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La Pandémie Du Covid-19 Et Les Risques De Pénurie Du Riz Et D’augmentation Des Prix Au Sénégal

La Pandémie Du Covid-19 Et Les Risques De Pénurie Du Riz Et D’augmentation Des Prix Au Sénégal

Le riz est l’aliment de base pour plus de la moitié de la population mondiale. La production mondiale de riz, qui provient à 90% d’Asie, tourne aujourd’hui autour de 510 millions de tonnes par an, dont seulement 8% sont échangés sur le marché mondial. Il faut noter que les autres céréales sont à des niveaux d’échange plus confortables (22% pour le blé et 18% pour le maïs). Source : (marché mondial des céréales). Au Sénégal, le riz est devenu la première denrée de première nécessité, avec une consommation moyenne par tête/habitant/an qui est estimée à 80kg, plaçant ainsi notre pays dans le premier modèle de consommation dit asiatique, avec une moyenne de 80kg./hab. et plus, regroupant les pays comme la Chine (90kg/hab.), la Birmanie, l’Indonésie, l’Inde, etc. Le deuxième modèle de consommation est dit subtropical1, entre 40 et 70 kg./hab./an. Le troisième et dernier modèle de consommation est dit occidental, avec moins de 10kg/hab./an et regroupant les pays comme les Usa, l’Italie, la France, l’Espagne, etc. Ces trois modèles existants donnent une consommation moyenne mondiale estimée à 40 kg./hab./an – (Source : Fao, 2014). Pour couvrir les besoins nationaux estimés à 1 million 350 mille T, le Sénégal est contraint de recourir annuellement à des importations de riz toujours importantes, de près de 1,3 million de tonnes de riz blanc (moyenne des cinq dernières années – Source : Fao et Usda, 2020). Ces importations coûteraient plus de 250 milliards de F Cfa par an. Notons bien que le Sénégal a la particularité d’importer de la brisure, représentant près de 25% des parts du marché mondial du riz brisé. Ce niveau d’importation de riz confirme la stagnation de la production nationale ces cinq dernières années, autour de 600 mille tonnes de paddy, soit près de 400 mille T pour la Vallée du fleuve Sénégal et 200 mille T pour le reste du Sénégal. Cette production de riz paddy, en équivalent riz blanc, donnerait près de 350 mille tonnes, soit un taux de couverture de 26% des besoins nationaux en riz. Cette production nationale de 600 mille tonnes de paddy constitue une avancée par rapport à la situation 2012 où elle était estimée environ à 300 mille tonnes (vallée du Fleuve du Sénégal  : 250 mille tonnes et reste du Sénégal : 50 mille tonnes) – Source : Opf et Ciriz. Malgré ces fortes avancées notées, ce niveau de la production du riz sénégalais est très loin des chiffres de plus d’un million de tonnes de paddy avancés par les services du Maer. En effet, certains observateurs avertis, constatant des problèmes à michemin, avaient attiré l’attention du gouvernement sur les fortes tendances de non-atteinte des objectifs d’autosuffisance en riz fixés pour 2017 et la nécessité de faire l’évaluation à mi-parcours du Pnar II, afin de pouvoir corriger, si nécessaire, certaines options comme la double culture dans la vallée du Fleuve Sénégal (Vfs), entre autres. Aujourd’hui, le niveau moyen des importations de 1 million 300 mille tonnes tranche les questionnements et le débat sur certaines statistiques de production «gonflées». Cette dépendance du Sénégal au marché international pour fournir du riz, première denrée de nécessité, à ses populations, met le pays dans une situation d’insécurité et d’instabilité alimentaires. En effet, ce marché international du riz est en fait un marché résiduel, de compensation des excédents et des déficits nationaux, où seulement 8% de la production mondiale sont échangés. En plus de ce caractère résiduel, ce marché international connaît aujourd’hui, avec ce nouveau contexte de la pandémie du Covid-19, un début de grosses perturbations, j’allais même dire une situation de pénurie et de hausse importante des prix. En effet, depuis la fin du mois de mars dernier et début du mois d’avril, face aux différentes commandes des pays importateurs, certains pays exportateurs (Vietnam et Inde) ont annoncé l’arrêt provisoire de leurs exportations, le temps de voir l’état de leurs stocks disponibles pour leurs marchés intérieurs, et en une journée, les cours mondiaux ont augmenté de plus de 11%. Au 30 avril 2020, les prix à l’exportation de la catégorie de riz thaï A1 super (le riz brisé de référence du Sénégal) sont à 425 dollars (US$/t Fob), soit une augmentation de plus 75 dollars la tonne par rapport à la moyenne des dernières années, correspondant à près de 45 mille F la tonne, sans frêt, assurance et marge de l’importateur – (Source : Observatoire du marché mondial du riz). Le sac de 50 kg de riz brisé importé pourrait revenir au consommateur sénégalais à plus de 20 mille F, si cette tendance continue. Nombreux sont les observateurs qui craignent qu’on arrive à la situation de crise de 2008 où les prix mondiaux ont doublé (500 F le kg de riz brisé), en plus des risques presque certains de pénurie de riz dans le marché mondial. Avec son potentiel irrigable de 500 mille ha : 300 mille ha pour les superficies en maîtrise totale et partielle (dont 240 mille ha dans la vallée du Fleuve Sénégal), 120 mille ha pour les cultures de décrue et 80 mille ha pour les superficies en bas-fonds et mangroves, le Sénégal peut renverser cette tendance dangereuse et très risquée de dépendance aux importations de riz et

devenir autosuffisant au moins à 70% en riz à l’horizon 2025. A très court terme, le Sénégal a intérêt à se mobiliser, tout de suite et maintenant, et lancer une campagne d’hivernage de très grande envergure pour produire davantage du riz cette année, mais aussi du mil et du maïs pour pouvoir nourrir ses populations en toute sécurité dans ce contexte de pandémie. En effet, le Sénégal se doit de se donner les moyens d’éviter une situation de crise alimentaire, comme en 2008, et dérouler ainsi un programme de riposte à plusieurs niveaux et sur plusieurs points, comme ci après : une campagne de concertation et de sensibilisation des acteurs rizicoles sur les enjeux et défis de la période, pour que ces derniers fassent 80 mille hectares de riz irrigué en hivernage (Vfs = 70 mille ha et 10 mille ha dans la zone de l’Anambé) et autres 100 mille ha de riz dans les écologies de riziculture pluviale les plus favorables ; une campagne d’hivernage de mil sur au moins un million d’hectares et 300 mille ha de maïs ; Ces rencontres de concertation sont urgentes et nécessaires dans la Vfs pour amener les producteurs à aller nombreux à la prochaine campagne agricole et atteindre des niveaux record d’emblavure de 70 mille ha en campagne d’hivernage. En effet, cette campagne de contre saison chaude (Csc) a atteint des niveaux record de près de 50 mille ha (source Saed) et l’on a constaté, depuis 2014, quand les emblavures de Csc atteignent 35 mille ha, les emblavures de la campagne d’hivernage de la même année baissent et se situent à moins de 30 mille ha, comme le tableau ci-après le montre : Source : Rapports Saed La lecture de ce tableau montre que la campagne d’hivernage, censée être la grande saison dans tous les pays, est moins importante en termes de superficies emblavées, ce qui constitue un grand paradoxe. Aujourd’hui, il est possible de relever le défi, si le gouvernement accompagne cette campagne de communication par l’annonce de mesures d’appui, d’accompagnement et d’incitation des acteurs. Pour relever ce défi de la sécurité alimentaire par une production nationale à grande échelle afin de satisfaire l’autosuffisance en riz du Sénégal, au moins ces pistes d’amélioration semblent pertinentes : l’amélioration des performances de la filière par l’accroissement de la production et de la productivité dans les différents maillons de la chaîne de valeurs riz (durabilité de la compétitivité de la filière) ; la coordination et la planification des relations au sein et en dehors de l’interprofession, en pérennisant l’esprit chaîne de valeurs, le renforcement des capacités organisationnelles du Ciriz et de ses différents collèges ; le renforcement du nouveau mécanisme de régulation qui privilégie la contractualisation sous prix administrés amont/aval : producteurs/riziers industriels ; importateurs/distributeurs ; la formation et le renforcement des capacités techniques des agriculteurs. Ces pistes d’amélioration pourraient se traduire par des mesures d’appui concrètes comme ci-après : Subvention à hauteur de 75% les engrais (Urée et Npk) et des produits phytosanitaires, durant cette campagne d’hivernage à venir ; Distribution de 100 nouveaux groupes motopompes  dans la Vfs pour contribuer à l’augmentation des superficies à mettre en valeur ; Subvention de l’engrais à hauteur de 50% durant la campagne de Csc 2021; Réfection de 10 mille ha parmi les aménagements hydro-agricoles existants ; Subvention des semences (riz, mil et maïs) et du matériel agricole (batteuses et décortiqueuses à riz et à mil) à hauteur de 50% ; Financement de la production, de la transformation et de la commercialisation à des taux d’intérêt ne dépassant pas 3% la campagne ; Augmentation des capacités de stockage du paddy et du riz blanc ; Augmentation des moyens financiers et matériels des institutions d’appui conseil, comme la Saed, la Sodagri et l’Ancar, etc. Partout dans le monde, d’Asie en Amérique, en passant par l’Europe, pour développer les filières rizicoles et assurer la sécurité alimentaire, les producteurs de riz sont largement soutenus et protégés par les pouvoirs publics. En effet, le succès de la révolution verte n’a été possible en Asie et en Amérique

Latine que par l’utilisation d’intrants, de l’irrigation et la promotion de nouvelles variétés facilitées par de nombreux fonds publics, sous forme d’aides et de subventions. De même, en Europe, les producteurs de riz reçoivent des millions d’euros sous forme de subventions : 1 000 euros par hectare en Italie et en Espagne, 800 euros par hectare en Camargue (France). Ainsi, ces soutiens et incitations à la filière riz au Sénégal doivent être considérés comme des investissements hautement productifs et justifiés. Tous ces soutiens et incitations pourraient produire de nombreux effets et avantages positifs pour renforcer la sécurité alimentaire nationale par la production de 730 mille tonnes de paddy. Sans être exhaustif, cette production de paddy va permettre au Sénégal : De fournir 400 mille tonnes en équivalant riz blanc pouvant assurer quatre (4) mois d’alimentation, en plus de la contribution potentielle des 200 mille T de riz blanc de la Ccsc  pour deux (2) mois, soit six (6) mois équivalant à une couverture de 50% des besoins nationaux ; D’éviter les risques d’insécurité alimentaire des populations et une pénurie de riz ; De maintenir stables les prix du riz blanc et d’avoir le sac de riz blanc (50 kg) à 15 mille F Cfa au lieu de plus de 20 mille F; D’avoir plus de 63 milliards de F Cfa de revenus pour les riziculteurs sénégalais en une campagne et de créer plus de 150 mille emplois  en une seule campagne agricole ; de fournir près 600 mille tonnes de paille de riz et plus de 150 mille tonnes de son, pouvant contribuer à 60% à l’alimentation de 900 mille bovins adultes (Unité bétail tropical) pendant 4 mois ; D’avoir une meilleure nutrition des personnes par un riz blanc sénégalais ayant 9% de taux de protéine contre 2% pour le riz importé. Avec cette pandémie du Covid19, le Séngal a intérêt à mobiliser des moyens financiers substantiels, tout de suite et maintenant, afin de créer les meilleures conditions possibles pour favoriser une grande campagne d’hivernage de riz et de céréales dans tout le pays, permettant ainsi d’anticiper et d’éviter les effets négatifs certains du marché mondial du riz (pénurie et augmentation des prix) et de pouvoir nourrir en toute sécurité le pays, au grand bonheur des consommateurs nationaux et dans l’intérêt de la Nation entière

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