Pour résoudre l’équation de la mobilité urbaine face à la croissance démographique, l’Etat du Sénégal a initié le projet Brt pour désengorger les voies routières et faciliter la bonne circulation des biens et des personnes. Ce projet, bien qu’utile, est «espacivore» par l’engloutissement de plusieurs espaces dans les différents quartiers qu’il traverse ; un mal nécessaire, disent certains. Parmi les zones impactées figure en bonne place la commune de Mermoz-Sacré Cœur et plus précisément les quartiers Sacré Cœur et Baobabs.
En effet, de grands espaces aménagés tels que la moitié des deux voies de Sacré-Cœur et une bonne partie de la bande de terre de Sacré-Cœur 2 à Baobabs deviendront des voies de passage de la nouvelle infrastructure.
La cherté des terrains et des maisons, cumulée à la cohabitation familiale (plusieurs générations dans une même concession), obligent les familles à transformer les maisons en construisant en hauteur. Cela n’est pas sans conséquences sur la voirie (réseaux d’assainissement, augmentation du parc automobile, production et gestion d’ordures ménagères, etc.), sur l’épanouissement des jeunes et des enfants (insuffisance d’aires de jeux et de sport), sur la tranquillité des personnes âgées (pollution sonore, défaut d’espaces de repos et de promenade).
Nous autres citoyens et l’autorité municipale, en première ligne, devons avoir donc une vision plus humaniste par une approche écologique et sociologique afin d’optimiser le peu d’espace qui nous reste afin d’en faire exclusivement des aires de jeux divers, de repos, de promenade, d’éducation à la citoyenneté, des espaces verts, etc. Cette commune qui naguère disposait de beaucoup de poches de terres, qui servaient à l’épanouissement des enfants, en a perdu la presque totalité au profit d’extension des concessions et de commerces. La jeunesse est royalement ignorée dans les projets de développement, autant que le sont les statistiques de l’Ansd, qui projettent une population de 28 millions d’habitants en 2039 pour le pays, soit une progression de 57%. Autant de raisons qui nous obligent à nous projeter dans l’avenir pour mieux le préparer dès à présent, avec générosité et patriotisme, en mettant le citoyen au cœur de nos préoccupations.
L’utilisation abusive des espaces de vie à des fins commerciales (vente de véhicules, lavage, restauration) doit être rationalisée. Les riverains sont loin de cette cité tranquille, bien urbanisée, à la belle voirie et verte, qui avait motivé leurs décisions d’habiter dans les Sicap. Et c’est avec beaucoup de remords qu’ils le vivent. Ils sont devenus des spectateurs impuissants devant cette transformation hideuse de leur environnement de rêve. Les trottoirs sont occupés par de petits commerces, obligeant les piétons à marcher sur les voies routières avec tous les risques encourus, les devantures des maisons sont devenues des lieux de stationnement de véhicules par défaut d’espaces multi-usages aménagés. Les quartiers de la commune de Mermoz-Sacré Cœur et ses habitants ne méritent pas une telle injustice.
Il s’y ajoute l’installation progressive des entreprises et écoles privées de formation qui est, en partie, la cause de certains désagréments notés, tels que l’occupation de la voie publique, les difficultés de circulation, les nuisances sonores, la production de déchets (emballages plastiques, occupation des ruelles, etc.). Loin d’être une fatalité, le Brt et ces entreprises sont une très grande opportunité pour la commune, encore faudrait-il savoir comment se l’approprier et l’utiliser dans un partenariat fécond et durable avec ces dernières. En effet, la réponse compensatoire demeure écologique, environnementale et éducative. Elles peuvent et doivent contribuer, dans le cadre du volet Rse, à l’amélioration du cadre de vie, à l’aménagement d’espaces verts, au reboisement, à la restauration des infrastructures sportives, à la formation et aux aides scolaires. Par conséquent, il serait préférable et plus judicieux de s’orienter vers ces opportunités, de développer le partenariat extérieur pour plus de valeur ajoutée, que de se focaliser sur des taxes d’épicerie qui obligent à l’«espacide» et qui des fois ne sont même pas acquittées ou le sont de manière irrégulière. Certaines enseignes commerciales, du fait de leur puissance financière, parviennent à bénéficier de privilèges écocides et illégitimes qu’elles n’oseraient jamais demander encore moins obtenir dans leur pays d’origine.
Ce nombrilisme économique qui s’affranchit du bon sens et des droits élémentaires des citoyens à une éco-vie doit avoir comme réponse une forte éco-résistance appuyée et encouragée par tout citoyen patriote soucieux d’un cadre de vie agréable et d’un environnement sain et sécurisé et pour lui et pour ses concitoyens. Cela s’appelle ni plus ni moins de la responsabilité et de la redevabilité. J’en appelle à l’empathie et au patriotisme de toutes les autorités de ce pays qui ont fait le choix de servir.
Demba MAKALOU
Acteur politique
indépendant
Coordonnateur
de la coalition citoyenne
Mermoz Sacré-Cœur Ca kanam