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Macky Sall Et Le Discours De Paris

C’est un discours marquant et remarqué qu’a prononcé notre président Macky Sall à Paris en marge du sommet sur la paix et la sécurité organisé par son homologue français Emmanuel Macron. Un recadrage diplomatique administré au locataire de l’Élysée, diront certains, après que le président français ait déclaré que « la religion musulmane était en crise » ? Probablement pas compte tenu du profond respect dont fait preuve notre chef d’État envers ses contemporains !

La réponse servie par Macky Sall à la France et à l’Europe, avec sagesse et responsabilité, mais sans faux-semblant est une invitation à accepter les différences et à admettre que le droit au respect des croyances est d’égale valeur à celui de la liberté d’expression.

Il appartenait à Macky Sall de se positionner entre la montée de l’intégrisme religieux et l’absolutisme de l’expression et de dire à Emmanuel Macron que « l’islam que nous connaissons, nous, au Sénégal, est un islam de tolérance que nous assumons, … Et que nous voulons aussi qu’il y ait de la tolérance vis-à-vis de l’islam tolérant. C’est bien de combattre le terrorisme, mais il faudrait qu’on respecte aussi la différence… Il faut que nous acceptions les différences mais que nous allions ensemble vers ce que nous voulons bâtir en commun », a indiqué Macky Sall.

Concilier ces deux libertés, de croyance et d’expression, semble bien être la question. S’il faut reconnaître de l’aplomb au président Macron qui a promis de ne pas « renoncer aux caricatures », tout en déclarant haut et fort : « Je ne laisserai personne affirmer que la France, son Etat, cultive le racisme vis-à-vis des musulmans ». Il faut saluer ici de la part de Macky Sall, un discours clair, puissant et cohérent à l’occasion d’une tribune internationale qui n’aura pas manqué de rassurer la population sénégalaise, très majoritairement musulmane.

«S’il faut que nous nous battions contre les extrémismes, il faut aussi que l’on respecte la différence. Pour pouvoir parler avec les autres communautés […]. Nous devons malgré tout bâtir nos identités communes et bâtir les identités communes qui peuvent nous permettre d’aller ensemble, Emmanuel. Et je pense que c’est possible sur l’essentiel», a prononcé Macky Sall.

Avant de poursuivre : «Moi je suis tout à fait conscient que nous pouvons partager des valeurs. Je ne suis pas dans du scepticisme. Seulement, nous avons besoin aussi d’étendre le spectre de la discussion, de tenir compte des réalités des uns et des autres pour bâtir des valeurs communes. C’est tout à fait possible et cela demande qu’il y ait de l’humilité, sachant que nous n’avons pas les mêmes valeurs», a soutenu Macky Sall avant de rappeler, comme pour répondre aux caricatures : «Le prophète Mohamed (PSL) quand il était à Médine, avait hébergé des gens qui étaient en quête de zones de prières.» Il a souligné aussi l’importance pour les Européens d’accepter les différences.

Par ailleurs, le chef de l’Etat sénégalais a plaidé pour « la mise en place de politiques de justice sociale, d’équité sociale et territoriale au sein de chaque pays, en limitant les inégalités, les injustices pour la stabilité nationale ainsi qu’internationale ».

Alors même si les déclarations de M. Macron sur la liberté de caricaturer ont entraîné de vives tensions dans plusieurs pays musulmans, allant de manifestations jusqu’au boycott de produits français, il ne faut y voir aucune insulte communautaire.

Rappelons que le droit au respect des croyances est un droit fondamental consacré par les grands textes de la Déclaration des droits de l’homme : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions mêmes religieuses » ; l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 a surtout élevé le respect des croyances au rang de principe constitutionnel en énonçant : « La France assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. ».

Il était cependant important, dans un discours fondateur, de rappeler qu’il y a des libertés qui heurtent, choquent ou inquiètent, et que le sentiment religieux, qui est un des éléments les plus profonds de la personne humaine, autant que la liberté d’expression, doit être protégé. En effet, le respect des croyances est une composante essentielle de la coexistence pacifique des peuples.

Dans nos sociétés plurielles secouées par des crispations identitaires autour d’objets religieux, ne devrait-on pas chercher à enraciner la tolérance dans le droit et dans la culture, comme nous savons le faire traditionnellement chez nous au Sénégal ?

C’est pourquoi je veux remercier notre président. D’une part pour avoir réclamé une place permanente pour l’Afrique au conseil de Sécurité de l’ONU, à l’issue de ce Forum de Paris sur la paix. En visioconférence avec le secrétaire général de ladite institution et d’éminents autres dirigeants du monde, Macky Sall a appelé à la remise en cause des « règles dépassées » qui régissent cette instance mondiale de décision.

Et d’autre part pour son discours d’ouverture et sa clairvoyance. Une ode au respect et à la tolérance. Il existait un notoire « discours de Dakar » d’un précédent président Français. Désormais il y a « Le discours de Paris » du président Sénégalais. À chacun son humanisme et sa civilité.







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