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Macky Sall Seul Capitaine À Bord

Le 16 avril 2015, lors d’une conférence de presse restreinte à Kaffrine, le président de la République avait tenu ces propos qui, chaque jour que Dieu fait, se vérifient davantage dans son action politique : « Amenez des gens d’où qu’ils viennent avec n’importe quels moyens. Nous allons réduire l’opposition à sa plus simple expression. Ça va continuer ». A cette occasion, il avait fait l’éloge de la transhumance en déclarant que « la liberté d’aller et venir est garantie par la Constitution et on ne peut pas enfermer les gens dans des carcans politiques ». Mieux, avait-il soutenu, « il n’y a rien de plus normal de quitter un parti où on ne sent pas à l’aise pour rejoindre un autre ».

Depuis son élection en 2012 à la présidence de la République, Macky Sall ne cesse d’élever au rang de vertu la transhumance qu’il considérait comme un « cancer politique » du temps où lui-même, opposant, en subissait les effets. Il n’a non plus jamais caché sa volonté de déstabiliser son opposition qui est pourtant un facteur essentiel de la démocratie. C’est pourquoi, dès après son élection, la machine politico-judiciaire a été déclenchée contre Karim Wade avant de s’abattre sur Khalifa Sall. Ceux qui ont refusé de prêter allégeance à sa Majesté Sall pour soutenir sa réélection sont passés à la guillotine judiciaire. Avant la présidentielle de 2019, Macky Sall a utilisé tous les moyens jugés nécessaires à sa réélection sans état d’âme et sans tenir compte du qu’en-dirat-on des citoyens épris de justice et de démocratie. Le parrainage a été imposé malgré le refus de l’opposition, les mises en garde de la société civile et les interpellations de l’Archevêque de Dakar. In fine, avec la complicité du Conseil constitutionnel, le président s’est choisi ses opposants et pseudo-opposants pour lui servir de faire-valoir à l’élection de février 2019. L’évolution de la situation et la tournure des choses confortent la thèse selon laquelle certains opposants, qui avaient pu franchir le filtre du parrainage, n’étaient en réalité que des taupes lancées dans la compétition pour disperser les voix de l’opposition. Si Idrissa Seck avait soutenu la candidature de Macky comme l’ont fait honteusement le PS, l’AFP et les partis lilliputiens d’extrême gauche (PIT, LD, AJ/PADS Landing), plusieurs voix de l’opposition qu’il a engrangées se seraient reportées sur Ousmane Sonko arrivé en 3e position avec un peu plus de 15 % des suffrages exprimés. De facto, un tel scénario adouberait le leader de Pastef et le consacrerait comme principal adversaire politique de Macky. Et il est indubitable que Touba, fief électoral de Wade, serait tombé dans l’escarcelle de Sonko. Ce qui risquait de porter un rude coup politique au président Macky Sall quand bien même il aurait remporté l’élection. Aujourd’hui, l’histoire montre que Idrissa Seck s’est présenté à la présidentielle non pas pour gagner mais pour faire gagner celui qui est aujourd’hui son « kilifa » politique. C’était un simple paravent pour empêcher Sonko d’avancer et de grappiller des voix dans les zones où Macky est électoralement minoritaire. Le premier grand souteneur de Macky lors de cette élection de février 2019, c’était le leader de Rewmi qui, somme toute, ne croit plus à sa phrase devise « born to be a président ». Ses conférences de presse et l’édition d’un livre post-élection ne sont que des tape-à-l’œil qui, en réalité, n’ont fait que valider la forfaiture électorale du 24 février.

Acte I : Hameçonner le requin Idrissa Seck

En faisant venir Idrissa Seck de nouveau dans la majorité présidentielle, le président de la République a réussi la prouesse de l’enterrer politiquement. Aujourd’hui, celui dont les partisans revendiquaient naguère pour lui le titre de chef de l’opposition, est devenu par la force des avatars de la politique le chef des transhumants sous le magistère de Macky Sall. De tous les hommes politiques du Sénégal, Macky Sall est le plus constant dans son projet politicien. Quotidiennement, il utilise un trésor d’ingéniosité pour hameçonner les politiciens tenaillés par la faim avant de les anéantir. Il est constatable après 9 ans de compagnonnage ou de wagonnage, qu’il ne reste plus rien du PS et de l’AFP sinon les sigles qui ornementent les devantures de leurs permanences. Car, il est probable que le feu des dissensions internes qui consument présentement le PS est attisé par le président Sall. Comment expliquer qu’il laisse Serigne Mbaye Thiam, qui ne s’entend pas avec l’actuelle patronne du PS, Aminata Mbengue Ndiaye, continuer encore à siéger dans son gouvernement ? La logique de Macky Sall aurait voulu que les ministres choisis aient l’onction des leaders des partis alliés.

Pour le chef de Bennoo Bokk Yaakaar, la désagrégation du Parti de Senghor serait du pain béni car, dans ce cas de figure, les responsables et militants qui ne veulent pas perdre leurs avantages préféreront officialiser leur transhumance dans les prairies « marron-beige » plutôt que d’errer continuellement et avec désespérance dans un désert vert aride. Le député Cheikh Seck, maire socialiste de Ndindy, n’a-t-il pas déclaré avec morgue à ses camarades que si Macky le désire, il le soutiendrait pour la quête d’un 3e mandat. Ce au motif qu’il n’y a pas dans la classe politique, y compris au Ps, un homme ou une femme qui a l’étoffe d’un présidentiable. Quelle insulte à son propre parti qui lui a permis d’être Cheikh Seck politique ! On lui rappellera que c’est ce même Macky Sall qui a utilisé, ou contraint, feu Ousmane Tanor Dieng à exclure illégalement Khalifa Sall et tous les socialistes qui partagent avec l’alors maire de Dakar les idéaux d’indépendance politique et le refus du « yobaléma », de l’arrimage aux basques d’un régime au nom de ce concept-escroquerie politique du « gagner ensemble, gouverner ensemble ».

Si Macky a osé embastiller Khalifa Sall sous le pseudo-prétexte de la caisse d’avance, l’exclure de la maire de Dakar, le déchoir de son poste de député, c’est parce que la nomenklatura socialiste lui a donné son onction pour écarter un dangereux empêcheur d’être réélu au premier tour en 2019. Les socialistes se rendront compte un jour comment Macky Sall les a utilisés pour assouvir son projet politique personnel. Et à ce moment-là, ils paieront chèrement le crime politique commis sur celui qui devait pérenniser l’héritage des pères fondateurs (Ibrahima Seydou Ndao, Léopold Sédar Senghor, Mamadou Dia, Léon Boissier-Palun) du PS. D’ailleurs, les prodromes de la fin politique du PS transparaissent dans le mortal kombat entre les camarades ennemis que sont Serigne Mbaye Thiam et Aminata Mbengue Ndiaye. Macky Sall aura le mérite de jeter dans la déchetterie politique le PS, l’AFP, le Rewmi, le Grand Parti, dont le leader Malick Gakou hésite douloureusement à faire le grand saut malgré le blanc-seing d’un quarteron de godillots et les partis lilliputiens (Ld couchée, PIT, AJ-PADS).

Acte II : l’équation Sonko

Après l’Acte I de cette tragi-comédie bien réussie et très appréciée par les Sénégalais, on en vient à l’Acte II qui concerne la déstabilisation de ce qui reste de l’opposition rétive radicale. Aujourd’hui, la seule équation à résoudre est Ousmane Sonko dont la radicalité vis-à-vis de Macky Sall ne souffre d’aucune ambiguïté. Mais puisque le président de la République est conseillé par un trotskyste, il n’a eu aucun mal pour infiltrer la coalition Jotna dont la figure de proue était Ousmane Sonko. L’objectif était de la faire imploser par le biais de ses taupes. Objectif atteint puisque, aujourd’hui, Boubacar Camara a été démasqué comme étant de ceux qui ont été consultés par Macky Sall avant le remaniement. Il est même avéré qu’ils étaient en contact bien avant la présidentielle.

L’empressement de l’ancien directeur général des douanes à sortir de Jotna pour mettre sur pied la coalition « Tabax » prouve à suffisance son intention de déstabiliser l’opposition. Malgré ses dénégations, il est établi que le leader de Jebëlu (pardon) Jengu est le représentant officieux de Sa Majesté au sein de l’opposition. On ne met pas tous les œufs dans le même panier gouvernemental. La coalition autour de Sonko a volé en éclats du fait du climat de méfiance qui règne à l’intérieur. Dans un groupe quand chacun prend son vis-à-vis comme étant Brutus, il est fort à parier que le lien qui les unit devient fragile. Et à la moindre incartade, c’est la désunion. Au moment où l’opposition radicale cherche à recoller les morceaux et mettre sur pied un autre cadre unitaire expurgé de tous les prétendus Judas stipendiés par Macky Sall, ce dernier aura franchi un autre palier pour consolider son pouvoir. Qu’en est-il de Pape Diop de Bokk Gis Gis ? De plus en plus, il est question de lui confier à nouveau la mairie de Dakar lors des prochaines locales pour le faire revenir dans le giron libéral. Et là aussi, les négociations ont bien commencé.

Concernant le PDS, il ne fera hélas aucune action d’envergure sur le terrain de l’opposition. Seuls des communiqués périodiques truffé de condamnations de principes lui tiendront lieu d’action sur le terrain politique. L’enjeu de ce refus volontaire de s’opposer frontalement au président Macky Sall, est de redonner à Karim Wade ses droits civiques et politiques. Ce qui ne sera fait éventuellement qu’après les prochaines législatives. Un Idrissa Seck, futur remplaçant de Niasse au perchoir, serait bien placé pour porter le projet d’amnistie en faveur de Karim. Mais en attendant, Mackyavel continue de rester le seul capitaine à bord du navire politique. Mais attention au syndrome du Titanic qu’on disait insubmersible et qui a fini dans les eaux froides de l’Atlantique le 15 avril 1912 à 2 h 20 !







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