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L’etat Actuel De La Législation Sénégalaise En Cas D’urgence

L’etat Actuel De La Législation Sénégalaise En Cas D’urgence

La lutte contre la pandémie du Covid-19 sur le plan législatif, a permis de s’interroger sur l’ordre juridique sénégalais notamment sur la législation consacrée à l’état d’urgence. À la suite des polémiques sur la votation de la loi d’habilitation du 1er avril 2020 pour la lutte contre la pandémie, la question a suscité beaucoup de réflexions sur le plan légal. La constitution sénégalaise, fait état de l’État d’urgence qu’elle consacre à son article 69 qui dispose : « l’état de siège, comme l’état d’urgence, est décrété par le Président de la République. L’Assemblée nationale se réunit alors de plein droit, si elle n’est en session…Les modalités d’application de l’état de siège et de l’état d’urgence sont déterminées par la loi »

Cependant, la loi du 29 Avril 1969 rappelle que l’Etat d’urgence constitue un régime de l’égalité destiné, en cas de période de crise intérieure ou de tension extérieure grave, à mettre à la disposition du gouvernement les pouvoirs nécessaires au maintien de l’ordre.

Cette disposition met l’accent sur le pouvoir de l’exécutif à prendre toute disposition pour prendre des mesures pouvant maintenir l’ordre public avec des restrictions de la liberté individuelle. Toutefois la restriction des libertés reste un moyen d’intervention pour répondre aux menaces de la sécurité publique mais l’urgence peut sans doute requérir la nécessité d’intervenir au niveau légal avec l’adoption de nouvelles normes. Voilà une situation dans laquelle s’est retrouvé le Sénégal pendant la pandémie du Covid-19.

Interprétation normative de l’article 77 Cst

Le président de la République son excellence Maître Macky Sall a jugé nécessaire de faire recours à la loi d’habilitation à la suite du décret proclamant l’État d’urgence. En effet l’article 77 de la constitution précise que « L’Assemblée nationale peut habiliter par une loi le Président de la République à prendre des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. Dans les limites de temps et de compétence fixées par la loi d’habilitation, le Président de la République prend des ordonnances qui entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n’est pas déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale avant la date fixée par la loi d’habilitation.

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L’Assemblée nationale peut les amender à l’occasion du vote de la loi de ratification ».

A vrai dire l’interprétation littérale de , montre que ce dernier ne fait état d’aucune situation d’urgence. Tout ce qui ressort de cette norme, c’est l’habilitation du président de la république par l’Assemblée nationale pour légiférer dans le domaine de la loi. A la lumière de cette disposition, nous pouvons dès lors identifier un silence de la loi sur les circonstances d’adoption de la loi d’habilitation au Sénégal. De plus, étant donné que la constitution ne mentionne pas explicitement les circonstances dans lesquelles cette loi peut être votée, il faut reconnaître que rien n’empêche le gouvernement de recourir à cette loi en cas d’urgence.

Portée de la loi d’habilitation

Toutefois, intéressons-nous à la loi d’habilitation votée par l’Assemblée nationale pour habiliter le président à légiférer par ordonnance pendant trois mois dans le but de lutter contre cette maladie. Cette loi couvre plusieurs domaines en l’occurrence économique, budgétaire, financière, juridique, sanitaire et sécuritaire. Partant de l’idée que le domaine sanitaire est lié à presque tous les autres domaines, cette loi d’habilitation cherche à intervenir dans tous les secteurs pouvant être liés à la sphère sanitaire même si elle est vue comme étant très étendue.

L’aspect positif avec la votation d’une telle loi, est que le gouvernement n’aura plus besoin de soumettre le projet de loi à l’assemblée nationale à chaque fois qu’il est question d’urgence. Il pourra ainsi faire l’économie des débats parlementaires et adopter dans l’urgence une loi avec tous ses effets immédiats. Il faut dire que d’adoption d’une loi obéit à une procédure spécifique et assez longue lorsqu’elle passe devant le parlement.

De l’autre côté, la votation de la loi d’habilitation soustrait les parlementaires d’une partie de leur compétence dans la mesure où ils n’auront plus la possibilité de faire valoir leur vote mais aussi leur mission de contrôle de l’exécutif qui se trouve dès lors limitée. Cela n’exclut pas le fait que les ordonnances prises par le gouvernement seront ratifiées par l’Assemblée nationale.

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Les débats autour de cette loi, doivent être l’occasion pour le législateur sénégalais, de se pencher sur le cadre légal notamment dans les situations d’urgence.

Approche comparative de la législation d’urgence

Il serait intéressant de réfléchir sur comment réglementer les situations d’urgence au niveau légal ? Comment continuer à préserver les préceptes démocratiques dans la transparence en cas d’urgence ?

Pour apporter des éléments de réponse à ces différentes questions, je propose de s’intéresser aux lois d’urgences adoptées dans certains pays dans la perspective de lutter contre cette catastrophe sanitaire. Le gouvernement français a fait recours à la loi organique d’urgence pour faire face à cette épidémie de Covid-19 avec une procédure spéciale qui suspend les délais prévus par la procédure de question prioritaire de constitutionnalité en raison de l’urgence. Il est assorti de l’habilitation du gouvernement pour prendre des mesures provisoires dans des domaines clairement définis afin de répondre à la situation de confinement.

En suisse, les « lois urgentes » prévues dans la constitution ont permis de prendre des mesures exceptionnelles pour écarter cette pandémie mettant en péril la santé de la population. Il s’agit des lois avec une durée de validité limitée ou supérieure à une année. En effet, l’ordre juridique Suisse prévoit des lois fédérales urgentes avec une base constitutionnelle (art. 165 al. 2 Cst.). Il s’agit de lois avec une durée de validité limitée ou supérieure à un an. Il s’agit de lois avec une durée de validité limitée ou supérieure à un an.  La validité de cette loi doit être limitée dans le temps. Selon le Hottelier (2005) le référendum est facultatif lorsque la loi est conforme à la Constitution, obligatoire dans le cas contraire. Le recours à la clause d’urgence a permis de traiter rapidement des thèmes délicats. Au niveau de la procédure parlementaire, ce qu’on peut noter avec ces lois frappées d’une clause d’urgence c’est que qu’elle nécessite l’approbation du parlement si elle est soumise au référendum. Il y a lieu de faire la distinction entre les lois fédérales urgentes qui reposent sur une base constitutionnelle et qui peuvent être soumises au référendum facultatif et les autres lois dépourvues de base constitutionnelle sont soumises au référendum obligatoire. Il y a néanmoins lieu de rappeler que le caractère du référendum dépendra de la durée de validité de la loi en cause. Comparer à la loi d’habilitation sénégalaise, l’élément remarquable avec cette législation d’urgence en Suisse, c’est qu’elle maintient l’activité parlementaire en lui laissant la possibilité d’intervenir dans le vote des lois même en situation d’urgence. Certes nous parlons de deux systèmes étatiques différents (État fédéral et État unitaire décentralisé) mais la législation d’urgence peut être adaptée selon le système du pays. Une procédure spéciale d’urgence peut être adoptée par les autorités compétentes dans un délai restreint.

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Sources : 

Art 165 législation d’urgence : Etat d’urgence 2019 agir maintenant source détaillée du dictionnaire historique de la Suisse. Récupéré sur le site :

https://etatdurgence.ch/la-suisse/art-165-legislation-d-urgence/

Clause d’urgence : Auteure/Auteur: Michel Hottelier, in: Dictionnaire historique de la Suisse (DHS), version du 15.07.2005.

Repéré à: https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/010092/2005-07-15/,

Constitution française du 4 octobre 1958 récupéré sur le site

http://www.assemblee-nationale.fr/connaissance/constitution.asp

Constitution fédérale de la confédération suisse du 18 avril 1999 (Etat le 1er janvier 2020) repéré à https://www.admin.ch/opc/fr/classified- compilation/19995395/index.html

Loi SENEGALAISE n°1961/22 du 10 mars 1961 portant ratification des ordonnances prises en vertu de la Loi d’habilitation n°60-043 du 20 août 1960

Repéré à http://www.dri.gouv.sn/%C3%A9tiquettes/loi-dhabilitation

Loi organique du 30 Mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 repéré à

https://www.vie-publique.fr/loi/273943-loi-organique-30-mars-2020-urgence- faire-face-lepidemie-de-covid-19

Loi d’urgence du 23 mars 2020 : France, faire face à l’épidémie de Covid-19

https://www.vie-publique.fr/loi/273942-loi-durgence-pour-faire-face- lepidemie-de-covid-19







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