Macky sall reste un virtuose de la politique. Le virtuose, c’est ce talent d’un musicien exceptionnel qui réussit à transformer à chaque fois que possible, ces notes à des succès remarquables. un art conciliant le génie et la bête politique dans un espace virevoltant où aucune certitude n’est acquise dès le départ.
Réussir alors à décrocher son principal challenger Idrissa Seck n’était pas une mince affaire. C’est du virtuose politique. Seulement la nomination d’Idrissa Seck laisse beaucoup de non-dits sur un éventuel « deal » qui pourrait être un couteau à double tranchant surtout en direction d’un homme insaisissable comme Idrissa Seck. Une situation du genre « tu me tiens, je te tiens » puisque les deux hommes ont cheminé ensemble aux côtés du président Wade. Ils se connaissent très bien.
L’entrée d’Oumar Sarr ex-PDS est aussi à analyser dans ce même registre. Cependant, nous réaffirmons pour le moment que Macky Sall reste un virtuose de la politique. Plusieurs facteurs concourent et expliquent les choix réalistes et logiques sur les contours du nouveau gouvernement dit d’ouverture de Macky Sall.
Le contexte d’un Sénégal qui s’apprête à engager la bataille de l’après-covid19 à travers le Programme d’actions prioritaires (PaP) 2 estimé à 14712 milliards de frs nécessite un soutien fort que le président de la république ne saurait trouver seulement au sein de son parti politique l’APR qui n’en ait pas les moyens, ni la carrure, ni au sein aussi de la seule majorité présidentielle. il fallait réussir à tisser un large consensus qui dépasse cette sphère dont on a cité plus haut.
Macky sall a compris très vite que malgré une brillante réélection en février 2019 d’une majorité de 58, 27 et un exercice d’une équipe gouvernementale dont on dit qu’elle est la plus nulle de toute l’histoire du pays, il y a quand même plus 41% de sénégalais qui n’avaient pas adhéré à son projet. Il fallait alors avoir le choix de gouverner sans cette importante frange du pays ou avoir l’intelligence politique d’associer ces sénégalais d’une manière ou d’une autre à la gestion du pouvoir. Alors deux opportunités s’offraient à Macky sall à travers le contentieux électoral, mais aussi la pandémie de la covid19. Elles furent des occasions inespérées pour bâtir un consensus fort.
Macky sall déroule deux séquences. La première sera à travers la riposte à la covid-19 de tendre la main à toutes les forces vives de l’opposition qui n’ont pas rejeté une telle offre puisque tous les appelés ont été reçus au Palais.
La deuxième séquence a été celle du dialogue national présidé par Famara Ibrahima Sagna. Qu’à cela ne tienne. les nominations d’Idrissa Seck à la tête du conseil économique, social et environnemental et des membres de Rewmi Yankhoba Diattara comme ministre de l’économie numérique et télécommunications et Aly Saleh Diop comme ministre de l’élevage.
Les choix portés sur Oumar Sarr ex Pds et un des membres fondateurs du nouveau Parti démocratique Suqqali Sopi, Aissata tall sall le maire de Podor ne sont qu’en réalité une logique qui répond bien à une certaine cohérence de la trame politique vécue ces dernières semaines dans notre pays.
Macky sall ne peut pas guère appeler à un dialogue national dont la commission politique présidée par le général Mamadou Niang reste la seule aboutie puisqu’ayant été la seule à avoir déposé un rapport sur la table du président de la république et que ce dernier ne puisse pas en tirer les conséquences. il est alors clair que ces nominations qui viennent parachever le processus du dialogue politique sonnent comme un signal du président de la république d’une certaine ouverture à toutes les forces vives de la nation. a l’exception du Pds dont on ne mesure plus sa représentation suite à son boycott de la présidentielle et sa non participation au dialogue politique et de Sonko qui a aussi boycotté le dialogue politique et qui s’est signalé par un rejet total du système de Macky sall.
L’acceptation d’Idrissa Seck de son poste de Président du conseil économique et social, la deuxième force politique du pays (20,50%) si on prend la présidentielle de 2019 comme référence crédibilise le choix de Macky sall. surtout qu’aux côtés de nouvelles forces politiques qui rejoignent l’appareil gouvernemental, le chef de l’état a continué à accorder sa confiance à la majorité présidentielle en maintenant dans l’attelage gouvernemental les partis politiques comme le Ps, l’AFP et le Pit. seulement cette démarche politique du président Macky Sall en associant son principal challenger à la gestion du pouvoir n’est pas une nouveauté sous nos tropiques. Abdou Diouf a eu en 1991 à expérimenter une telle démarche.
Sortant d’un Programme de redressement économique et financier (PreF) qui sera suivi des programmes d’ajustement structurel de la Banque mondiale et du Fmi, Abdou Diouf n’en pouvait plus. il décida alors de convier à la principale force de l’opposition, le Parti démocratique sénégalais à l’exercice du pouvoir.
D’avril 1991 à octobre 1992, il est ministre d’état auprès du président de la république du Sénégal Abdou Diouf dans le gouvernement d’union nationale. de 1995 à 1997, il réoccupe le poste de ministre d’état auprès du président de la république du Sénégal dans le gouvernement de Habib Thiam. des formes d’entrisme avaient permis au président Abdou Diouf de gouverner tranquillement au cours de la décade 1990-2000. Certes il perdra le pouvoir au profit de son principal opposant, mais il a quand permis à notre pays de garder une certaine stabilité qui favorisa la première alternance politique connue en Afrique. Abdou Diouf n’est pas Macky sall. mais l’on ne saurait pas ne pas trouver une certaine similitude dans la démarche d’ouverture à ses séquences différentes faites par les deux hommes. Macky Sall a eu alors l’intelligence de réussir à convaincre son principal opposant à l’exercice du pouvoir. On attendra pour savoir si Idrissa Seck en sortira gagnant en acceptant un tel challenge. Sur l’aspect des sanctions, les limogeages de Mimi Touré, de Makhtar Cissé, d’Amadou Ba, d’Aly Ngouille ndiaye et de Mahammad Dionne sonnent aussi comme une logique dans la démarche de Macky sall. ces limogés partagent le fait d’avoir été catalogués plus ou moins comme des gens qui lorgnent « le fauteuil présidentiel » ou qui sont opposés à toute idée d’un troisième mandat. la rumeur tenace a fini par perturber la séquence gouvernementale. il est clair que les rapports entre macky sall et ces derniers devenaient un peu difficile parcequ’ils s’impactaient dans l’animation globale de l’action du gouvernement. alors pour certainement clarifier la situation, leurs départs permettront autant au chef de l’état d’avoir les coudées franches, mais aussi aux limogés de prendre en charge avec courage leurs destins présidentiels si c’était le cas. en attendant une chose est sure. Macky Sall imprime personnellement la gestion de son pouvoir sans état d’âme. reste à savoir ce que demain sera fait. Cela, c’est du domaine de dieu… mais le chef de l’état démontre qu’il reste un virtuose de la politique.