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Les PlÉbÉiens

Les PlÉbÉiens

En 64, Rome fut ravagée par un terrible incendie. La légende veut que l’Empereur Néron, qui s’est toujours pris pour un artiste de grand talent, déclame des vers pendant que Rome était consumée par des flammes qui feront des milliers de morts. Chez nous, tandis le coronavirus consume notre économie et fait des ravages dans les hôpitaux, des hommes politiques déclament des insanités.

L’écart entre la gravité de la situation qui nous attend à la rentrée et l’insouciance ambiante est pire que le corona. «Je n’ai que des larmes, du sang et de la sueur à offrir», disait Churchill avant la veille de l’entrée de son pays dans la deuxième Guerre mondiale.

 En dehors du sang, c’est tout ce que le Président Macky Sall pourra promettre au pays dans la phase post-Covid-19. Et plus tôt il le dira aux Sénégalais mieux ça vaudra ! Le président de la République a déjà mobilisé le gouvernement pour «six mois de travail intensif». Il faut aussi qu’il informe le pays que les 6 prochains mois seront difficiles et que chacun devrait redoubler d’efforts.

Les peuples, pour se mobiliser, exigent que l’exemple vienne de ceux d’en haut, ceux qu’on appelait les patriciens dans la Rome antique. C’est pourquoi, dans ce contexte où on compte chaque jour les morts du corona, où l’économie est à genoux avec une perte record de croissance, cette arme de distraction massive qu’est la diffusion d’audios d’insultes est purement scandaleuse. Ces excès de Plébéiens qui se sont retrouvés par «inadvertance républicaine», pour parler comme Me Mbaye Jacques Diop, chez les patriciens de la République, déshonorent la République qui, on l’oublie souvent, est une affaire d’élite, contrairement à la démocratie.

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Ces excès auraient pu, auraient dû être «insignifiants», n’eut été le contexte de crise nationale, si «l’heure n’était pas grave» comme avait dit le président de la République en proclamant l’Etat d’urgence. Nous avons besoin d’un autre Etat d’urgence pour sauver le cœur de la République du cannibalisme de la désacralisation des institutions, de la «banalisation du mal», de l’insulte et la vulgarité dans la politique, dans la culture, sur les réseaux sociaux, sur les forums de discussions.

Malheureusement, le mauvais exemple vient du sommet quand Wade insulte Macky, quand des fractions de l’APR s’injurient par médias interposés, quand de façon nihiliste on refuse tout mérite individuel pour toujours renvoyer la personne à ses origines, à la condition socio-économique de ses parents ou de ses grands-parents, en oubliant que la République est le système qui a aboli le hasard de la naissance pour le remplacer par le mérite. Le mal est profond et le meilleur indicateur de ce mal qui ronge notre société est internet où les gens avancent masqués pour montrer leur vrai visage et leurs vrais sentiments.

Ainsi Akon, probablement, l’un des plus grands Sénégalais qui trônent sur le monde est réduit à «teug dawoul bar», Youssou Ndour, une autre fierté nationale qui a porté si haut les couleurs du pays, est réduit à sa caste, Babacar Ngom à son poulailler de départ.

Dans notre pays, on aime détester ceux qui ont réussi pour justifier son échec, on aime banaliser ceux que le monde nous envie. C’est notre différence fondamentale avec les Américains qui adorent ceux qui ont réussi, qu’ils considèrent comme des héros, qu’ils sacralisent. C’est juste une question de philosophie. Une question de mentalité. Et aucun pays n’a jamais émergé dans la haine de soi. Cette haine de soi qui a été un terreau fertile à l’esclavage.

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Les Américains ont émergé en vénérant et en s’inspirant des succès de Carnegie, Vanderbilt et autre Rockefeller. Aujourd’hui, ils adorent Steve Jobs, Elon Musk et les autres. Chez nous, la réussite est toujours une présomption de culpabilité aussi bien pour ceux qui sont dans la poussière du Colisée que ceux qui sont dans le marbre du Sénat.







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