La maison de Senghor a été transformée en dépotoir de babioles sans même que nous le sachions… Nous avions la vision désordonnée de marchands ambulants vendant citrons, oranges, ballons, kleenex, piscines gonflables et ballons sauteurs à des sénégalais indifférents à l’incongruité que représentait ce lieu de vente si singulier qu’est la façade d’un musée national consacré à la vie de Léopold Sédar Senghor. Une diffusion de ce désordre a ému l’opinion et « bougé » le maire Palla Samb qui a diligenté ses services municipaux et réglé, en tous cas provisoirement la situation, en positionnant ses hommes devant le musée depuis une semaine et en empêchant le retour des « envahisseurs » sur les trottoirs de la résidence du président-poète défunt.
Le souci est que ce n’était pas la première fois mais disons la énième fois que le maire de la commune de Fann-Amitié agissait sous les demandes réitérées de la conservatrice du musée, qui semblait impuissante face à cette situation surréaliste d’envahissement d’un espace que l’on aurait souhaité, par respect, épargné par la « soukisation » de notre espace public. Ce que nous ne savions pas c’est que, cette maison, musée Léopold Sédar Senghor, sous la garde et la responsabilité de la gendarmerie nationale, qui y affecte deux agents à demeure, servait de « réserve » aux marchands ambulants qui y entassaient leurs babioles et pouvaient ainsi rentrer chez eux les mains vides, l’esprit serein, puisque leurs marchandises étaient bien gardées par notre gendarmerie nationale elle-même !
Nous n’osons pas imaginer une seule seconde que ces gendarmes étaient « rémunérés » ou « gratifiés » par ces jeunes ambulants pour leur servir de « vestiaires » ou de « consignes »… Ils auront peut-être juste fait preuve de compassion pour ces jeunes qui « daan leur doolé » comme ils disent pour justifier l’invasion désordonnée de notre espace public, en évitant qu’après une journée passée sous un soleil de plomb à courser le client chargés de citrons, d’oranges et de ballons, ils soient en plus obligés de transporter toutes ces babioles sur leurs dos endoloris, dans des tata surchargés, jusqu’à leurs chambres de banlieue… Quelle bonté de la part de ces gendarmes ! Il faudrait presque les décorer pour soutien à une jeunesse désespérée prête à affronter les océans ! Vraiment on les comprend… Ils sont sympas ces gardiens de musée « déguisés en gendarmes ».
On comprend dès lors la lassitude du maire à continuer un combat perdu d’avance contre ce désordre, puisque cautionné par la force publique, faisant de ce cirque quotidien une « farce publique » à laquelle assistait impuissante la responsable de ce musée et par conséquent son département de tutelle, le ministère de la Culture, lequel au vu de ces images honteuses se doit normalement non pas seulement de réagir, mais de sévir, en exigeant du corps auquel il a confié la sécurité et la tranquillité de ce lieu, à savoir la gendarmerie nationale, des claires et audibles explications qui ne laissent aucune place à la suspicion d’une quelconque forme de corruption. Tous les responsables de ce souk nous doivent « une légende sous chaque photographie ». C’est le minimum que l’on peut attendre d’eux. Pour au moins comprendre.