Site icon Senexalaat

La Republique Pietinee Ou Les Interminables Bourdes De «modou» Dionne

La Republique Pietinee Ou Les Interminables Bourdes De «modou» Dionne

En cette période cruciale de crise sanitaire, ce vendredi 20 mars 2020 aura été une épreuve-test pour l’Etat dans ses fonctions régaliennes de marquer son autorité pour faire respecter ses décisions et tout simplement faire appliquer la loi interdisant tout rassemblement, même dans les lieux de culte, mosquées, églises, synagogues etc. Hélas, c’est une haute autorité du gouvernement, ancien Premier ministre de surcroît et actuel ministre d’Etat, secrétaire général de la présidence de la République qui se manifeste de la plus mauvaise des manières en s’autorisant à accomplir sa prière dans la grande mosquée de la ville sainte de Touba. Une bravade voulue ou subie ? Une bourde de trop ?

Parmi tant d’autres encore fraîches dans nos mémoires au point d’essuyer les remontrances trop appuyées et médiatisées de serigne Moussa Nawel, un des proches de l’actuel Khalife général, à son « disciple » de Premier ministre d’alors, devant une assistance médusée et un président de la République au sourire gêné, pour dire le moins. Qui ne se souvient de ce supplice qui en avait choqué plus d’un ? Mais cela ne peut arriver qu’à celui qui affiche fièrement son statut peu enviable de « double voire de triple bouton », expression imagée de loyauté ou de marionnette. C’est selon !

Pour l’heure, on notera que cette visite à Touba — celle de vendredi dernier — a fait désordre et installé la cacophonie. Parce que l’ex-Premier ministre Modou Dionne, comme aime l’appeler avec autoritarisme et délectation serigne Moussa Nawel, a piétiné ce qu’il a lui même interdit. Qui mieux que lui, supposé en principe être le plus proche collaborateur du président de la République, gardien de la Constitution donc incarnation suprême des valeurs et vertus républicaines, devrait prêcher par l’exemple en essayant tout simplement de respecter et de faire respecter la loi dont il est le garant ? Qu’il ne se réfugie surtout pas derrière Touba et son Khalife pour justifier son geste dans un discours fleuve d’explications saugrenues qui ne convainc personne !

M. Dionne était dans un lieu de rassemblement, maison de Dieu aussi sacrée que prestigieuse soit-elle, où il n’avait pas sa place ce jour-là. Ce jour-là seulement. Précisément en ce jour de vendredi d’interdits et de sauvegarde du principe de précaution sur l’ensemble du territoire national marqué par la montée de la vague de personnes infectées par « Corona ». Plus de cinquante cas pour l’heure dans tout le pays, selon le ministre de la santé, dont certains notés dans la ville sainte touchée par le virus. N’y a-t-on pas déjà installé un hôpital militaire pour renforcer le dispositif sanitaire et dissiper les craintes d’une probable propagation à grande échelle ? C’est dire… Le fait d’y aller prier, avec force génuflexions auprès de dignitaires religieux, abîme la portée de la mesure d’interdiction et anéantit par ricochet toute velléité de sanctionner d’éventuels contrevenants. L’incohérence est totale. La ville sainte de Touba n’avait pas besoin de se faire illustrer de la sorte par cette maladresse du ministre d’Etat. Son khalife général, serigne Mountakha Mbacké, a pris ses responsabilités et la pleine mesure de la gravité de la situation, en apportant sa contribution financière de deux cent millions de francs dès les premières heures de l’apparition de « Corona » et en interdisant la prière du vendredi à la grande mosquée de Massalikoul Jinane de Dakar, entre autres actions visibles.

La voie était tracée par l’éminent guide religieux et le message bien perçu et largement apprécié par l’opinion publique. « Modou Dionne » n’avait vraiment pas à en rajouter par cette visite superflue dans la ville sainte. Et qu’on ne nous parle surtout pas de raisons d’Etat ! Même le sénégalais le moins averti sait, depuis la nuit des temps, comment la République fonctionne. Hélas, on constate pour le regretter que certains faits, gestes et propos sont de nature à affaisser les mythes et rites de la République, déjà mal en point sous certains aspects. Au demeurant, le rapport du politique et du religieux est tellement complexé et rendu « sensible » sous nos cieux que personne n’ose en parler au risque d’essuyer une fatwa, ou pire des insultes voire des lynchages médiatiques et physiques. Il faudra bien qu’un jour les verrous soient levés pour une meilleure clarification des règles du jeu républicain. On remarquera que nos dirigeants politiques s’accommodent mal de l’indifférence de nos dignitaires religieux, toutes obédiences confondues, au point qu’ils s’évertuent à les « déranger » à tout bout de champ dans leur retraite et la gestion spirituelles des affaires de la communauté de fidèles. Le temporel et le spirituel, deux faces d’une même médaille ?

Certes. Mais la ligne rouge ne doit pas être franchie. Les hommes et femmes politiques du pouvoir comme de l’opposition sont interpellés. Ils doivent aussi savoir raison garder et assumer la plénitude de leurs responsabilités dans le respect des convictions politiques, philosophiques et religieuses ainsi que dans le respect des croyances religieuses de leurs concitoyens, des convictions et croyances que personne n’accepte de voir effilochées et à juste raison.

Pardonnons et aimons Modou Dionne. Vraiment et sincèrement ! Car aujourd’hui, l’heure est grave. C’est probablement cette gravité qui fait paniquer tout le monde, y compris nos dirigeants. Justement, devant la progression vertigineuse de ce méchant virus, le calme et la sérénité de ceux qui nous dirigent, de quelque bord qu’ils se trouvent, doivent être de mise. Aujourd’hui, l’institut Pasteur de France nous apprend qu’un vaccin ne peut pas être envisagé avant l’été 2021.

Le directeur général de l’Oms, organisation mondiale de la santé, lui-même de nationalité éthiopienne, demande aux Africains de se réveiller puisque la pandémie est en train de progresser inexorablement dans notre continent. Mieux, l’OMS, jusqu’ici impuissante et visiblement désemparée, en est aujourd’hui réduite à donner des conseils pour mieux endurer le confinement. C’est dire… Pour terminer je voudrais partager cette réflexion de Moustapha Dahleb, une des plus belles plumes tchadiennes : « Un petit machin microscopique appelé Coronavirus bouleverse la planète… soudain, nous réalisons que nous sommes tous embarqués dans le même bateau, riches et pauvres. Nous réalisons que nous avions dévalisé ensemble les étagères des magasins et constatons que les hôpitaux sont pleins et que l’argent n’a aucune importance. Nous réalisons que, dans nos garages, les voitures haut de gamme sont arrêtées juste parce que personne ne peut sortir »…

Confinement oblige ! « La peur a envahi tout le monde. Elle a changé de camp. Elle a quitté les pauvres pour aller habiter les riches et les puissants. Elle leur a rappelé leur humanité et leur a révélé leur humanisme. Puisse cela servir, poursuit Moustapha Dahleb, à réaliser la limite de l’intelligence humaine face à la force du Ciel. Il a suffi de quelques jours pour que l’humanité prenne conscience qu’elle n’est que souffle et poussière. Rendons-nous à l’Evidence en attendant la Providence. Restons chez nous et méditons sur cette pandémie. Aimons-nous vivants ! », conclut cette belle plume.

Oumar-Diouf FALL

MediaPower221.com







Quitter la version mobile