A l’occasion de la journée des langues célébrée au musée des civilisations,le ministre de l’éducation s’est félicité de l’introduction de trois de nos langues ( Pulaar, Sérère et Wolof) à l’école élémentaire. Il renchérit que les apprenants comprennent mieux avec leurs langues selon des études.
Pour le statut de nos langues à l’école élémentaire,un organigramme a été proposé par la CNREf ( commission nationale de réforme de l’éducation et de la formation) dans ses conclusions de 1983. C’est malheureux de constater que vingt sept ans après, nous sommes toujours à la même loge. Entre temps,l’ARED ( Associated Research in Education and Development) a expérimenté le bilinguisme concomitant qui a donné des résultats satisfaisants.
Toutefois, l’ARED et la CNREF ont proposé un bilinguisme soustractif qui utilise la maternelle comme béquille avant de la retirer du système. Ce qui se fait aujourd’hui avec la LPT ( Lecture Pour Tous) propose ce même schéma.
Nos langues sont ainsi introduites à l’école élémentaire avec un statut de béquille. Elles ne sont ni langues d’instruction et ni objet d’instruction. Ainsi, le MEN s’en contenterait.
Les études au sujet de l’effectivité de l’apprentissage au moyen de la langue première ne souffre d’aucune ambiguïté.Les spécialistes,les plus renommés n’y sont pas allés par le dos de la cuillère. Entre autres spécialistes nous pouvons citer C Anta Diop, Martin, Collier et Garcia Ofelia.
La langue comprend trois dimensions : psychique, physiologique et acoustique. La première renvoie la conception de la pensée, la seconde aux organes qui favorisent l’élocution la troisième au message audible que perçoit le destinataire. Ces trois dimensions sont nécessaires pour une expression parfaite et saisissable du code.
Un hiatus altérerait d’une façon ou d’une autre la communication. Maintenir alors nos enfants dans le modèle d’immersion que nous avons est alors le premier frein de l’enfant. Selon C A Diop, l’étanchéité du concept étranger empêche l’enfant de saisir le concret qui est la réalité de la langue. La relation signifiant- signifié serait mis à mal. Ainsi, le travail de réflexion cède la place à celui de la mémoire. L’effectivité des apprentissages en prend un sacré coup.
Par ailleurs, il serait important de noter que le passage de la langue première à la langue seconde suit un l’enfant bien formé dans sa langue aura besoin de trois à quatre années d’études de la langue seconde avec une forte exposition pour être instruit au moyen de celle-ci. Ces programmes bilingues sont proposés aux enfants des minorités aux US avant de rejoindre les mainstream où l’anglais est langue d’instruction. Les enfants apprennent l’anglais et bénéficient en même temps d’un très puissant bain linguistique. Il paraît clair qu’il n’est pas ici question de traduire des contenus académiques d’une langue à une autre mais plutôt apprentissages.
L’État doit être plus ambitieux en introduisant nos langues avec un statut de langues d’instruction pour garantir l’effectivité des apprentissages. Il s’agira donc d’introduire nos langues à l’école et de promouvoir leur maintien jusqu’au supérieur. Nous devons nous donner les moyens de cette politique si nous voulons un système éducatif performant qui promeut par ma même nos identités. Ce sera un processus long aux étapes toutes cruciales mais il faudrait un jour commencer.
La relation parent- enfant trouvera une importance dans particulière car elle sera bidirectionnelle. En conséquence, le suivi à la maison, gage d’une réussite scolaire, ne sera plus ce casse-tête.
Ousmane Sy
L’article Education: Introduction de nos langues, une politique peu ambitieuse (Par Ousmane Sy) .