsi les comptes bancaires alors qu’il est lui-même à l’origine des difficultés de paiement de nos sociétés, leur devant plus qu’il ne leur exige !!!
A notre rencontre du 29/08/2019 avec le Ministre du Pétrole et des Énergies dont nous tenons à saluer sa disponibilité, son sens de l’écoute et son pragmatisme, nous avions suggéré des pistes de solution.
Monsieur le Ministre trouvait la proposition pertinente au vu de son expérience ….
Seulement, il n’est pas compétent pour sa mise en place et devrait s’en ouvrir au Ministre des Finances et du Budget.
A une rencontre avec le Ministre des Finances et du Budget, la solution préconisée avait été relayée, sans réponse dans le sens souhaité….
A défaut d’un règlement des sommes dues par l’État, nous réitérons notre proposition.
Par la même occasion, suggérons-nous la redéfinition du rôle du Fonds de Soutien au Secteur de l’Énergie (FSSE) et le doter de moyens suffisants et d’une autonomie financière de manière qu’il puisse remplir pleinement sa mission.
Nous en appelons au sens d’équité et de justice des Autorités et particulièrement le Ministre des Finances et du Budget pour un apurement intégral de la dette de manière à permettre aux entreprises de poursuivre leurs activités et accompagner la commercialisation des produits dans cet horizon proche que nous espérons tous.
Ameth GUISSE
Président Association Sénégalaise des Pétroliers (A.S.P.)