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Babacar, Je Ne Sais Comment Parler De Toi

 

 

L’élégance républicaine t’avait éloigné des pages de Sud. Parce que devenu régulateur des médias, tu avais choisi de ne jamais être juge et arbitre. Même si la publication phare du groupe ne t’avait jamais été étrangère, ni dans sa gestion, ni du fait de l’appui-conseil éditorial que tu apportais aux plus jeunes, tu avais pris le parti de ne jamais prendre parti pour la publication dont tu proposas le titre, un jour de 1985.

Le petit cercle d’amis et de confrères des quatrième, sixième et septième promotion du CESTI réunis dans ton salon à HAMO 1 avait tellement rêvé de panafricanisme et de libération et/liberté pour les peuples du Sud, que ta proposition de nom pour ce que nous allions créer, avait tout de suite obtenu l’adhésion des quatre autres.

Un jour, tu parlas de Sud comme d’une « galaxie éclatée » parce que ceux qui étaient là aux premières heures et ceux qui, plus tard rejoignirent les fondateurs avaient pour certains, suivi d’autres pistes et initiatives, sans jamais rompre les amarres avec la famille.

Sous ton influence, ton entregent, ton portefeuille relationnel qui débordait largement les frontières de notre pays, Sud avait réussi une initiative inédite. Tu t’es souvent plu à le dire dans des moments de plaisanterie : ce qui est devenu aujourd’hui le Groupe Multimédia Sud Communication était au départ un produit-passe temps pour de jeunes journalistes ayant chacun un port d’attache professionnel.

De ton poste à ENDA, tu coordonnais déjà le contenu du premier numéro de Sud Magazine consacré à l’éminent Professeur Cheikh Anta Diop. Le projet panafricaniste prenait déjà forme. La plateforme démocratique n’a plus jamais quitté l’espace public dont tu devins une figure, des plus illustres, des plus emblématiques. La signature Babacar Touré emballait tout ce que le Sénégal et l’Afrique de l’Ouest d’alors avaient comme intellectuels et personnalités politiques de premier plan.

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Ainsi, Sud Magazine d’abord Sud Hebdo ensuite et le quotidien que ce lecteur a entre les mains aujourd’hui, réussirent sous ta présidence, à donner un autre nouveau visage à la presse papier. Les titres qui suivirent par suite complétèrent la bien nommée « bande des 4 », en l’occurrence Walfadjri, le Cafard Libéré et le Témoin. Les hommes et femmes des médias, les universitaires d’ici et d’ailleurs, venaient de découvrir un maître, un militant du journalisme.

La profession s’en trouvait rapidement rendue plus attractive, et des jeunes sortis des Ecoles ou se faisant encadrer sur le tas et le tard pour certains, ne rêvaient que de cette profession où la liberté d’expression côtoyait et se renforçait du devoir assumé de responsabilité. Plusieurs années venaient alors de s’écouler depuis le matin où, dans le froid glacial des mois de décembre à Dakar, je cherchai à te calmer parce que tu venais de te demander pourquoi il y avait un nombre si réduit de membres de l’équipe pour venir assurer la manutention de la publication dans les locaux de l’ADP.

La messagerie qui distribuait tout ce qui était publications de qualité au Sénégal, faisait l’essentiel de son chiffre d’affaires avec les journaux français et la presse africaine de Paris. Nous faisions progressivement de petits pas dans le monde des grands de la Presse. Pour te calmer je t’ai sorti quelques mots dont je n’avais moi-même pas mesuré la portée prémonitoire. « Arrivera un jour, te dis-je, où dans ce pays, personne ne pourra parler de journalisme sans y associer ton nom ». On était en 1986. Et depuis, je ne sais combien de fois je t’ai rappelé cette prédiction, question de te dire que j’avais vu juste, très largement au-delà de ce que je croyais voir venir. Ta réponse me revint très souvent : « je ne travaille pas pour la gloriole » Toi aussi n’avais pas vu venir, car te voilà largement auréolé de gloire. Après le professionnel, nous nous économisons relativement à ce qui fait que j’ai souvent parlé de toi comme d’une sécurité sociale ambulante.

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Ta main n’a jamais quitté ta poche. Des milliers de familles dans ce pays et ailleurs peuvent en témoigner. La semaine dernière encore je te le disais après un appel de ton collaborateur Ousmane Ndiaye, qui ne se signalait jamais sans la bonne nouvelle : « le grand m’a demandé de t’envoyer … » Le lendemain du dernier message pécuniaire de ce même Ousmane, tu m’annonçais être sur le chemin de chez ton médecin.

Ton dernier voyage chez le toubib. Adieu Mbaye. Mes condoléances à la famille, à Ndèye Fatou ta fille qui dut si souvent nous attendre sommeillant seule à la devanture de son école maternelle, le temps des samedis après 13 h, que vienne le chercher le papa occupé à cogiter sur le menu d’une revue à la prochaine parution improbable, parce qu’il fallait aux fondateurs se cotiser pour aller au tirage. Paul Nejem de l’imprimerie Saint Paul que tu te plaisais à appeler Petit Paul avait été un complice des premières heures. Et Sud Magazine pouvait espérer paraître.

Paix à l’âme de celui qui dès le début, crut et accompagna des jeunes journalistes, volontaires et désargentés. De Sud FM et de l’ISSIC puis, nous reparlerons plus tard. Comme tu sus allier vision, professionnalisme et rigueur, cher confrère !







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