«Il n’y a pas plus important jour auprès d’Allah, où l’œuvre est plus bénéfique que ces dix jours. On lui dit : même pas le jihâd ô Messager d’Allah ? Il dit : même pas le jihâd sur le sentier d’Allah excepté pour celui qui est sorti biens et âme et qui n’est revenu avec rien de tout cela».
Hadith raconté par Ibn ‘Abbâs
Cher frère, chère sœur
Il est venu le temps de la sacralisation, même si géographiquement nous sommes éloignés des Miqâts. C’est quoi la Miqât, si ce n’est un rendez-vous de lieu et de temps qui nous connecte à l’âme des monuments sacrés ? Mais c’est surtout une «re-naissance» spirituelle et un retour au bercail de l’âme universelle qui ne se distrait jamais de sa sacralité, par conséquent de sa soumission à Allah. Aujourd’hui, alors que pointe le croissant, cette fine lumière qui nous guide vers les meilleurs jours de l’année, les 10 premiers jours de Dhul Hijja, nous avons tous l’esprit tendu vers les Lieux saints de l’islam. Nos cœurs palpitent au rythme de la Talbiya et notre corps, pieds et cap, se meut à la cadence de la marche vers l’apaisement, dans ce rite que nous avons tant de fois accompli, suant et heureux que le cœur libère ses larmes, ému par cette grâce qui nous est donnée.
Aujourd’hui, sous la contrainte de Covid-19, Allah nous éprouve autrement, mais l’appel demeure actuel et pressant. Y répondrons-nous ? Saurons-nous transcender les lieux et le temps pour nous projeter dans le temple de chair que nous sommes, que notre cœur est censé être ? Si oui, drapons-nous de notre habit sacral, invisible, mais perceptible dans l’élégance et la pureté de notre langage et action, car à partir de ce moment, nous sommes conscients que nous répondons à l’appel, par notre Talbiya intime ! Notre connection avec la pierre noire et transparente du temple de notre cœur pose alors un voile sur le monde de nos désirs et de nos tares. Et c’est pour nous soustraire de la licence, de la perversité et des querelles comme nous y invite le Seigneur dans le Coran :. Parce que tout simplement nous avons saisi que le Hajj temporel est une invitation au périple de l’âme qui dure le temps de nos souffles, et non pas seulement celui de notre package, un bout de temps.
Si nous avons compris cela, et nous l’avons compris j’espère, nous cesserons de nous encombrer de ces clinquants inutiles et même corrosifs qui semblent être nos provisions. Alors qu’il n’en est rien ! Et répondant à notre Seigneur, nous prenons la meilleure provision, la piété : que nous avons choisi une conversion définitive en pèlerin de l’âme, c’est-à-dire en homme et femme de bien, n’ayant d’autre désir que l’agrément d’Allah.
Qu’allons-nous exposer devant notre hôte ? Quelles œuvres de bien, nous autres pèlerins de l’âme, allons-nous présenter comme preuves de notre fidélité à la talbiya pendant ces dix jours ?
Ibn Hajar nous indique la voie en disant : «La cause de la distinction de ces dix jours sur tous les autres, réside dans le fait qu’ils totalisent les matrices de toutes les dévotions. Ce sont : la prière canonique, le jeun, l’aumône, et le Hajj. Et ceci ne converge que pendant cette période.»
La voie nous est ouverte dans cette «re-conversion» au Bien, de multiplier les actes de dévotion à bénéfice personnel et ceux qui dépassent notre personne pour embrasser les cercles les plus intimes et les plus éloignés. Les dévotions personnelles nous les connaissons : les actes surérogatoires comme la prière, le dhikr, le jeûne, etc. Quant aux dévotions dont le bénéfice est partagé avec d’autres, les plus recommandées, ce sont les actes de charité, d’hospitalité, de bienveillance et de bienfaisance…
Cher frère, chère sœur
La Covid-19 peut confiner nos corps, restreindre nos déplacements, mais elle ne saurait emprisonner nos cœurs ni empêcher l’excursion des âmes dans les jardins d’amour de Dieu. Mieux, comme le dit si bien le Coran : «O les croyants ! […] Il se peut que vous ayez de l’aversion pour une chose où Allah a déposé un grand bien», Les femmes, verset 19.
Oui ! Beaucoup d’entre nous ont épargné une partie de l’économie familiale pour répondre à l’invitation de Dieu. Et Le voilà Qui nous assigne à résidence, tout en étant avec Lui dans le compagnonnage des bienfaisants à la conscience pleine de Dieu : e Les abeilles. C’est vrai, nous sommes étreints par l’émotion de la nostalgie des Lieux saints, mais nous n’avons rien perdu, car le gain qu’Il nous a promis est infiniment plus important que celui d’un pèlerinage agréé. Nous avons la chance d’obtenir un gain supérieur à celui du martyre comme le Prophète (Psl) nous l’enseigne dans ce hadith que nous avons cité, rapporté par Ibn Abbas et recensé par Abu Dawûd.
Nous voici Seigneur, nous voici, multipliant le «Tahlîl [lâ ilâha illal-Lâh], le takbîr [Allahu Akbar, Allahu akbar kabîra] et le tahmîd [wa lillahil hamd]. Subhânal-Lâh, subhâhanal-Lâh al-‘Azîm wa bi hamdihi subhanal-Lâh».Cher frère, chère sœur qu’Allah vous bénisse, bénisse nos familles, nos guides spirituels et temporels, qu’Il bénisse le Sénégal !
Labbayka Allahumma labbayk !
Abdoul Azize KEBE
Délégué général au pèlerinage
aux Lieux Saints de l’Islam