Depuis qu’il a rejoint le gouvernement, Idrissa Seck et les siens ne cessent de hâbler sur ses retrouvailles avec son bienfaiteur. Aujourd’hui, il n’a aucune vergogne et aucune gêne pour adorer celui qu’il abhorrait dans un passé récent. Pour justifier son reniement, il se contorsionne laborieusement dans des équivocités discursives sans convaincre une seule fois son auditoire. Dans plusieurs sorties médiatiques, il avait déclaré qu’il ne serait plus conditionné par un décret mais par les suffrages. Ce qui veut dire qu’aucun président de la République ne l’assujettirait plus en le nommant par voie décrétale. Mais voilà le nouveau président caméléonesque du CESE qui se lance dans des explications tortueuses pour nuancer ses propos en ouvrant un interstice qui laisse place à la volonté divine dans toute prise de décision. Mais puisque nous vivons à l’ère de la VAR, tout propos peut être passé à la loupe du fact-checking. Malheureusement pour lui, ses propos ne souffrent d’aucune ambiguïté. Il a déclaré sans circonlocutions dans une de ses sorties que pour ce qui reste de sa vie politique, un décret ne conditionnera plus son destin. Pour donner des gages d’amitié sincère lors de son installation à son nouveau mentor, Idy, avec ses pantalonnades fadasses et bouffonneries malséantes, plonge son assistance dans l’hilarité générale en soutenant que lui et Macky sont la fusion du pain et du lait. On est en pleine tragi-comédie.
Si Idy sent le besoin de pondre au forceps tout ce tintamarre explicatif, c’est parce que ses discours et postures passés invalident sa présente imposture. « Au secours Djibo Ka ! Le virus de la tortuosité dont vous accusait un certain Idrissa Seck l’a mortellement infecté à son tour. » La pandémie de la Pochevide-20, pardon de la Covid-19 est devenue son prétexte de prédilection pour s’adonner à tous les reniements et ignominies. Aujourd’hui, les invectives furibondes, les vannes insultantes et les lazzis incisifs sous-tendus par son rictus sardonique ont fait place aux embrassades chaleureuses, aux bisounours tendres. On s’enlace d’une main tout en maintenant le couteau tueur enserré dans l’autre. Et à la moindre occasion rêvée, Brutus entre en action.
Par conséquent, il est évident que ces épousailles morganatiques dont les accordailles démarchées depuis plus de 15 mois dans l’ombre et célébrées publiquement sont celles de la carpe et du lapin. Leur alliance est impossible puisque tout les oppose. Macky Sall, en attente d’interview dans les locaux de Walf le 12 décembre 2011, a laissé échapper en off que «le jaloux président de Rewmi ne connaitra jamais le bonheur d’être président du pays».
Il est de notoriété publique que jamais Idy n’a supporté que cet ancien président de la Cellule initiatives et stratégies (CIS) et dont il était le patron en tant que numéro 2 du PDS après Abdoulaye Wade devienne président du Sénégal alors que lui, président de Rewmi, est né pour être président du Sénégal. Aux premières heures de l’alternance, l’alors directeur du président Wade reprochait avec morgue à un certain Macky Sall de manquer d’ambition quand ce dernier s’était pointé à son bureau sur recommandation du président Wade pour lui demander un poste, fût-il celui de directeur adjoint. Ce Macky Sall qui a gravi les échelons du gouvernement jusqu’à la Primature au moment où Idy en était défenestrée a été le maitre d’œuvre de sa mise en accusation à propos du scandale des chantiers de Thiès. Idrissa Seck en a toujours voulu à son successeur à la Primature qu’il a accusé d’avoir voulu prononcer son oraison funèbre en exposant sa mise en accusation devant toutes les représentations diplomatiques le 26 juillet 2004, soit trois jours après son embastillement.
Ce réquisitoire livré par-devers les ambassadeurs accrédités au Sénégal est un moyen pour décrédibiliser à jamais celui qui dans ses rêves les plus fous a voulu prématurément être calife à la place du calife. A cet instant empreint de gravité, il fallait que Macky Sall présentât aux yeux du monde entier ce nain politique trop ambitieux comme un vulgaire détourneur de milliards avant de l’expédier à Rebeuss. Et pour sortir de cet enfer de Rebeuss, Idy a montré encore une facette hideuse de sa personne. Il est de notoriété publique que le fameux protocole de Rebeuss paraphé nuitamment a élargi Ndamal Kadior.
Il est avéré que l’actuel président du CESE entretient des rapports troubles avec l’argent public. Après les 44 milliards non encore élucidés des chantiers de Thiès à cause d’un non-lieu politique qui a mis un terme à l’action judiciaire, Idy n’a pas hésité à déclarer le 29 octobre 2006 à l’émission Grand Jury de la RFM qu’il a fait profit avec les fonds politiques. «Je ne me suis pas enrichi à la faveur du pouvoir. Les seules ressources que mon passage au pouvoir a mises à ma disposition et qui renforcent mes moyens d’intervention politique et sociale, ce sont les fonds politiques que le président de la République lui-même m’a alloués de façon discrétionnaire », a-t-il soutenu au micro de Mamadou Ibra Kane. Terrible aveu d’enrichissement sans cause avec nos deniers nationaux sous le pseudo-prétexte qu’il s’agit de fonds dont l’utilisation n’est assujettie à aucun contrôle.
Dans ce poker menteur où les agendas politiques diffèrent radicalement, chacun cherche à duper son alter ego. Mais le principal perdant dans ce jeu de dupes, c’est le nouveau président du CESE. Son image fluctuante qui se déforme sous le miroir de ses intérêts a fini par répugner les Sénégalais qui ne parviennent pas à le situer. S’il a rejoint les prairies fertiles de la mouvance présidentielle pour bénéficier d’un salaire consistant et de fonds politiques (encore les fonds politiques) d’une institution superfétatoire qui ne sert qu’à caser des retraités désargentés ou des va-nu-pieds qui végètent dans une impécuniosité ambiante, s’il a renié ses convictions d’antan pour disposer de ministères qui serviront de vache laitière à un Rewmi exsangue, le retour de bâton risque d’être mortel. De son parti politique, il n’existe plus qu’une carcasse désincarnée dont les os qui le tiennent encore brinquebalent avant de se désagréger.
Macky Sall a réussi son projet politique : montrer aux Sénégalais que celui qui a été deuxième à la présidentielle de 2019 n’est pas un homme chevillé au respect de la parole donnée. En contraignant son nouveau rallié à venir à Canossa pour passer sous les fourches caudines d’une kyrielle de rétractations verbales et de reniements de principes, il offre un enterrement politique de première classe à Idy qui se glorifie de rester toujours en vie nonobstant les pelletées de sable qui veulent l’ensevelir. Mais cette fois-ci, c’est une odyssée sans retour.