Prévu fin juillet, le hajj est l’un des plus grands rassemblements au monde. En 2019, le pèlerinage, que tout fidèle musulman doit accomplir au moins une fois dans sa vie s’il en a les moyens, a attiré quelque 2,5 millions de fidèles.
Aujourd’hui, des milliers de musulmans à travers le monde attendent de savoir s’ils pourront l’effectuer cette année. Les autorités religieuses de chaque pays sont toujours dans l’attente de précisions de la part de l’Arabie saoudite.
Le ministre tunisien des Affaires religieuses Ahmed Adhoum a ainsi déclaré ce 13 juin à l’agence tunisienne TAP attendre des indications des autorités saoudiennes. Son homologue algérien, Youcef Belmehdi, avait dit la même chose quelques jours auparavant.
Pèlerins en stand-by
Au Maroc aussi, les autorités n’ont pas encore donné d’indications aux potentiels pèlerins. Cette année, ils étaient environ 34.000 à avoir prévu de voyager vers l’Arabie saoudite.
Un voyagiste casablancais spécialisé dans le tourisme religieux confie attendre avec empressement des clarifications : il a déjà dû gérer l’annulation de la omra, plus petit pèlerinage et qui a été suspendu en mars, et il est pressé par les clients qui se demandent s’ils doivent penser à demander des remboursements –la plupart ayant déjà payé les frais relatifs au hajj depuis plusieurs mois. Même situation en Égypte, en Turquie ou encore au Liban.
Une affluence telle que celle de 2019 semble exclue cette année : Riyad a demandé dès fin mars aux pays musulmans, chargés de sélectionner les pèlerins candidats, de reporter leurs préparatifs.
« La décision sera bientôt prise et annoncée », assure de son côté un responsable saoudien.
L’Indonésie, pays musulman le plus peuplé, a pris l’« amère et difficile » décision de renoncer au hajj, tout comme la Malaisie et Singapour. Le Sénégal a dit, lui, suspendre « toutes les formalités pour le voyage » des pèlerins.
En France, les fidèles ont été appelés par le Conseil français du culte musulman à « différer» leur pèlerinage à 2021.
Risque de contagion
En raison de la promiscuité entre pèlerins, le hajj peut devenir un énorme vecteur de contagion de la maladie Covid-19.
Le pouvoir saoudien sait que la bonne gestion du hajj qui lui est dévolue de par son rôle de gardien des lieux saints de l’islam est une puissante source de légitimité politique, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur du royaume.
ais cela engage aussi sa responsabilité. Déjà, des incidents mortels, dont une bousculade ayant fait en 2015 quelque 2 300 morts, avaient suscité des critiques sur la gestion du hajj par Riyad.
« Le retard dans l’annonce de sa décision montre que (l’Arabie saoudite) pèse les conséquences politiques de l’annulation du hajj ou de la réduction de son ampleur», estime Umar Karim, chercheur au Royal United Services Institute de Londres.
Une décision politique
Le royaume « gagne du temps», juge le responsable d’un pays d’Asie du sud.
« Si les Saoudiens disent, à la dernière minute, être prêts pour le hajj, de nombreux pays ne seront pas en mesure d’y participer», remarque-t-il.
De nombreux vols internationaux étant suspendus, un hajj n’accueillant que les personnes habitant en Arabie saoudite est un scénario possible, ajoute-t-il.
Avec 120.000 cas, dont plus de 1000 décès déclarés officiellement, le pays cherche toujours à contenir le nouveau coronavirus. Les autorités ont ainsi renforcé les mesures de confinement à Jeddah (ouest), porte d’entrée de la Mecque.