Les gouttes de sueurs qui ont giclé, puis ruisselé sur le visage du ministre Mansour Faye lors d’une Conférence de presse pour le moins mal préparée, et qui du point de vue du langage corporel, en ont fait un coupable malgré lui, se sont transformées en un fleuve gluant pour, arrivées au Palais, y transformer le parquet en dangereux facteur de glissades incontrôlées.
Au-delà de la panique qui polluait ses réponses et en assombrissait les contours, et au vu de la manière d’agiter son mouchoir blanc trempé, comme une reddition, il était urgent d’abord de le thermoflasher, pour savoir si d’aventure il ne couvait pas un Covid-19, pour le coup sarcastique. Mais je digresse… Les choses sont plus sérieuses, et il convient de maîtriser son fou-rire, parce que l’heure est à la gravité.
Le discours du président fait de clairvoyance notamment lors de son entretien télévisé sur RFI et France24, était télescopé par cette douloureuse séquence qui brouillait nettement ses vœux de prise au sérieux de la méthode sénégalaise dans l’affrontement de cette crise sanitaire dont personne ne peut présager de l’issue pour la santé de nos populations. Le chef de l’Etat joue gros dans cette gestion. Et l’image désastreuse qu’il a donnée en allant seul comme un héros antique, recueillir les tonnes de riz au Port, défilant martial devant un mur de vivres, pour aller au final « remettre symboliquement les clés du camion » à son frère et son beau-frère, plutôt qu’à un CEMGA auquel il tendrait le drapeau de la révolte contre le Covid 19, devait être corrigée, à tout le moins enfouie sous une décision rassurante pour une population qui commence à être plus qu’agacée par les turpitudes, doux euphémismes, de certains responsables politiques, provoquant chez elle un sacré « riz le bol ». Le truc est vieux comme le monde politique : Quand surgit un problème, créer une commission est l’urgence. Là c’est un comité, que nous n’oserons pas pour l’instant baptiser « Théodule » qui est mis en orbite, avec à sa tête un Général de 40 ans, pour atténuer les polémiques et soustraire Mansour Faye des tranchées de cette guerre qu’il n’est pas en mesure de conduire, puisque devenu inaudible.
Et ça tombe plutôt bien… Le Général de division François Ndiaye occupait jusqu’à cette date, les fonctions d’Inspecteur Général des Forces Armées (IGFA). Au cours de sa carrière, il a assuré notamment les fonctions de chef d’état-major de l’armée de terre (CEMAT). Un fantassin pour remettre un peu d’ordre dans cette obscène pagaille créée par des affamés autour d’un bol de riz. Pour nettoyer un escalier, commencer par le haut est nécessaire. Pour que les Sénégalais accrochent au discours de discipline qu’on attend d’eux et qui devrait s’accentuer si l’on en croit le président, il faudrait montrer un peu de rigueur là-haut, pour que ça puisse suivre, exemplarité oblige. Mais la raison commande aussi de penser que la présomption de neutralité et d’efficacité qui entoure les officiers et les Généraux n’est pas toujours avérée. Armée loyaliste, c’est son honneur, ses chefs ont toujours obéi à l’autorité politique, qui les a par ailleurs « bien traités », au nom de la loyauté républicaine. Sous les uniformes vivent et se comportent tout de même des « sénégalais comme les autres », et ce n’est pas le manque de réponses il y a quelques années de cela, aux questionnements du Colonel Ndao sur les agissements douteux de certains de ses pairs, qui nous rassurera totalement. Jusqu’au jour d’aujourd’hui il ne nous a pas encore été démontré que ces questionnements étaient saugrenus. On a fait sonner la charge du brouhaha et on est passé à autre chose.
Il faut à présent casser tous paradigmes fallacieux qui nous maintiennent dans un conservatisme qui ne peut parfois être de mise. Les humbles magistrats d’hier ont été remplacés par de plus ostentatoires juges et procureurs, c’est ainsi que notre monde va, se « bling-blinguant » un peu plus davantage chaque jour. Au-delà de cette nomination d’un Général à la tête de ce comité de suivi du Covid-19, c’est une image d’une Armée réconciliée avec sa Nation et à son service qu’il faudra donner, comme un défilé du 4 Avril géant et en live sur tout le territoire qu’il faudra exécuter avec responsabilité, pour que le Sénégal sorte vainqueur de cette crise sanitaire qui nous menace tous tant que nous sommes et qui met en péril le futur de nos enfants pour des générations. Ce général est face à l’Histoire de son pays… Comme le président qui lui met le pied à l’étrier de cette glorieuse mission, lequel doit aussi savoir que pour qu’il emprunte cette porte de l’Histoire qui s’ouvre devant lui, il doit pouvoir avancer avec dignité, courage, grandeur et élégance. Cette démarche ne peut être que claudicante si il trimballe des cailloux dans ses mocassins. Il lui faut s’arrêter, les prendre en mains, les secouer et les remettre une fois balancés, pour avancer serein vers le destin que son peuple alors l’aura aidé à dessiner. La prestance et l’élégance de son allure dépendront des quelques cailloux qu’il aura su éjecter de ses babouches. Sinon nous continuerons à regarder notre film préféré sur l’écran noir de nos nuits blanches et qui a pour titre : « Ndoumbelane ».