L’agro-business est l’avenir, pour faire de notre secteur agricole désuet, un moteur-clé de croissance. La pertinence du projet envisagé par le patron de Sédima, eu égard à ses ambitions, est donc avérée. Malheureusement, nous ratons en général l’entame de telles initiatives du fait d’études préalables négligées.
Pour le paysan sérère fier, jusqu’à un passé récent, il n’est nulle richesse qu’un grand troupeau de bétail ne servant qu’à l’ostentation et des terres au nom de la famille morcelées en autant de petits lopins peu productifs qu’il y a de membres dans la famille susceptibles de les ensemencer d’années en années. Cette fierté ancestrale est fortement exacerbée par toute perception de spoliation par ces populations qui se voient ainsi dénudées et dépouillées du peu qu’il leur reste de dignité et d’orgueil. Cette fierté ne résiste toutefois pas à la restauration d’une dignité bafouée, ensuite d’intérêts matériels savamment négociés et de perspectives économiques meilleures.
Je pense qu’une étude d’impact environnemental et social sérieuse aurait pu anticiper ces difficultés et leur trouver les consensus nécessaires pour ménager les intérêts et les susceptibles de toutes les parties prenantes. Quoi de mieux que d’interroger préalablement les paysans sur leur perception d’un tel projet ? Convaincre les plus sceptiques sans leur donner l’impression qu’on cherche à les acheter, revient avant tout à chercher à comprendre leur sociologie et les aspects culturels utiles pour renseigner sur une bonne aide à la décision.
Il ne s’agit pas juste d’avoir la légalité de son côté, car une mauvaise perception peut tuer un projet grandiose dans l’œuf. Il fallait surtout une co-construction du projet, avec certes l’autorité publique notamment locale, mais surtout avec les populations impactées.
Par la perspective de créations d’emplois pour lesquels ces populations seraient prioritaires, de dédommagements concertés, de désaffectations-réaffectations de terres discutées et d’une prise en compte de la responsabilité environnementale et sociétale par l’investisseur, certainement la mise en œuvre aurait été démarrée avec les populations et pour leur grand bénéfice.
En toutes choses, il vaut mieux convaincre qu’on a raison, plutôt que de contraindre parce qu’on a raison !
Mamadou Mbodji DIOUF
MBA Paris-Dauphine/IAE Paris Sorbonne
Membre du Bureau Politique du Parti socialiste