Dans un pays où on se pâme de notre religiosité, de notre hospitalité légendaire et d’un humanisme que les chefs religieux nous auraient légué, ce qui s’est passé à Malika et à Diamaguène est une catastrophe. Refuser à des concitoyens décédés d’avoir un enterrement digne après avoir été terrassés par une maladie, qui n’a pas encore dit son dernier mot, renseigne de l’affaissement de notre commun vouloir de vivre-ensemble.
La coupe est pleine. Les responsabilités doivent être situées pour que de tels agissements ne se reproduisent plus. Car le Covid-19 n’a pas encore épuisé toutes ses munitions. La guerre est toujours en cours. Il est vrai que les autorités sanitaires ont trop mis l’accent sur la prévention, sur les gestes barrières.
Des choses qui sont incontestablement nécessaires pour la lutte contre le Covid-19. Mais force est de constater qu’en plus de tuer, le coronavirus stigmatise. Et des informations distillées çà et là dans les réseaux sociaux rajoutent à la confusion. Certains soutiennent que le virus est contagieux même après la mort. Sans dédouaner les populations qui se sont tristement illustrées, il faut dire que la lanterne des Sénégalais n’a pas été bien éclairée sur cette question. Face à la prolifération des fausses informations, les scientifiques avaient l’obligation de communiquer aux Sénégalais qui n’ont pas tous le même niveau de compréhension des informations reçues.
N’oublions pas que nous sommes dans un pays où l’instruction est encore un luxe. Le gouvernement a eu tort de ne pas avoir bien insisté sur l’inexistence de danger liée aux enterrements des morts du Covid-19. Certaines personnes du troisième âgé, interrogées il y a quelques jours dans la banlieue, ont fait part de leurs inquiétudes. Pas de mourir du coronavirus, mais de ne pas avoir droit à un enterrement digne de ce nom. «C’est terrible parce que si tu meurs du Covid-19, tu seras incinéré», soutenait un sexagénaire, il y a quelques semaines. Donc sur ce sujet, l’information n’a pas été audible. Ce qui ne disculpe pas pour autant des populations de Bambey, de Malika ou de Diamaguène qui se sont montrées indignes face à l’épreuve. Car c’est dans l’épreuve qu’on reconnaît les grandes nations et par ricochet les grands peuples. Il ne faut pas qu’au lendemain de cette pandémie, toutes nos certitudes soient à terre.
Les notions de «Ngor», «Suturà» ne doivent pas être de vains mots. Et le contexte actuel est bien propice pour les revitaliser. Dans la langue Bantu, il y a une notion ‘’Ubuntu’’ qui est reprise maintenant par tous les humanistes du monde. Selon l’archevêque sud-africain, Desmond Tutu, quelqu’un d’Ubuntu est ouvert et disponible pour les autres, car il a conscience d’appartenir à quelque chose de plus grand». On ne peut pas revenir en arrière, mais on peut aller de l’avant.
Donc Ubuntu !