Site icon Senexalaat

Pourquoi Paris Honore Claude Mademba Sy

Pourquoi Paris Honore Claude Mademba Sy

Mort en 2014 à 90 ans, le grand défenseur de la décristallisation des pensions des anciens combattants africains, le colonel Claude Mademba Sy sera honoré par une rue du 14e arrondissement parisien ce mardi 25 aout 2020, dans le cadre du 76e anniversaire de la libération de Paris.

 

« Quand on est amoureux de ce pays qu’est la France, on ne comprend pas cette bassesse, cette bêtise, cette ignominie », disait ce soldat engagé pour les droits de ses frères d’armes.

Héros méconnu de la seconde guerre mondiale, Claude Mademba Sy est pourtant un des libérateurs de Paris. Le 25 août 1944, il est le seul Noir à être entré dans Paris libéré par des Américains qui refusaient des « hommes de couleur » dans l’armée blindée. 

Héritier d’une famille de tirailleurs sénégalais qui a payé le prix de la guerre mais gravi les échelons de l’armée Française depuis la première guerre mondiale, Claude Mademba Sy intégre, en 1943,  le régiment de tirailleurs sénégalais du Tchad, devenu régiment de marche du Tchad (RMT), qui intègre la 2e Division blindée (2e DB). Sous-officier dans ce prestigieux régiment commandé par le général Leclerc, qui a débarqué le 1er août 1944 à Utah Beach, il participe à la campagne de Normandie, à la libération de Paris et de Strasbourg, ainsi qu’à la prise du « nid d’aigle » de Hitler à Berchtesgaden, près de Munich.

Lors de la libération de Paris, il sera donc le seul Noir de la division commandée par le général Leclerc. En effet, ce dernier a été obligé de se plier aux règles ségrégationnistes américaines de l’époque. Il est vrai que, lors de la grande guerre, l’armée française avait vite fait d’instituer une circulaire, Linard, qualifiée de raciste, parce que reprenant tous les attendus de la politique ségrégationniste américaine.

Resté dans l’armée, Claude Mademba Sy termine sa carrière comme commandant du 9e bataillon d’infanterie de marine (Bima) après avoir participé aux guerres coloniales en Indochine et en Algérie. Il retourne au moment des indépendances au Sénégal pour former la jeune armée de son pays, avec le grade de colonel. Il entame ensuite une carrière d’ambassadeur du Sénégal dans plusieurs pays européens et africains et à l’ONU. Il était grand officier de la Légion d’honneur depuis 2012 et titulaire de la Croix de guerre 39-45 avec huit citations, dont trois à l’ordre de l’Armée.

Il s’était retiré à Briatexte dans le Sud-Ouest de la France où il meurt le mardi 8 avril 2014.

Ce 25 mai, cette nouvelle dénomination de rue par le Conseil de Paris est, certes, un premier pas dans le sens de l’appel que le président Macron a adressé aux maires de France le 15 aout 2019 lors du 75e anniversaire du débarquement en Provence.

« Je lance un appel aux maires de France pour qu’ils fassent vivre par les noms de nos rues, de nos places, par nos monuments et nos cérémonies, la mémoire de ces gens qui rendent fier toute l’Afrique et disent de la France ce qu’elle est profondément », Emmanuel Macron

Ces derniers mois, sur fond de frustrations et de revendications de reconnaissance politique de la contribution des populations immigrées aux valeurs républicaines, de nombreuses initiatives ont accompagné ces évolutions mémorielles.

Un guichet des héros des colonies à honorer a été installé par l’association Mémoires & Partages le 12 septembre 2019, des pétitions et lettre ouverte signées par plusieurs personnalités lancées ces derniers mois.

L’installation des nouveaux conseils municipaux est, en effet, l’occasion de répondre à la demande de reconnaissance symbolique que de nombreux français expriment notamment depuis la mort de George Floyd.

Depuis plusieurs mois, les symboles de l’histoire coloniale, esclavagiste et raciste en France font l’objet d’une forte contestation sociale que la non-réponse du président Macron, qui s’est bien gardé de citer George Floyd, contrairement à la chancelière allemande Angela Merkel, n’a pas réussi à désamorcer.

Il est vrai que ces exigences sont plus que symboliques puisque reliées aux discriminations systémiques dénoncées récemment par l’ancien Défenseur des droits, Jacques Toubon.

De la police nationale aux municipalités qui abritent des symboles d’apologie de crimes contre l’humanité, c’est un racisme institutionnel qui est dénoncé et ce sont de vigoureuses mesures de justice et d’équité auxquelles sont attendus les décideurs français.







Quitter la version mobile