Le monde traverse actuellement une crise sanitaire sans précédent avec la pandémie du Coronavirus 2019 (COVID-19) qui n’a pas épargné le Sénégal. Cette épidémie a provoqué une fermeture brutale des frontières, ce qui va causer des retards inévitables ou pire des ruptures dans toutes les importations de produits y compris les médicaments d’où
l’importance pour chaque pays d’avoir une souveraineté industrielle pour les médicaments ainsi que les produits alimentaires de première nécessité. En ce même moment, MédiS Sénégal qui est la seule industrie pharmaceutique de manufacturing sénégalais en exploitation a fermé ses portes depuis le 15 janvier 2020 en déclarant un chômage
technique à cause de difficultés financières. Pourtant, Certains médicaments de la firme (Chloroquine, Paracétamol, Doliprane, Quinine et Terpine) sont actuellement utilisés dans le traitement symptomatique du COVID-19.
Nonobstant les rencontres décrochées avec le ministre de la santé et les Directeurs de plusieurs institutions de la République (Direction du Travail, Direction de l’industrie, Direction de la Pharmacie et du Médicament, Haut Conseil du Dialogue Social, CNTS) la situation s’aggrave de jour en jour, ce qui va à l’encontre de la politique de l’Etat en matière de lutte contre les faux médicaments et la promotion de l’industrie pharmaceutique locale. L’Etat du Sénégal ne détient pas plus de 5% des actions de Médis Sénégal qui appartient pourtant au secteur stratégique de l’industrie du médicament. Nous demandons à l’Etat du Sénégal d’augmenter ses parts dans le capital dans le but d’avoir du cash pour redémarrer la production et imposer à la Direction de MédiS Sénégal le respect de ses engagements prises. Lors d’une rencontre récente le 20 mars, le Directeur de la Pharmacie et du Médicament (DPM) nous a informés que si une conciliation à l’amiable n’est pas vite trouvée entre les deux parties (Direction de MédiS et son Personnel), l’Etat du Sénégal pourrait utiliser son pouvoir de réquisition afin d’éviter une rupture de ces médicaments de traitement du COVID-19. Conscient des multiples problèmes (humain, technique et financier) rencontrés par l’entreprise, les Délégués du Personnel avaient pris la responsabilité d’alerter le Président du Conseil d’Administration et les Autorités sénégalaises (Président de la République, Ministre de la santé et Directions rattachées DPM/PNA, Ministre de l’industrie, Ministre du travail) sur la mauvaise gouvernance et le risque sanitaire
en cas de faillite de l’entreprise à travers un mémorandum datant du 19 décembre 2019. En réponse au mémorandum des délégués du personnel, la direction Générale de MédiS a pris la décision unilatérale et en violation des directives du code du travail sénégalais à envoyer la quasi-totalité du personnel en chômage technique à partir du 15 janvier 2020 pour une durée de six (06) mois. Le plan de chômage technique partiel avec un effectif réduit de 30 employés qui nous a été proposé par la Direction représente une restructuration radicale de l’entreprise qui consiste donc à une réduction drastique du personnel et l’orientation de l’activité à faire uniquement du conditionnement secondaire des nouvelles molécules à Dakar déjà fabriqués à Tunis et l’abandon pure et simple de la partie Fabrication de tous les produits de santé publique de l’ancien portefeuille à Dakar pour cause de faibles marges. C’est pourquoi nous sommes convaincus que tout employé envoyé en chômage technique est purement
licencié sans droits parce qu’on aura plus besoin de lui dans cette nouvelle stratégie. Ce projet capitaliste n’est pas bénéfique ni pour les emplois (suppression), ni pour l’Etat (politique sanitaire, promotion de l’industrie pharmaceutique locale, lutte contre les faux médicaments), ni pour la population (accès aux médicaments à faible coût).
Le 14 Avril 2017, lors de l’inauguration de l’implantation du groupe MédiS au Sénégal par l’acquisition de l’entreprise au leader français Sanofi, Monsieur Lassaad BOUJBEL PCA du groupe MédiS International avait pris des engagements à développer le portefeuille des médicaments du site de Dakar et à maintenir et améliorer tous les acquis et avantages sociaux des employés. Cependant la mauvaise gouvernance de MédiS Sénégal démontre le contraire des engagements de Monsieur BOUJBEL : détournements financiers, mauvaise gestion des salaires des employés, mauvaise gestion du personnel, la
liste étant loin d’être exhaustive. A ce jour, les employés de MédiS Sénégal sont restés 3 mois sans salaire et sans prise en charge médical avec leur famille.
La production de MédiS Sénégal est à l’arrêt depuis le 15 décembre 2019 alors que beaucoup de médicaments de santé publique (Gardénal, Phénobarbital, Fer etc.) sont en rupture actuellement au Sénégal.
MédiS Sénégal est une industrie pharmaceutique créée en 1973 grâce à la volonté de l’état du Sénégal sous le nom de SIPOA (Société Industrielle et Pharmaceutique Ouest Africaine). La société a grandi au fil des années jusqu’à intéresser la multinationale Rhône Poulenc à rentrer dans le capital et en devenir l’actionnaire majoritaire en 1989.
Par le jeu des fusions et acquisitions des multinationales, la société a subi plusieurs changements de
dénominations :
Rhône Poulenc à Aventis Pharma en 2000 ;
Aventis Pharma à Sanofi- Aventis en 2004 ;
Sanofi-Aventis à Africasoins Production (groupe Sanofi) en 2006 ;
Africasoins Production à Winthrop Pharma Sénégal (groupe Sanofi) en 2008 ;
Et Winthrop Pharma Sénégal à MédiS Sénégal en Avril 2017.
MédiS Sénégal appartient au groupe Médis International, un leader tunisien de l’industrie
pharmaceutique, présent déjà en Algérie et en République Tchèque et qui venu élargir ses bases au
Sénégal avec la perspective de se développer activement en Afrique subsaharienne.
Médis Sénégal compte à ce jour 117 permanents et plus de 200 journaliers et temporaires pour
assurer ses activités.
MédiS Sénégal fabrique et commercialise des médicaments accessibles au pouvoir d’achat des pays
africains dans plusieurs domaines thérapeutiques : cardiologie, diabète, neuropsychiatrie, oncologie,
douleur, allergies, gastrologie etc. Ci-dessous une liste non exhaustive des produits phares :
Paracétamol est un antalgique,
Gardénal ou Phénobarbital soignent l’épilepsie,
Fer acide folique utilisé par les femmes enceintes,
Parégorique soigne les diarrhées et dysenteries,
Doliprane Sirop un antalgique pour les bébés,
Paluject et Quinine soignent le paludisme,
C’est en résumé, les causes des manifestations du personnel de Médis Sénégal qui luttent nuit et jour afin d’éviter la faillite de la seule entreprise pharmaceutique en exploitation au Sénégal. Rappelons que Pfizer Sénégal une firme pharmaceutique américaine est tombée en faillite en 2017. Le Sénégal a importé en 2018 des médicaments d’une valeur de 137 milliards de FCFA selon Dr Annette Seck Ndiaye Directrice de la Pharmacie Nationale d’Approvisionnement du Sénégal. La faillite de MédiS Sénégal représenterait une catastrophe sanitaire et industrielle avec une suppression de plus de 250 emplois.