L’Afrique de l’Ouest, notre grande et belle région, est sens dessus-dessous. On n’a pas fini d’épiloguer sur les graves crises politiques et sociales qui minent plusieurs pays de la région et causent des dizaines de morts, qu’un autre problème, économique cette fois-ci, vient s’ajouter à nos défis.
La Côte d’Ivoire vient en effet de signer un accord de partenariat économique (APE) avec la Grande Bretagne. Cet accord négocié à la hâte, sans en informer les structures compétentes de la CEDEAO, est calqué sur le modèle de l’APE intérimaire qu’elle a signé avec l’Union européenne. Nul ne peut comprendre cet empressement à signer cet accord alors que la Grande Bretagne elle-même n’a pas encore trouvé un accord avec l’UE pour organiser les conditions de leurs échanges commerciaux.
De surcroît, avec l’Union douanière déjà fonctionnelle dans la CEDEAO, aucun pays ne devrait plus se donner le droit de s’engager unilatéralement dans un accord commercial sans que ce dernier ne soit porté par la CEDEAO.
Enfin, alors que les effets de l’APEi de la Côte d’Ivoire avec l’UE sur le commerce intra-régional n’ont pas encore fini d’être documentés et que les implications de la mise en œuvre de la Zone de libre échange continentale (ZLECAf) n’ont pas révélé tous leurs secrets, voilà qu’un pays aussi important que la Côte d’Ivoire se lance dans une fuite en avant que rien ne saurait justifier.
Pour de nombreux dirigeants africains, hélas, l’intégration n’est qu’un slogan répété à longueur de sommets et de conférences pour être dans l’ère du temps. Ils n’y croient pas. L’intérêt national, pour ne pas dire l’intérêt personnel, prime sur tout le reste.
La CÉDÉAO est en train d’être détruite lentement, mais sûrement, par ses dirigeants. Et aucun mécanisme ne permet aux peuples de donner leurs avis. Le rêve de la CEDEAO des Peuples à la place de la CEDEAO des États s’est mué en cauchemar. Nous sommes dans la CEDEAO du club des chefs d’État. Guinée, Mali, Côte d’Ivoire, Nigeria, etc. ça suinte de partout et si nous n’y prenons garde, tout risque de s’écrouler, plus tôt qu’on ne le croit.
Je n’ai jamais cru aux théories du complot que des forces extérieures fomenteraient contre l’Afrique, lequel expliquerait tous nos problèmes. Je crois en revanche qu’il existe de véritables stratégies mise en œuvre par des États, des groupes d’intérêts politiques et financiers étrangers, ayant de solides relais et complices locaux qui leur ouvrent nos portes. Et nos dirigeants, s’ils ne sont pas les complices de ces intérêts, ne font rien contre eux par manque de vision, d’intelligence stratégique et souvent de courage.
Voilà pourquoi nous sommes tous en danger.