Recteur de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar depuis 2014, Ibrahima Thioub est un historien reconnu sur la scène internationale, notamment grâce à ses travaux sur la traite et l’esclavage. Discret, il se livre sur son parcours, les défis de l’université sénégalaise, mais aussi ses productions qui ont un singulier écho avec les sujets forts du moment. Portrait.
A l’origine, c’était juste un serment d’amis. Le lot de ces paroles que l’on se confie au gré des confessions, dans la chaleur de la camaraderie. Ils sont alors une bande de huit jeunes Sénégalais, qui se fréquentent, à la fin des années 80, dans un foyer Sonacotra à Athis-Mons, dans l’Essonne, en France. Tous sont étudiants. Ils ont entre 25 et 30 ans. Pour contrer les rudes hivers, ils se retrouvent dans une chambre, souvent celle de Babacar Guèye, partagent le thé, dissertent sur tous les sujets. Des banquettes rustiques des rames délabrées du RER C, aux chambres exiguës du foyer, en passant par les salles de cours à Paris, la bande se raffermit, la complicité se noue, et très vite un des sujets qui émerge au cœur des discussions, c’est leur rôle, plus tard dans leur pays. Ils sont frappés, tous, par ce syndrome propre à l’immigré-étudiant, la nostalgie, que tente de corriger le surinvestissement dans l’édifice national. Bien avant eux, dans les années 1950, à la FEANF comme à Présence africaine, l’horizon, pour les intellectuels, c’est le pays d’origine. Et le réseau se tisse ainsi sur la base des amitiés et des affinités idéologiques. Dans la bande d’Athis-Mons, il y a de la suite dans les idées, et une certaine prime à la fidélité, voire au code d’honneur. Le serment devient vite ainsi « le pacte des 8 ». Promesse à soi, mais aussi défi personnel et collectif, les huit se jurent de rentrer au Sénégal après leur études, et de prouver qu’une « recherche rigoureuse pourrait s’épanouir à l’intérieur du pays, malgré les moyens disponibles ». Nul complexe, faire ses preuves intellectuelles, la présomption de la jeunesse combinée à un sens précoce du devoir, deviennent leur crédo et leur cri de ralliement. Pour ce faire, ils se laissent à peine griser par les tentations, les convoitises dont ils font l’objet. Le cap est clair : Dakar sera la terre promise.
Plus de trente ans après, quand Ibrahima Thioub se remémore ces instants fondateurs, une fierté enrobe sa voix. A l’historien, l’histoire fait des clins d’œil. Tous les piliers de la bande ont tenu promesse. Mary Teuw Niane est devenu ministre de l’Enseignement supérieur, Pierre Sarr lui est devenu doyen de la Faculté de Lettres, Babacar Guèye directeur de l’enseignement supérieur, Pape Gueye directeur de l’Anaq sup, Ibra Diène secrétaire général du Syndicat autonome de l’Enseignement supérieur, Mamadou Sarr… La réussite est insolente ; le symbole fort. Quand Mary Teuw Niane l’a sollicité, en 2014, pour lui confier la direction de l’université de Dakar, on imagine le sourire de connivence entre les vieux potes, et les projections anciennes dans ces étroites chambres de la Sonacotra, d’où au plus fort de leur rêve, il ne s’imaginait pas que le destin serait aussi à leur botte. La nomination ne réveille pas l’once d’un soupçon de copinage, car l’amitié est bien secondaire face à la légitimé académique et le mérite.
L’université en chantier : un diagnostic de l’intérieur
Tout n’est pas simple dans la nouvelle occupation. Le prestige du poste cache à peine l’immensité du travail, possiblement piégeur, qui attend le nouveau venu. Le souvenir fait vite place au défi. Ibrahima Thioub, qui a une riche carrière d’historien, le sait : il commence un nouveau virage délicat, avec des responsabilités nouvelles où il doit être le point d’équilibre entre l’ambition politique de l’enseignement supérieur, la vocation historique de creuset de l’université, et les demandes d’insertion professionnelle de plus en plus pressantes. Pour le chercheur, il faut sortir de la poussière des archives, des lectures, pour embrasser ce champ de la mission politique. L’homme doit gouverner une enclave de 80 000 étudiants, revendicatifs, réduits au cœur de la capitale dans une ville dans la ville, dans des conditions matérielles souvent compliquées. Quand il arrive à la tête de l’université, lui qui qui y enseigne depuis les années 90, l’UCAD a une image sérieusement écorchée. Son prestige historique est resté, mais sa surpopulation, et ses crises récurrentes, ont achevé de gangrener l’institution qui fait à peine rêver les nouveaux bacheliers. La mission devient un challenge. Une partie de la bande des 8 d’Athis-Mons, qui s’est retrouvée dans des postes de premier plan de l’enseignement supérieur, est à la tâche pour redorer l’image de l’université. Le plan est vaste. De l’intérieur, Ibrahima Thioub défend l’université mais n’est ni dupe, ni naïf, ni louangeur. Aux critiques – qu’il trouve parfois légitimes – sur le manque d’attractivité de l’université, il oppose le temps long, dans un diagnostic fin et exhaustif sur les causes de l’engorgement. Ce qu’il donne à voir, c’est une université qui a été victime de son succès et de sa solitude. Seule point sur la carte universitaire de l’Afrique francophone pendant longtemps, la multiplication des lycées dès les années 80 a drainé un afflux massif d’élèves sans que l’université ne soit préparée à les accueillir. Résultat des courses, baisse générale du niveau, effectifs pléthoriques, impact sur la qualité de la formation des enseignants qui forment les bacheliers. La demande croissante en personnel éducatifs, hors de la seule université, fait baisser les standards de recrutement. La vocation d’enseignement est dégradée, et le mal commence ainsi dès les petites classes. Si la carte universitaire a depuis été élargie, la courbe démographique, elle, n’a pas faibli. Le résultat reste, bon an mal an, le même. La faiblesse est à la racine. Au moment où Ibrahima Thioub entre à l’université Cheikh Anta Diop, le pays est frappé par les funestes programmes d’ajustements structurels et leur purge sociale. C’est un coup fatal porté à l’enseignement supérieur, avec la réorientation budgétaire. Plusieurs réformes ont été initiées pour l’université, aucune n’a réellement abouti depuis les années 80, note-il, pour mesurer la mission colossale qu’il a accepté de relever, dans ce plan qui vise un équilibre autour de 2035, selon les recommandations de la Concertation nationale sur l’Avenir de l’Enseignement supérieur (CNAES) de 2013, traduites en 11 directives issues de l’unique Conseil présidentiel jamais consacré à l’enseignement supérieur depuis l’indépendance du pays.
Autre point sur lequel son diagnostic revient très généreusement, ce sont les effets de la privatisation et de la libéralisation de l’enseignement qui sont, selon lui, l’autre saignée du personnel. Il évoque ainsi une vampirisation du privé sur le public, tandis que les objectifs ne sont pas les mêmes et les moyens non plus. L’université, qui reste le bastion des ressources humaines de qualité, doit partager ses meilleurs profils avec les écoles et instituts privés qui se développent de façon exponentielle dans la capitale. Un détournement des bourses « s’institue même au cœur de l’université pour financer des formations extérieures dans le privé ». Certains enseignants, rentiers de leur solde publique, participent à la culture du « xar matt » dans les écoles privées. Le sacré de l’institution subit de plein fouet toutes ces dévalorisations et cette relégation sur l’autel du gain rapide, au risque d’oublier la vocation sacerdotale de la transmission. Il en veut pour preuve les calendriers universitaires : la faculté de lettres, qui compte plus de 30000 étudiants, a un calendrier presque régulier alors que celles de sciences économiques et de gestion, celle de sciences juridiques et politiques, avec moitié moins d’étudiants, est frappée par des retards chroniques. Il attribue cette faille en partie à la demande des écoles privées en personnel dans ces filières, qui offrent plus de débouchées professionnels. L’absence de convention formelle, aux termes bien énoncés, entre le public et le privé, contribue à la fragilisation des acquis. Nul n’y gagne, et le sens de la mission publique en prend un sacré coup. Face à cette perdition, que les critiques extérieures ne soupçonnent pas, le recteur se sait seul au front. La CNAES, vaste entreprise de discussions transversales, a posé de bonnes bases pour une transformation qualitative. L’université se modernise. Cette « autoroute sans bretelles » comme l’appelle le recteur, ne permettait jusqu’ici que des sorties par accident aux étudiants dits cartouchards et ils sont majoritaires. « Nombre de ceux qui arrivent au bout de l’autoroute, tournent en rond autour du rond-point du chômage. Telle était la situation ! Maintenant l’enseignement supérieur propose des formations courtes, qualifiantes, pour essayer de coller aux exigences du marché ». Les instituts supérieurs d’enseignement professionnels se multiplient, couvrent le territoire, l’université virtuelle fait son chemin. Ibrahima Thioub, à la manière d’un politique, sans tomber dans des accents mystificateurs, liste les progrès, sans même en revendiquer le mérite.
Pour lui, le défi est clair. S’il a mis en sourdine ses recherches à temps plein, il a une vision du rôle de l’université : demeurer le phare des élites, former les travailleurs de demain, s’adapter à l’évolution de la société. « Combiner sur tous les fronts, l’excellence, la tradition et le pragmatisme ». Et ce travail n’est pas celui d’un jour. Le fils de paysan croit en l’école publique dont il se veut le symbole, par conséquent il se fait le semeur des graines de demain. Ce que le recteur donne à voir de l’université, c’est une longue négligence qui a conduit à une situation intenable, et ce dans une situation concurrentielle compte tenu des assauts du privé. Mais une énergie le fait tenir, comme boussole et devise : l’université doit rester le lieu de la méritocratie républicaine et le lieu de correction des inégalités. Ce souci, chevillé au corps, reste l’ossature qui structure tous les combats qu’il a menés dans sa carrière, pour faire de l’école un service public. Quand le Collège de France, avant de confier la chaire artistique à Alain Mabanckou, et ensuite les enseignements sur l’Afrique à François-Xavier Fauvelle, a voulu le débaucher, il a préféré le défi de rester à Dakar, comme en souvenir du pacte des 8 d’Athis-Mons. C’est un recteur qui voyage, discret, travailleur, qui œuvre à instituer au cœur de son instruction, la souplesse et la flexibilité nécessaire à la pérennité. Un diagnostic de l’intérieur, qui a l’atout d’être renseigné et le défaut peut-être d’être juge et partie.
La lutte contre les inégalités et la domination, une boussole précoce
Dans l’émouvant portrait itinérant que Valerie Nivelon et son émission lui ont consacré sur RFI, l’homme donne à voir l’esquisse de ce parcours iconoclaste, qui a fait de lui un penseur tellement à part. Peu bavard, courant peu les raouts intellectuels, il reste un initié dans le cadre des initiés et un père de famille attachant et généreux. C’est à Malicounda qu’il voit le jour. Formé d’abord à l’école coranique, il rejoint sur décision du père, l’école française. Excellent élève, il poursuit ses études à Mbour, et ensuite à Thiès. Le décès de son frère ainé est un épisode tragique qui le propulse précocement au-devant que la scène : il doit aider ses parents. Il devient instituteur, puis soutiendra plus tard un DEA qui lui donne droit à une bourse. S’ensuit une thèse où, comme une réminiscence de ce chemin de l’école qu’il arpentait « à dos de jument, conduit par ce frère », il s’intéresse à la question des « inégalités et de la domination ». Le jeune Ibrahima Thioub n’a jamais compris pourquoi les dominés acceptaient si docilement leur sort. Sa rébellion précoce contre cet ordre du monde devient une fibre de recherche. Il soutient sa thèse, sur la « marginalisation des autochtones et la domination des étrangers dans le monde des affaires à Dakar ». Un lieu symbolise la domination, plus que tous les autres : la prison. Comme Bourdieu ou Michel Foucault, il explore cette question dans les prisons, lieu de damnation par excellence, et symboles des déterminismes sociaux. Il commence alors un travail sur les « captifs », différents des « esclaves ». Tout chez Ibrahima Thioub concourt à rendre aux individus leurs « trajectoires historiques ». Les hommes ne sont pas réductibles à des enveloppes de races, mais sont des sujets historiques, à considérer en tant que tels.
C’est avec ce bagage, bien documenté, qu’il continue à creuser et se rend aux USA, à Boston, pour un colloque de chercheurs. Il est alors frappé par les expressions de la question raciale dans ce pays. Il raconte une anecdote : une serveuse afro-descendante lui glisse alors qu’elle est « fière d’avoir un des nôtres parmi eux ! ». Avec un sourire surpris, il s’étonne de cette assignation identitaire au nom de la couleur. « Tous les noirs ne sont pas mes frères » ose-t-il d’ailleurs. C’est bien une des premières fois où on le réduit à son enveloppe corporelle, en enjambant tout le reste, son statut, son histoire, la complexité de sa trajectoire. Il est bien plus proche du statut social de ses collègues « blancs » que de cette serveuse, et c’est tout son parcours, son vécu, son histoire personnelle, qu’on efface ainsi au profit de sa seule couleur de peau. La réappréciation des codes racistes des lois Jim Crow aux USA l’interpelle. La définition des êtres en fonction de leur race le bouleverse plus encore. Ce n’était pas son sujet à l’origine, mais ça le devient. Il commence à lire sur l’esclavage et ce qu’il découvre le laisse alors sans voix. Avec ce sujet sensible, c’est la fin de la tranquillité, il se retrouve bien coincé entre la nécessité de l’émancipation, et la recherche de toutes les vérités – au risque de profaner des thèses érigées comme sacrées alors qu’elles sont parfois fantasmées ou réécrites.
Une date symbolise alors un tournant dans sa carrière. Lors du congrès de l’Association des historiens africains à Bamako, le 11 septembre 2001, il fait une présentation sur les lectures africaines des traites et de l’esclavage, en montrant comment la traite a été une entreprise collégiale. « Aucune armée européenne n’était en mesure, au 17e siècle, d’expédier des esclaves au Mississipi » note-t-il. Il y a eu des relais africains, ayant un agenda autonome dans le trafic, des collaborations. La communication fait un tollé. Les réactions sont incrédules. C’est un pacte de silence qu’il vient de transgresser. Mais dans les coulisses, les collègues, viennent le voir : les « Noirs » sont d’accord sur ce qu’il dit, mais pensent qu’il ne faut pas le dire devant les « Blancs ». Les « Blancs » eux, viennent le féliciter en lui disant qu’ils avaient peur de défendre cette thèse, et de passer pour des racistes. Ibrahima Thioub vient d’entrer dans une zone de turbulence. Sans prêter le flanc à la récupération facile, comme l’est par exemple l’anthropologue Tidiane Ndiaye, il s’échine à affiner ses recherches, à planter ses observations au cœur de la vérité scientifique. Il s’élève contre « la naturalisation » des êtres, qui nie leur histoire. C’est un historien total, qui remonte à la source, examine les trajectoires, refuse les assignations et promeut la nécessité de cette « sociologie historique » pour contrer la tentation de réification du fait colonial, comme on l’observe actuellement. Ce qui le rapproche des travaux de de Jean-François Bayart.
Un regard iconoclaste
Dans le paysage intellectuel africain, Ibrahima Thioub apparait clairement comme un iconoclaste. D’ailleurs, quand on lui demande ses modèles, l’ancien élève de Cheikh Anta Diop n’est pas très disert. Il a très tôt développé un goût pour « les sentiers interdits », et ses domaines d’étude et de recherche, de la domination aux prisons en passant par la traite et l’esclavage, dessinent une cohérence dans le primat du fait historique et son interprétation critique. En s’émancipant de toutes les assignations identitaires, des idéologies militantes, il réinstitue la question de l’histoire et de l’historiographie au cœur de la problématique de la mémoire. D’ailleurs, il ne tarde pas à établir une convergence entre les arguments que déploient les discriminants, « la couleur de la peau pour les occidentaux, et le sang de l’esclave pour l’esclavagiste africain ». Tout cela concourt pour lui à une « construction idéologique » de la domination par la naturalisation du statut des acteurs. Par naturalisation, entendre presque la biologisation, et l’enfermement dans un trait identitaire. S’il peut comprendre que, sociologiquement et conjoncturellement, « cette communauté de fait » puisse s’établir – selon l’idée de Pap Ndiaye, auteur de La condition Noire – le conjoncturel ne doit pas, pour lui, être structurel et définitif. Cette intelligence lumineuse par la globalité de ce qu’elle saisit, par son esprit de nuance, sa volonté d’interroger le fait historique sans figer bourreaux et victimes, en ne renonçant pas à la rigueur critique, ont fait de Ibrahima Thioub un penseur reconnu à travers le monde, aux articles qui font autorité, contributeur régulier dans des ouvrages de référence, régulièrement sollicité pour des documentaires comme sur Arte et distingué par le titre de Docteur honoris causa des universités de Nantes, de Bordeaux-Montaigne et de Sciences Po Paris.
Tout un chemin pour ce petit garçon de Malicounda qui rêvait de devenir « médecin », qui qui ne soignera pas des âmes mais formera des esprits. Un jeune garçon, porté sur le sport, qui de son propre aveu avait « les pieds trop aveugles » pour jouer au football – il était néanmoins handballeur dans sa jeunesse et ceinture marron de karaté – et qui a encore aujourd’hui pour passion le jeu d’échec et l’agriculture, sans doute en hommage à son extraction familiale. Il se dégage de l’entretien qu’il nous a accordé, le profil exaltant d’un révolté qui ne fait pas de vagues, pétri de cette assurance qui n’a besoin ni de publicité ni d’effets de manche. Il tente, comme il peut, de raviver la flamme de lieux intellectuels majeurs à l’université, et en veut pour preuve la conférence donnée au sein de l’Université de Dakar par un prix Nobel de chimie, le biologiste américain Martin Chalfie ; un évènement venu étoffer un agenda universitaire mais qui n’a malheureusement pas suscité l’affluence des étudiants à hauteur de ses espérances – ces mêmes étudiants qui le lendemain, en l’honneur de la venue de Sadio Mané, étaient des milliers dans l’enceinte de l’université. Une anecdote que le recteur raconte avec un sourire dans la voix qui contient toute l’acrimonie face à cette relégation de la chose intellectuelle. Son dernier hommage va à une amie, mieux, une complice, la philosophe Aminata (Cissé) Diaw qui nous a quittés, elle qu’il appréciait particulièrement tant leurs pensées s’étaient accordées. Si Ibrahima Thioub a beaucoup apprécié le remarquable ouvrage d’Achille Mbembe Sortir de la grande nuit, lui nous aide à y pénétrer sans tabou, ni partialité, encore moins lamentations, comme un phare qui montre que pour bien en sortir il faut d’abord pleinement y entrer.